Walid Daqqa : Le secret des hommes et le secret de l’huile. Par Samir Belahsen

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Photo montage de Walid Daqqa , sa fille Milad et sa femme Sana, pour la campagne Libérez Walid Daqqa

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Vivre, c'est aussi renoncer… Par Samir Belahsen

« Un homme est malheureux parce qu'il ne sait pas qu'il est heureux. Voilà tout, là est le secret. Celui qui s'en rend compte devient heureux immédiatement. »

Fiodor Dostoïevski

« Pour l'essentiel, l'homme est ce qu'il cache : un misérable petit tas de secrets. »

 André Malraux

Cette fois, vous le comprendrez, c’est l’actualité qui me ramène à la littérature.

L’actualité

Walid Daqqa, né le 18 juillet 1961 à Baqa al-Gharbiyye, fait partie de cette population que l’on qualifie d’arabes de 1948 ou d’arabes d'Israël.  

Militant du FPLP (Front populaire pour la libération de la Palestine), il a été condamné en 1986 pour l'assassinat d'un soldat israélien, ce qu'il a toujours démenti. En fait, Daqqa n'a pas été reconnu coupable d'avoir commis le meurtre lui-même, mais d'avoir commandé le groupe, une accusation qu'il a toujours rejetée.

En prison, il n’arrête pas d’apprendre, il obtient une licence et une maîtrise en études démocratiques en 2012, un diplôme en études régionales en 2016, et une inscription au doctorat en philosophie de l'Université de Tel-Aviv. 

Il n’arrête pas non plus d’écrire, une production à l'intersection de la politique, de la philosophie et de la littérature. il partage ses réflexions sur le destin politique de son peuple et l’emprisonnement.

Le 07 avril dernier, pendant le génocide de Gaza, il est mort en prison, après 38 ans d'emprisonnement des suites d’un cancer mal traité. Selon Amnesty international, il avait été pendant le génocide « torturé, humilié, privé des visites de sa famille » et des soins médicaux dont il avait besoin.

L’histoire 

L’HISTOIRE DU SECRET DE L’HUILE, est le titre du roman de Walid Daqqa pour raconter l’histoire, l’actualité et l’espoir…en Arabe palestinien.

Joud, 12 ans, conçu avec le sperme de son père sorti clandestinement de prison, se prépare à voir son père pour la première fois, mais apprend que sa visite a été annulée par les autorités d’occupation pour des raisons de sécurité. 

(Cette pratique palestinienne a permis la conception de dizaines d’enfants dont les pères sont en captivité. L’auteur a pu ainsi avoir une fille qu’il avait nommée : Milad.)

Le cœur brisé, le jeune garçon Joud se promène dans la nature où il discute avec différents animaux et plantes : un lapin nommé Sammour, un oiseau nommé Abu Richa, Khanfur le chat, Abu Nab le chien, et enfin un olivier vieux de 1 500 ans nommé Umm Roumi. 

Tout le monde écoute son chagrin face à l’annulation de la visite et, à son tour, lui parle de leurs souffrances sous l’occupation et de leur désir de liberté. 

Sammour, le lapin, a été séparé de sa famille par le fameux mur. 

Abu Nab, le chien avait été forcé de travailler pour l’occupant avant de fuir…

Umm Roumi, le vieil olivier, confie à Joud que les autorités israéliennes ont menacé de la déraciner et de la déplacer de son domicile en Cisjordanie vers la ville d’Aboula, dans le nord occupé. « Ils veulent m’arracher de cette terre comme ils veulent t’arracher du cœur de ton père… » 

Il révèle à Joud le secret de son huile sacrée. Si elle est frottée sur la peau, l’huile rendra Joud invisible, l’aidant à atteindre son père dans sa cellule. 

Son père n’était pas loin de perdre la tête lorsqu’il entendit sa voix prononcer les mots : « Je suis ton fils, Joud. »

Joud, ayant reçu de l’olivier une petite quantité d’huile hésita longtemps pour décider à quels usages l’affecter. 

En définitive et après une longue discussion sur les priorités avec son père et ses codétenus, il décida de l’utiliser pour la libération du détenu arabe le plus ancien : l’Avenir…en l’utilisant pour la recherche scientifique.

La nouvelle de Walid se veut un message à Milad (la fille qu’il n’a jamais vue) et à toute sa génération qu’on ne peut libérer l’Avenir que par la science.

En voyant l’engouement des jeunes palestiniens pour l’enseignement, en écoutant les Gazaouis pendant ce génocide regretter leurs universités détruites et leurs scolarités interrompues, j’ose croire qu’ils l’ont compris.

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