Yahya Sinouar, l'un des cerveaux de l'attaque du 7 Octobre, mort au combat

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Yahya Sinwar, chef du Hamas dans la bande de Gaza, assiste à l'ouverture d'une nouvelle mosquée dans la ville de Rafah, dans le sud de la bande de Gaza, le 24 février 2017. (Photo par SAID KHATIB / AFP)

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Yahya Sinouar, longtemps homme de l'ombre avant de prendre la tête du Hamas cet été, est considéré comme l'un des architectes de l'attaque sans précédent de la résistance palestinienne sur Israël le 7 octobre 2023.

L'armée israélienne a annoncé jeudi l'avoir tué lors d'une opération dans la bande de Gaza.

Ce militant radical, qui avait succédé à Ismaïl Haniyeh tué à Téhéran, était un "mort en sursis" pour les autorités israéliennes qui l'ont traqué pendant des mois dans le territoire palestinien que l’armée israélienne a ravagé et massacré da population sans distinction.

Il a fait toute sa carrière dans l'ombre: celle des prisons israéliennes où il a passé 23 ans, puis de l'appareil sécuritaire du mouvement islamiste palestinien où il se chargeait de pourchasser les "collaborateurs" d'Israël.

Chef depuis 2017 du mouvement islamiste palestinien à Gaza, il est, à 61 ans, l'un des cerveaux du 7 octobre: ce jour-là, des centaines de commandos fondent sur des kibboutz, des bases militaires en Israël, sans précédent dans l’histoire de la résistance palestinienne qui a vécu sa pire attaque depuis sa création en 1948.

"C'est sa stratégie, c'est lui qui a monté l'opération" probablement pendant un an ou deux, explique à l'AFP Leïla Seurat, chercheuse au Centre arabe de recherches et d'études politiques (CAREP) à Paris.

L'homme ascétique, à la chevelure blanche mais aux sourcils fournis noirs, "a imposé son tempo pour changer le rapport de force sur le terrain et a pris tout le monde par surprise", selon elle.

Celui qui est désormais "le visage du diable" ou le "mort en sursis", selon les termes de l'armée israélienne, n'était pas apparu en public depuis octobre 2023.

"C'est l'homme de sécurité par excellence", affirmait à l'AFP en 2017 Abou Abdallah, un ex-codétenu du Hamas, qui juge que Sinouar "prend des décisions dans le plus grand calme".

Intransigeant 

En 1987, la première Intifada (le soulèvement contre l'occupation israélienne) éclate dans un camp de réfugiés du nord de la bande de Gaza. Lui qui est né à Khan Younès, un camp du sud du territoire, rejoint le Hamas tout juste fondé.

A 25 ans, il dirige déjà l'Organisation du jihad et de la prédication, l'unité de renseignement du Hamas qui punit les "collaborateurs", ces Palestiniens châtiés pour intelligence avec l'ennemi israélien.

En 1988, il fonde Majd, le service de sécurité intérieure du Hamas.

Incarcéré en 1989, il s'impose en leader des prisonniers. Condamné plusieurs fois à la perpétuité, il sort en 2011 avec un millier de détenus libérés par Israël, en échange du soldat Gilad Shalit, détenu du Hamas pendant cinq ans.

Yahya Sinouar voit Israël éliminer ses mentors, notamment le cheikh Ahmed Yassine, fondateur du Hamas, et Salah Chehadé, fondateur des brigades Ezzedine al-Qassam, branche armée du mouvement, dont il passe pour le bras droit.

Placé sur la liste américaine des "terroristes internationaux", il fait l'objet de multiples tentatives d'assassinat.

A partir de 2017, il impulse une stratégie "radicale sur le plan militaire et pragmatique en politique", décrypte Mme Seurat. "Il ne prône pas la force pour la force" mais "pour amener (les Israéliens) aux négociations".

"C'est quelqu'un dont le Hamas sait qu'il est totalement intransigeant", ajoute Tahani Mustafa de l'International Crisis Group (ICG).

A la recherche des négociations

Sur le plan politique, il prône une direction palestinienne unie pour tous les Territoires occupés : la bande de Gaza, tenue par le Hamas, la Cisjordanie, administrée par l'Autorité palestinienne de Mahmoud Abbas, et Jérusalem-Est.

"Il a fait savoir qu'il punirait quiconque tenterait d'entraver la réconciliation avec le Fatah" (le parti présidentiel, NDLR), rappelle le European Council on Foreign Relations (ECFR).

"A plusieurs reprises, il a proposé une trêve de longue durée avec Israël si le pays se retirait de la Cisjordanie, de la bande de Gaza et de Jérusalem-Est", rappelle Khaled al-Hroub, spécialiste du Moyen-Orient à l'université Northwestern au Qatar.

Il juge que M. Sinouar est "dans le concret".

Coûte que coûte, il entendait forcer Israël et le monde à s'intéresser au sort des Palestiniens. La stratégie de la respectabilité des "politiques" du Hamas échoue: il choisira la violence. La guerre d’extermination des Palestiniens, prête dans les tiroirs israéliens, mise en œuvre à bas bruit, n’attendant qu’un prétexte, pouvait commencer. Elle a fait jusque-là 42.438 morts, pour la plupart des civils, dont plus de 32.000 femmes et enfants (Quid avec AFP). 

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