Plus de 20 ans après l’apartheid, les Sud-Africains toujours face à une crise identitaire

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"L?identit? nationale telle qu?elle est pr?sent?e dans les m?dias ne me procure pas le soutien social dont j?ai besoin. Je me refuge dans mon identit? Zouloue", indique Sibusiso Sisoto, un ?tudiant universitaire sud-africain

Sisoto fait partie de millions de Sud-Africains qui s?interrogent sur l?existence d?une identit? collective qui r?unit le peuple de ce pays, lib?r? il y un peu plus de 20 ans du joug d?un r?gime raciste qui bafouait les droits de la majorit? noire autochtone. Les propos de ce jeune ?tudiant de sociologie r?sument le d?bat actuellement engag? en Afrique du sud au sujet de l?identit? nationale, un d?bat qui ne manquera pas, selon les experts, de fa?onner la trajectoire de la transition dans laquelle ce pays s?est embarqu? depuis la fin de l?apartheid en 1994. Les Sud-Africains, de tous les horizons, ont ?t? engag?s dans ce d?bat d?s l?av?nement de la d?mocratie dans ce pays, affectueusement surnomm? "la nation arc-en-ciel" en r?f?rence ? sa riche diversit? ethnique et culturelle. Le pays a confectionn? d?s 1994 un drapeau multicolore, symbole de cette diversit?. L?hymne national, adopt? trois ans plus tard, repr?sente une combinaison de l?ancien hymne de 1928, "Die Stem van Suid-Afrika", avec le chant populaire africain des mouvements anti-apartheid, Nkosi Sikelel iAfrika.? Les paroles alternent les cinq langues les plus parl?es (xhosa, zoulou, s?sotho, afrikaans et anglais) parmi les onze langues officielles que compte l?Afrique du Sud. En d?pit de ces symboles, la nation arc-en-ciel demeure toujours tiraill?e dans ce d?bat identitaire, qui traduit l??chec ? parvenir ? une coh?sion qui tourne d?finitivement la page d?un pass? douloureux. Des appels lanc?s r?cemment pour le changement du nom du pays et de certaines villes et sites d?une grande importance historique pour la minorit? blanche, traduisent l?intensit? de ce d?bat. L?Afrique du sud vit une v?ritable crise identitaire, indique Ken Sibanda, c?l?bre avocat et dramaturge sud-africain, notant que les actes de violence x?nophobe de 2008 et 2015 et l??chec de l?Afrique du sud ? s?engager pleinement avec le reste du continent africain illustrent cette crise identitaire. A l?origine de cette crise r?side le pass? colonial, explique le dramaturge, qui vient de rejoindre les voix appelant au changement du nom de l?Afrique du sud. "Il est temps pour les Sud-Africains de rompre avec le pass? colonial et adopter un nom africain ? l?instar d?autres pays comme le Swaziland, le Lesotho, le Botswana, la Zambie ou encore le Zimbabwe", dit-il. Parmi les noms propos?s dans ce contexte figure Mzantsi, nom utilis? par la minorit? Xhosa, ou encore Nguniland, une appellation partag?e par les plus grands groupes ethniques du pays (Xhosa, Zoulou, Ndebele et Swati). Une tentative similaire de changer le nom de la capitale Pretoria semble sur la bonne voie. Le maire de cette deuxi?me plus grande m?tropole du pays a r?cemment annonc? que la capitale sera rebaptis?e Tshwane, au nom du renforcement de la coh?sion sociale. Les experts de l?Institut sud-africain des relations raciales (IRR) argumentent que le d?bat au sujet du changement du nom du pays traduit cette qu?te des Sud-Africains de forger une identit? nationale de nature ? encadrer les relations au sein de l?Afrique du sud nouvelle. C?est cette m?me qu?te qui a toujours sous-tendu les actions du gouvernement conduit par l?African National Congress (ANC), indique l?institut dans une analyse. Une ?tude r?alis?e r?cemment a montr? que les efforts de l?ANC ont donn? des r?sultats mitig?s. Plus de 20 ans apr?s la fin de l?apartheid, les Sud-africains ont toujours tendance ? se pr?senter sous la banni?re de leur identit? ethnique et non pas leur appartenance ? un pays qui s?appelle l?Afrique du sud. En d?pit de la profonde transformation sociale, ?conomique et politique depuis le d?mant?lement de l?apartheid, seulement 52,4 pc des Sud-Africains ont accept? d??tre d?sign?s comme des Sud-Africains, selon l??tude. Une autre ?tude commandit?e par la Fondation nationale de la recherche et publi?e dans le journal des ?tudes africaines modernes confirme cette tendance selon laquelle les Sud-Africains s?identifient plus ? leur groupe ethnique plut?t qu?au pays. Cette situation se traduit par une fragmentation identitaire qui sape les efforts consentis par les autorit?s dans le sens du renforcement de la coh?sion sociale, argumentent les auteurs de l??tude, mettant en garde contre ce qu?ils ont qualifi? de "polarisation" de la soci?t? sud-africaine. Cette polarisation semble s?accentuer sous le coup de la grave crise ?conomique et sociale qui bat son plein dans le pays, estiment-ils. "Une situation pareille o? les identit?s sociales et ethniques ne sont pas encore canalis?es et red?finies ?mane d?une r?elle crise identitaire", estime le professeur Elirea Bornman.