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Ukraine : après Antalya, la Turquie espère un sommet Poutine-Zelensky - Chefs de la diplomatie chinoise et française discutent
Le ministre turc des Affaires étrangères Mevlüt Cavusoglu, à l'issue d'une heure quarante de discussions, les a qualifiées de "pas faciles mais civilisées"
Les ministres des Affaires étrangères russe Serguei Lavrov et ukrainien Dmytro Kuleba ont échoué à conclure un cessez-le-feu jeudi en Turquie tout en promettant de poursuivre le dialogue entre les deux pays, un succès diplomatique pour Ankara qui accueillait cette rencontre.
Il s'agissait des premiers pourparlers à ce niveau depuis l'invasion de l'Ukraine par la Russie le 24 février.
"Les deux parties étaient présentes et nous avons joué un rôle de facilitateur à leur demande", a assuré le ministre turc des Affaires étrangères Mevlüt Cavusoglu, à l'issue d'une heure quarante de discussions qu'il a qualifiées de "pas faciles mais civilisées", dans un grand hôtel d'Antalya (sud), une station balnéaire prisée des touristes russes.
M. Cavusoglu, qui avait pris place entre les deux ministres des pays belligérants, au bout d'une grande table en U, a estimé que personne n'attendait de "miracle" avec cette rencontre.
"Mais il fallait un début et si nous continuons sur cette voie, ensemble, on pourra arriver à un résultat", a-t-il poursuivi, espérant même l'organisation d'une rencontre au sommet entre les présidents russe Vladimir Poutine et ukrainien Volodymyr Zelensky.
"M. Kuleba a dit que le président Zelensky y était prêt (et) M. Lavrov que le président Poutine n'était pas contre le principe".
Discussions "difficiles"
Les discussions ont été qualifiées de "difficiles" par M. Kuleba, mais les deux ministres russe et ukrainien ont assuré devant la presse que les deux pays étaient disposés à poursuivre le dialogue malgré les divergences.
"Nous avons évoqué un cessez-le-feu mais aucun progrès n'a été accompli en ce sens", a regretté M. Kuleba.
"L'Ukraine ne se rendra pas", a-t-il prévenu. "Nous sommes ouverts à la diplomatie mais si ça ne marche pas, nous protègerons notre pays et notre peuple".
Pour M. Lavrov, dont c'était la première sortie hors de Russie depuis les sanctions occidentales qui le frappent personnellement ainsi que son pays, "la rencontre d'aujourd'hui a confirmé que le format russo-ukrainien au Bélarus (entre délégations de niveau moindre, NDLR) n'a pas d'alternative".
Plusieurs rounds de négociations se sont tenus au Bélarus, allié de Moscou depuis le début de la guerre qui ont permis plusieurs cessez-le-feu locaux et l'ouverture de corridors humanitaires.
M. Kuleba confiait à la veille de la rencontre, qu’il entendait insister sur "trois points-clés" lors de la réunion trilatérale, selon un communiqué de son ministère: "Un cessez-le-feu immédiat, une amélioration de la situation humanitaire à Marioupol, Kharkiv, Soumy, Volnovakha et d’autres villes ukrainiennes, un retrait des troupes russes du territoire de l’Ukraine".
Plus de 2 millions de réfugiés -
La tenue de cette réunion illustre les efforts du président turc Recep Tayyip Erdogan, dont le pays est membre de l'Otan et qui a depuis le début de la crise offert sa médiation.
"Nous travaillons pour empêcher que cette crise ne se transforme en tragédie", a-t-il déclaré mercredi. "J'espère que la rencontre entre les ministres ouvrira la voie à un cessez-le-feu permanent".
Le directeur général de l'Agence internationale de l'énergie atomique (AIEA), Rafael Grossi, avait également fait le déplacement à Antalya. A l'issue de rencontres avec les ministres russes et ukrainien, il a fait état de "progrès sur la sécurité" des installations nucléaires en Ukraine, objet de vives préoccupations sur fond d'incidents à répétition.
Par ailleurs, preuve du retour de la Turquie au centre du jeu international après quelques années de mise à l'écart, le patron de l'Otan, Jens Stoltenberg, s'est également annoncé à Antalya où il participera vendredi au Forum diplomatique organisé par le président Erdogan.
Bien qu'allié de l'Ukraine à laquelle elle fournit des drones de combats, Ankara a veillé à maintenir ses relations avec la Russie dont dépendent étroitement son secteur touristique et ses approvisionnements en blé et énergie.
Entretien des chefs de la diplomatie française et chinoise
Le ministre des Affaires étrangères français Jean-Yves Le Drian s'est entretenu jeudi avec son homologue chinois Wang Yi de la situation en Ukraine, l'appelant à "utiliser toute l'influence de la Chine pour pousser la Russie à mettre fin à la guerre".
Le chef de la diplomatie française "a souligné les conséquences humanitaires catastrophiques de la guerre (...) et l'importance d'établir sans délai un cessez-le-feu afin de permettre l'acheminement d'une assistance humanitaire sûre et sans entrave au peuple ukrainien", selon un communiqué du ministère.
"Il a marqué le caractère profondément déstabilisateur pour l'ordre international de l'offensive russe en Ukraine" et a pris note des inquiétudes exprimées par son homologue "sur le risque d'impact économique majeur de ce conflit à l'échelle mondiale, en particulier sur les marchés de l'énergie".
La Chine n'a pas condamné l'invasion russe. Proche de la Russie, Pékin se refuse depuis l'intervention du 24 février à employer le mot "invasion" et rejette la faute du conflit sur les Occidentaux et "l'expansion" de l'Otan.
"Les deux ministres sont convenus de poursuivre leurs échanges, notamment au Conseil de sécurité des Nations unies, pour contribuer à une solution diplomatique rapide afin de mettre fin à la guerre", a précisé le communiqué.
Pékin a annoncé mercredi avoir envoyé une aide humanitaire d'une valeur de 720.000 euros en Ukraine.