Le cynisme de l'industrie pharmaceutique

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Guérir des patients est-il un business modèle soutenable ? Telle a été la question posée par l’industrie pharmaceutique à leur Conseil, la banque américaine Goldman Sachs.

Le médicament est une industrie très rentable. C’est même, le premier marché du monde. En 2015, le magazine américain Forbes, publiait un classement des actions les plus rentables pour les actionnaires. L’industrie pharmaceutique y arrivait largement en tête, devant la banque, l’informatique, l’armement, les nouvelles technologies ou la communication.  En France, l’entreprise Sanofi, est de celles qui gâtent le plus leurs actionnaires. Depuis 2009, c’est en moyenne 95% des bénéfices qui sont redistribués aux actionnaires. Partout dans le monde, les retours sur investissements exceptionnels pour les actionnaires, sont la norme pour les grands laboratoires pharmaceutiques.

Comment un tel résultat est-il possible ? Ce n’est certainement pas en faisant des choix qui correspondent à l’intérêt général. Guérir les maladies ou éradiquer les grandes pandémies, ne sont pas leur objectif. Le 10 avril 2018, la banque Goldman Sachs, publiait une note sur le modèle économique des laboratoires, intitulée « Guérir les patients est-il un modèle économique soutenable ? ». L’analyste financier s’inquiète notamment d’innovations scientifiques qui permettraient de soigner plus rapidement et définitivement certaines affections. Le modèle économique de l’industrie de médicaments, ne repose pas sur ces objectifs. Ses investissements sont concentrés sur des médicaments destinés à soulager les symptômes, plutôt qu’à guérir. Ils visent des affections, qui touchent une clientèle riche, plutôt que celles qui tuent le plus. Car celles-ci sont concentrées en milieux pauvres.

Aux États-Unis, les laboratoires ont investi massivement le marché des antidouleurs, jusqu’à provoquer des vagues d’addiction graves. On pourrait aussi citer le cas des antibiotiques. Entre 2000 et 2015, la consommation d’antibiotiques dans le monde a augmenté de 65%. Leur usage désordonné ou inapproprié, a permis d’augmenter la variété des bactéries plus résistantes. D’après l’OMS, cette situation est responsable de 700 000 morts par an.

Le résultat économique de cette machine à cash, est obtenu grâce à l’activité principale des laboratoires : le marketing et le lobbying. Ils y dépensent largement plus d’argent que pour la recherche scientifique. Ces entreprises lèvent des armées de visiteurs médicaux. Leur métier est de convaincre les médecins prescripteurs, de remplir leurs ordonnances avec les produits les plus rentables. Les arguments ne sont pas toujours scientifiques. L’association « regards citoyens » a montré qu’entre 2012 et 2014, les visiteurs médicaux avaient dépensé en France 244 millions d’euros en cadeaux aux médecins. Cela va du stylo au week-end à la mer, tout frais payés sous prétexte de colloque.

Pour neutraliser la régulation de l’État, les laboratoires utilisent les mêmes méthodes de corruption généralisée. Les laboratoires ont toute liberté pour effectuer les essais cliniques. Et leurs scientifiques maison sont très actifs dans les procédures d’autorisations de mises sur le marché. L’ancienne ministre française de la santé, Agnès Buzyn, était auparavant directrice de la Haute Autorité de Santé. Elle déclarait alors ouvertement que les liens entre son agence publique et les laboratoires étaient, pour elle, une chose positive. À tous les étages, la faiblesse de l’État et la connivence de caste dominent.

Certaines associations de consommateurs proposent d’interdire les conflits d’intérêts malsains entre les organismes de l’État et les laboratoires. De bannir les visiteurs médicaux des hôpitaux publics. Elles sont pour la création d’un pôle public du médicament. 

Goldman Sax a recommandé à son client la meilleure méthode de pérenniser sa rentabilité : soigner mais ne pas guérir.

Doit-on laisser la santé des citoyens aux mains d’une industrie, dont le juge de paix est tout naturellement le profit ?