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Conflit russo-occidental : Faits, effets et méfaits des derniers 24 h
Le sénateur américain Lindsey Graham a appelé jeudi "quelqu'un en Russie" à assassiner le président Vladimir Poutine. Il a juste oublié d’assortir d’une prime pour celui qui ramènerait Poutine mort ou vif.
Le chef des renseignements russes : les Occidentaux veulent "détruire" la Russie
Moscou - Le numéro 1 des renseignements extérieurs russes (SVR), Sergueï Narychkine, a accusé jeudi les Occidentaux de vouloir "détruire" la Russie, justifiant l'opération russe en Ukraine par l'ambition de Kiev de se doter d'armes nucléaires.
"Les masques tombent. L'Occident n'essaie pas seulement d'entourer la Russie d'un nouveau +rideau de fer+. Il s'agit de tentatives de destruction de notre Etat - de son +annulation+", a écrit M. Narychkine dans un texte revenant sur l'histoire récente entre Moscou et l'Occident.
"Aujourd'hui, la guerre s'est approchée des frontières mêmes de notre patrie. Donc, pour nous, ce n'est pas exactement une guerre +froide+, mais plutôt +chaude+", a-t-il poursuivi.
Assurant que la Russie avait "une mission spirituelle", M. Narychkine a estimé que "sous nos yeux se déroule une étape fondamentalement nouvelle de l'histoire européenne et mondiale" avec "l'effondrement d'un monde unipolaire" où les Etats-Unis dictent leur loi.
Fustigeant l'élargissement de l'Otan ces trente dernières années et le "génocide culturel" des russophones dans l'ex-URSS et en Ukraine, il a accusé les Occidentaux de chercher à "établir un blocus économique, informatif et humanitaire" de la Russie.
Un sénateur américain appelle à assassiner Poutine, mais oublie la prime
Le sénateur américain Lindsey Graham a appelé jeudi "quelqu'un en Russie" à assassiner le président Vladimir Poutine pour rendre "un grand service" à son pays et au reste du monde.
"Quelqu'un en Russie doit mettre les pieds dans le plat (...) et se débarrasser de ce type", a affirmé le sénateur républicain lors d'une émission télévisée. Il a ensuite enfoncé le clou dans une série de tweets, ajoutant que "les seuls qui peuvent arranger ça, ce sont les Russes".
"Y a-t-il un Brutus en Russie?" s'est interrogé M. Graham, en évoquant l'un des assassins de l'empereur romain Jules César. Il a juste oublié d’assortir d’une prime pour celui qui ramènerait Poutine mort ou vif.
Sérieux, l'ambassadeur de Russie aux Etats-Unis a demandé vendredi des "explications officielles et une condamnation ferme de cette déclaration criminelle" par le gouvernement américain. Apparemment l’ambassadeur n’a pas compris ce qui se passe, ou il fait semblantCes propos, un "appel au terrorisme", sont "inacceptables et scandaleux", a écrit Anatoli Antonov sur la page Facebook de l'ambassade.
Les groupes français peu pressés de quitter la Russie, le gouvernement prudent
Une semaine après le déclenchement de l'invasion russe en Ukraine, peu de grandes entreprises françaises ont pour l'instant annoncé leur intention de se retirer de Russie, tandis que le gouvernement français dose prudemment ses messages vis-à-vis de la communauté d'affaires.
Les britanniques BP, Shell et Jaguar Land Rover, les américains ExxonMobil et Disney, l'allemand Daimler Truck, le norvégien Equinor, le constructeur suédois Volvo ou encore les géants de la tech américaine Microsoft et Meta... de nombreuses multinationales ont pris leur distance avec la Russie depuis l'invasion de l'Ukraine.
En France, le mouvement est plus timide, hormis le groupe de luxe Hermès qui a annoncé vendredi mettre en pause ses activités commerciales dans le pays, où il exploite trois magasins -dont l'un au sein de la célèbre galerie marchande Goum, sur la place Rouge- et emploie une soixantaine de personnes.
Les autres grands noms du luxe et de la cosmétique français, LVMH, Kering, L'Oréal, n'avaient pas répondu vendredi matin aux sollicitations de l'AFP.
De son côté, l'armateur CMA CGM a annoncé qu'il allait cesser de desservir les ports russes, mais davantage "dans un souci de sécurité" que de rétorsion économique.
TotalEnergies a, lui, décidé qu'il "n'apporterait plus de capital à de nouveaux projets en Russie", sans évoquer un quelconque retrait d'un pays dans lequel il a des intérêts importants.
Quant à la banque Société générale, très exposée via sa filiale Rosbank, elle a simplement assuré jeudi qu'elle pourrait résister si elle venait à être privée de cet actif en Russie.
Bruno Le Maire, ministre de l’Economie a dû faire marche arrière après avoir affirmé que l'Union européenne allait "livrer une guerre économique et financière totale à la Russie", jugeant après coup le mot guerre "inapproprié". Ses propos avaient suscité une vive réaction et une menace à peine voilée de l'ancien président russe Dimitri Medvedev.
Au gouvernement, le message est plutôt "d'accompagner" les entreprises exposées aux répercussions du conflit en Ukraine et aux sanctions imposées à la Russie, affirmait le ministre au Commerce extérieur Franck Riester mardi à l'issue d'une réunion avec une soixantaine d'entreprises, dont l'essentiel du CAC 40, et de fédérations professionnelles.
-"Aucune orientation précise"
Après un point sur la situation géopolitique et l'évolution du conflit en Ukraine, cette réunion a aussi été l'occasion pour le Quai d'Orsay et Bercy de mettre en garde les entreprises sur la perspective d'un conflit long, avec la possibilité de contre-sanctions russes contre les intérêts occidentaux.
Le ministère des Affaires étrangères appelle d'ailleurs désormais sur son site internet les voyageurs - touristes et professionnels - à "quitter sans délai le pays" alors que les liaisons aériennes se raréfient avec la Russie et à "différer tout déplacement vers la Russie".
"La perception d'un conflit qui pourrait escalader et durer a eu un impact fort sur les entreprises, surtout pour une communauté d'affaires assez résiliente, prompte à s'adapter aux circonstances locales", avance une source diplomatique.
Mais concrètement, "il n’y a eu aucune annonce ni orientation précise donnée aux entreprises quant à une position à adopter" sur notre présence en Russie, a indiqué un participant à l'AFP. "Il n’y a pas eu de demande de désengagement à ce stade", a abondé un participant du secteur agroalimentaire.
Un autre assure qu'il n'a pas été demandé "de rappeler les travailleurs expatriés". "Le gouvernement n'a pas demandé aux entreprises d'arrêter leurs activités en Russie, mais ses représentants ont demandé si certaines envisageaient" des actions, confirme encore un autre.
La France est le premier employeur étranger en Russie et le deuxième pourvoyeur d'investissements directs étrangers et n'a donc pas uniquement des relations commerciales avec la Russie, ce qui peut compliquer un retrait du pays.
"Les entreprises françaises globalement sont plutôt des investisseurs, ce sont des entreprises qui ont du personnel sur place, donc la communication doit être calibrée", indique ainsi la source diplomatique.
Les Alliés condamnent les bombardements de la centrale nucléaire
L'Otan a condamné vendredi les bombardements "irresponsables" des forces russes contre une centrale nucléaire dans le sud de l'Ukraine et les Alliés envisagent de nouvelles sanctions contre Moscou pour mettre fin à la guerre.
Mais ils refusent d'être impliqués directement dans la guerre. "L'Otan ne veut pas être engagée dans le conflit", a réaffirmé son secrétaire général Jens Stoltenberg au début d'une réunion d'urgence des ministres des Affaires étrangères de l'Alliance convoquée au 9e jour de l'invasion de l'Ukraine par l'armée russe.
Site nucléaire ukrainien visé: à l'ONU, les Etats-Unis dénoncent "une immense menace", Moscou dément toute responsabilité
L'attaque d'un site nucléaire ukrainien par la Russie a représenté "une immense menace pour toute l'Europe et le monde", a affirmé vendredi au Conseil de sécurité de l'ONU l'ambassadrice américaine Linda Thomas-Greenfield, la Russie démentant toute responsabilité dans cet évènement.
"Grâce à Dieu, le monde a échappé à une catastrophe nucléaire" dans la nuit, a ajouté l'ambassadrice américaine, en qualifiant cette attaque d'"irresponsable" et de "dangereuse". "Non seulement (Vladimir Poutine) n'a pas écouté" les appels à arrêter son invasion de l'Ukraine, "mais nous venons d'assister à une nouvelle escalade dangereuse qui représente une immense menace pour toute l'Europe et le monde", a dit la diplomate.
Son homologue russe, Vassily Nebenzia, a rejeté les affirmations de l'Ukraine et des Occidentaux selon lesquelles Moscou est responsable de l'attaque, les qualifiant de "mensonges". Elles font "partie d'une campagne de mensonges" à l'encontre de Moscou, a-t-il asséné.
Le diplomate russe a aussi assuré que l'Ukraine était responsable de l'incendie qui s'est déclaré ensuite sur le site nucléaire de Zaporojie, dans le sud de l'Ukraine.
Vassily Nebenzia s’il a reconnu que des combats impliquant des militaires russes se déroulaient dans la zone concernée, il a précisé que c’étaient des échanges de tirs entre "armes légères" qui n'incluaient pas des bombardements. Il a affirmé que la sécurité du site nucléaire était assurée, demandant aux Occidentaux de "se calmer".
En raison du droit de veto de la Russie au Conseil de sécurité, il n'y a aucune chance pour cette instance d'établir une telle zone d'exclusion aérienne, déjà exclue par l'Otan.
"Huile sur le feu"
"La communauté internationale doit garder la tête froide et rester rationnelle", a renchéri l'ambassadeur chinois à l'ONU, Zhang Jun. Il ne "faut pas jeter de l'huile sur le feu", a-t-il ajouté en appelant au dialogue.
De son côté, Rafael Grossi, directeur général de l'AIEA (Agence internationale de l'énergie atomique), lors d'une liaison vidéo en direct d'un avion en route pour Téhéran, a souligné l'"importance" de la quinzaine de centrales nucléaires implantées en Ukraine.
Il a répété être prêt à se rendre en Ukraine sur des sites nucléaires et précisé en avoir fait la demande à l'Ukraine et à la Russie, qui "l'étudie". Cette mission de l'AIEA serait limitée à la "sûreté" des sites, sans intervention politique, a-t-il fait valoir.
Zaporojie a été touchée dans la nuit de jeudi à vendredi par des frappes d'artillerie russe selon les Ukrainiens. Des bâtiments annexes de la centrale ont été touchés par un incendie.
Vendredi, l'armée russe occupait la centrale. Le régulateur ukrainien a indiqué que le feu, qui avait touché un laboratoire et un bâtiment de formation, avait été éteint et qu'aucune fuite radioactive n'avait été détectée.
Pas de zone d'exclusion aérienne
"Une zone d'exclusion aérienne [demandée par la Russie] signifie que l'Otan est impliquée dans un conflit, car ce seront les forces de l'Otan qui devraient imposer cette zone d'exclusion aérienne", a expliqué le ministre des Affaires étrangères tchèque Jan Lipavsky.
"Une zone d'exclusion aérienne est une mesure offensive, donc un acte de guerre", a précisé un diplomate de l'Alliance.
Des tirs de chars russes contre la centrale de Zaporojie dans la nuit de jeudi à vendredi ont mis le feu à un bâtiment consacré aux formations et à un laboratoire, mais aucune fuite radioactive n'a été constatée, ont indiqué les autorités ukrainiennes.
L'armée russe a pris le contrôle de la centrale, mais "le personnel contrôle les blocs énergétiques et assure leur exploitation en accord avec les exigences des règlements techniques de sécurité d’exploitation", a indiqué le régulateur nucléaire ukrainien.
"Nous allons prendre de nouvelles mesures contre le pouvoir de Poutine", a averti la ministre allemande des Affaires étrangères Annalena Baerbock sans plus de précisions.
Des sanctions et des exemptions : Séoul dispensé des restrictions aux exportations américaines vers la Russie
Pékin - La Corée du Sud a obtenu une exemption des restrictions imposées par les États-Unis aux exportations vers la Russie dans le sillage du conflit en Ukraine, a annoncé vendredi le ministère sud-coréen du Commerce, de l’Industrie et de l’Énergie.
Cette décision est intervenue suite à une rencontre jeudi entre le ministre sud-coréen du Commerce, Yeo Han-koo, avec de hauts responsables américains à Washington.
Durant cette rencontre, les deux parties ont convenu d’inclure la Corée du Sud sur la liste américaine des pays exemptés.
La semaine dernière, le gouvernement américain a annoncé le Foreign Direct Product Rule (FDPR) pour « toute la Russie » dans le cadre de ses efforts visant à bloquer l’accès russe aux produits mondiaux de pointe et d’autres articles clés, tels que les semi-conducteurs, en raison du conflit en Ukraine.
La mesure exige des entreprises de recevoir une licence des États-Unis pour les articles utilisant des technologies américaines avant leur exportation vers la Russie. La mesure risquait d’affecter les principaux exportateurs sud-coréens, qui utilisent des technologies et des logiciels américains.
Yeo a salué la décision de Washington d'exempter Séoul du FDPR, affirmant que les deux pays « ont encore une fois réaffirmé leur forte coopération ».
La générosité publicitaire de Louis Vuitton : million d'euros pour les enfants
La maison du luxe français Louis Vuitton a annoncé avoir donné un million d'euros pour aider les enfants ukrainiens touchés par la guerre que mène la Russie en Ukraine.
Le Brésil en alerte en raison d'une éventuelle pénurie des engrais
Brasilia, – Le Brésil, pays à grande vocation agricole, a lancé une alerte aux autorités compétentes en raison de l'interruption des importations d’engrais de la Biélorussie et a entamé la prospection d’alternatives.
"Des sources gouvernementales brésiliennes de haut niveau ont été informées que la vente d'engrais de la Biélorussie au Brésil avait été interrompue", a rapporté le site d’information G1, qui note que ce pays qui est impliqué dans les opérations militaires russes en Ukraine, fournit 6,1% des engrais utilisés par l'agro-industrie brésilienne. L'interruption est due à la fermeture de la frontière avec la Lituanie, membre de l'Union européenne, via laquelle transitent les engrais de Biélorussie.
La situation est d’autant plus délicate que le principal fournisseur d’engrais à la première économie brésilienne, largement dépendante de son secteur agricole, n’est autre que la Russie, avec 23 %.
Le ministère de l'Agriculture a expliqué que les restrictions à l'importation d'engrais en provenance de la Biélorussie ont commencé fin 2021, soulignant qu’il a œuvré à diversifier ses fournisseurs et devrait lancer le Plan national des engrais dans les prochains jours. La Maison civile (primature) analyse si ce plan, que le gouvernement veut publier en mars, sortira sous forme de décret ou de projet de loi.
En raison de l'interdiction, le gouvernement craint une escalade du prix des engrais sur le marché brésilien, avec un impact conséquent sur les prix des denrées alimentaires qui connaissent déjà une inflation historique.
L'inquiétude des autorités brésiliennes concernent également la production d'engrais dans une usine située à Três Lagoas, dans l’état du Mato Grosso do Sul, vendue il y a moins d'un mois par Petrobras à une société russe.