Sommes-nous à la veille de la troisième guerre mondiale ? Par Mahdi Zrihen

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Nous sommes aujourd’hui à deux doigts de l’éclatement de la troisième guerre mondiale. Il suffirait que les USA se laissent happer par l’engrenage de la guerre pour qu’à son tour la Chine, qui vit à peu près la même situation que la Russie, entre dans la macabre danse.

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Par Mahdi Zrihen

La fracturation du monde selon de nouvelles lignes de brisure était prévisible depuis un certain temps. Elle a cependant pris des proportions insoupçonnées avec l’éclatement du conflit armé entre la Russie et l’Ukraine.

Ecartant l’éventualité d’entrer directement en guerre, les pays de l’OTAN, et quelques autres, non contents d’approvisionner abondamment l’Ukraine en armes et autres ressources, procèdent à l’isolement systématique, voire à l’étouffement de la Russie dans tous les domaines : non seulement le domaine économique, mais aussi le domaine culturel, et même le domaine sportif, violant allègrement, ce faisant, des principes dont ils se faisaient depuis toujours les champions, telles la nécessaire séparation entre sport et politique, l’universalité des arts, la liberté d’expression et on en passe.

Le zèle européen

Dans cette autre forme de guerre, c’est l’Europe qui se montre la plus zélée. Peut-être parce que la moins désireuse, et la moins capable, de s’engager dans un affrontement militaire ! Mais alors pourquoi n’a-t-elle pas choisi, à la suite de l’effondrement de l’URSS, la réunification de l’Allemagne et la dissolution du Pacte de Varsovie, non seulement de favoriser l’adoption par L’Ukraine d’un statut de neutralité, mais de se doter toute entière d’un tel statut ?

Au lieu de cela elle s’est complue dans une sorte de protectorat US. Et aujourd’hui on la voit crier haut et fort son attachement à l’OTAN. L’Allemagne est tacitement autorisée à se remilitariser. Des pays comme la Finlande et la Suède sortent effrontément de leur neutralité plus ou moins formelle …

Il faut bien se rendre à l’évidence : l’Europe, malgré ou peut-être à cause de sa richesse, n’est plus un acteur autonome de l’histoire. Tout se passe comme si son élan vital était épuisé. Les valeurs qu’elle ne cesse de rabâcher ne sont plus, pour elle, que des slogans creux. Le continent des Lumières est en train de s’abimer doucement dans un hédonisme aux forts relents de décadence qui ne se donne plus de limites. 

Une erreur et des vulnérabilités

Est-ce à dire que la partie est gagnée pour la Russie ? Outre le fait que la résolution de l’OTAN, aujourd’hui, est de ne pas s’engager directement dans la bataille, la patrie de Poutine a pour elle le bon droit, à défaut d’avoirl’aval du droit (international) actuel tout court : elle défend sa sécurité et le droit à l’autodétermination de la partie russophone et russophile de l’Ukraine, d’ailleurs sévèrement opprimée depuis 2014. Elle ne pouvait obtenir la dissolution de l’OTAN, elle est allée jusqu’à demander à plusieurs reprises de le rejoindre ! Ensuite il y a eu les Accords de Minsk II, qui n’ont jamais été respectés.

La Russie a évidemment pour elle également sa supériorité militaire, tant que l’OTAN reste éloignée du théâtre des opérations.

Concernant les sanctions économiques, la Russie peut compter sur la Chine et peut-être d’autres pays du Sud pour contribuer à les atténuer autant que possible.

Mais la Russie, ce grand pays qui a donné au monde des Tolstoï et des Dostoïevski, les révolutions de février et d’octobre 1917, et la victoire finale sur le nazisme, ce grand pays a aussi des vulnérabilités. La plus grave de celles-ci est celle-là même qui a permis au premier chef la « défection » de l’Ukraine, à savoir le fait de n’avoir pas su rallier autour d’elle la plupart des populations slaves, et ce à une époque où les nouveaux regroupements régionaux semblent se réaliser autour d’ensembles ethnolinguistiques. La Russie tsariste, puis le régime stalinien, avaient commis tant d’abus dans l’espace slave ! La Russie moderne aurait été bien inspirée de reconnaître ces abus et de solliciter une réconciliation panslave. Elle ne l’a pas fait. Nul étonnement alors si des slaves sont devenus des auxiliaires parmi les plus ardents de l’OTAN.

Quel choix pour les pays du Sud

Nous sommes aujourd’hui à deux doigts de l’éclatement de la troisième guerre mondiale. Il suffirait que les USA se laissent happer par l’engrenage de la guerre pour qu’à son tour la Chine, qui vit à peu près la même situation que la Russie (une organisation politico-militaire hostile, semblable à l’OTAN, essayant de l’encercler, et un territoire national à réintégrer), entre dans la macabre danse. Les dés seraient alors jetés, et nul ne sait si la planète aurait encore un avenir.

Que faire, pour les pays du Sud ? Réfléchir à un nouvel ordre mondial à proposer, bien sûr, au cas où la planète en réchapperait. Mais surtout, dans l’immédiat, NE PAS S’ALIGNER. Chacun est évidemment libre d’avoir les sympathies qui lui agréent, mais il ne s’agit plus de combat idéologique. Il s’agit désormais, pour chaque pays du Sud, d’assurer sa sécurité et sa stabilité politique ; de garantir sa sécurité alimentaire et le mieux-être de ses citoyens ; d’éduquer sa population sans se priver de l’ambition de se doter des meilleures institutions de recherche et d’innovation possibles ; d’accélérer son développement ; et pour tous les pays du Sud de privilégier les échanges entre eux.