Pourquoi la CIA ne met pas le PJD et Ennahda dans la liste des partis d’obédience terroristes ?

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Depuis l’investiture de Donald Trump en tant que président, les services de renseignement américains analysent la situation des pays arabes et surtout les partis et organisations qui pourraient être considérés comme étant des extensions des « Frères Musulmans »

L’accent a surtout été mis sur l’Algérie, l’Egypte, la Jordanie, le Liban, la Libye, la Mauritanie, le Qatar, le Soudan et la Syrie.  Selon les observateurs, Washington pourrait perdre la plupart de ses alliés dans la région s’il continue cette désignation. Pourquoi ? Parce que les partis politiques islamiques liés à la fraternité existent en Indonésie, au Pakistan, au Maroc, en Tunisie, en Jordanie, au Koweït, au Yémen et même en Turquie. Plusieurs analystes américains pensent qu'antagoniser ces partis pourrait véritablement nuire aux intérêts américains.

De leur cotés, les partis islamistes en Tunisie et au Maroc considèrent que les déclarations de Trump sont intolérables et cherchent à combattre l’islam sous prétexte de lutte contre le terrorisme. Ils estiment aussi que les mesures de Trump leur sont inapplicables puisqu’ils jouent un rôle important dans la lutte contre l’idéologie terroriste. 

En Tunisie, le mouvement Ennahda insiste sur le fait qu’il est la plus grande victime du terrorisme et que « l’islam démocratique est la meilleure solution pour combattre les terroristes ». Quant au Maroc, il est devenu un acteur clé pour les Etats-Unis dans la lutte contre le terrorisme en Afrique du Nord, notamment après les révolutions arabes qui ont balayé la région du Moyen-Orient et Afrique du Nord (MENA). 

Selon Al-Massae, si le renseignement américain a exclu la Tunisie et le Maroc de cette liste, c’est en partie grâce au rôle joué par leurs partis islamistes, à savoir le PJD et Ennahda. De son coté, la CIA affirme que c’est par crainte de pousser les jeunes religieux à la violence et l’extrémisme ciblant l’occident et les Etats-Unis que ces partis ne font pas partie de la liste. 

Ammar Fayed, chercheur égyptien sur les groupes islamistes, a souligné qu'Ennahda et le PJD ne sont pas les seuls partis qui condamnent le terrorisme. Selon lui, classer les Frères Musulmans comme groupe terroriste n’aurait aucun effet sur la plupart des autres partis islamistes. « Au Maroc, en Tunisie et ailleurs, ce sont des partis officiels qui ne portent pas le label Frères musulmans et sont pleinement engagés dans la vie politique générale » a-t-il déclaré citant des pays comme la Libye, la Jordanie, le Koweït et l'Algérie où ce n'est pas le cas. 

Pour Fayed, l’administration Trump fait face à un véritable dilemme dans la mesure où désigner ces partis islamistes comme des organisations terroristes imposerait des restrictions sévères à la politique américaine dans la région MENA. « L'Amérique ne serait pas capable de désigner Ennahda comme une organisation terroriste et de maintenir des relations avec elle », a déclaré le chercheur avant d’ajouter que « couper les liens avec un acteur clé du gouvernement tunisien ne servirait pas les intérêts américains ». 

Fayed poursuit que les différentes composantes de l’administration Trump ne sont pas toutes d’accord et sont toujours soumises à des discussions internes dont le résultat est difficile à prédire, malgré les rapports presque quotidiens des médias sur les discussions qui ont lieu et le fait qu’il y ait un projet de loi au congrès américain sur le même sujet. « Ces décisions visent souvent des dirigeants et des personnalités spécifiques afin de limiter leurs mouvements à l'étranger ou leurs sources de financement », a-t-il conclu.

Somme toute ce qui empêche aujourd'hui le gouvernement américain de taxer les partis islamistes dans certains pays arabes comme organisations terroristes (et ils auraient tord de le faire, même si certaines déclarations de leurs dirigeants sont parfois troublantes), c'est l'intérêt économique et sécuritaire que représentent ces pays pour l'Amérique. Pour que cela puisse être maintenu, il est nécessaire que ces partis fassent très attention à leurs actions, déclarations mais surtout fréquentations. Autrement, les conséquences d'un manquement à ce niveau peuvent être désastreuses. 

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