El Conquistador et la Guerre Commerciale 3/3 - Par Samir Belahsen

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Quelles seraient les implications de cette guerre commerciale sur ses pays en développement dans un monde plus fragmenté et plus conflictuel marqué par un nouveau protectionnisme ?

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Dans un monde fracturé par le retour du protectionnisme, les pays en développement se retrouvent à la croisée des chemins. Victimes collatérales de la guerre commerciale entre la Chine et les États-Unis, ils pourraient pourtant en devenir les acteurs stratégiques. Dans cette troisième chronique, Samir Belahsen, estime qu’à condition de renforcer leur résilience, de diversifier leurs partenaires et de bâtir de nouvelles alliances Sud-Sud, l’après-guerre commerciale pourrait bien être pour les pays en développement leur heure de vérité.

Troisième partie : le monde en développement et la guerre commerciale.

« L’humanité devra mettre un terme à la guerre, ou la guerre mettra un terme à l’humanité. » 

John Fitzgerald Kennedy

« La guerre apprend à tout perdre, et à devenir ce qu’on n’était pas. » 

Albert Camus

On avait, dans les deux premières parties, traité de la guerre commerciale, lancée par El conquistador, comme un tournant dans les relations économiques internationales, avec des conséquences profondes pour l'ordre mondial. 

Dans la deuxième partie, on avait questionné l’avenir de l’occident. On avait conclu que « L'Occident, plus divisé que jamais, est amené à se repenser, à repenser ses stratégies, tant dans son approche des échanges internationaux que dans sa capacité à affronter le retour en force des nationalismes. Seul un équilibre entre protection et ouverture lui permettrait la reconquête de la confiance des citoyens. »

Dans cette partie notre question concerne le monde en développement.

Quelles seraient les implications de cette guerre sur ses pays dans un monde plus fragmenté et plus conflictuel marqué par un nouveau protectionnisme ?

La fin d’un monde

Les mesures unilatérales des États-Unis ont annoncé la fin du multilatéralisme hérité de l'après-guerre, de ses institutions OMC, accords de libre-échange et peut être de ses théories même. 

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La rivalité technologique sino-américaine autour des semi-conducteurs, de la 5G et de l'IA risque de diviser le monde en deux écosystèmes économiques distincts et concurrents. 

Les autres pays seront forcés de choisir entre les deux nouveaux blocs, la chine d’un côté et les États-Unis de l’autre. Le tiers monde serait face à une nouvelle forme de re-bipolarisation.

Opportunités et risques

Pour le monde en développement cela impliquera d’énormes opportunités et de gros risques. 

En Afrique comme en Amérique latine et en Asie du Sud-Est, les pays dépendants économiquement des exportations vers les États-Unis ou la Chine pourraient subir des perturbations majeures. 

Plus elle durera, la guerre commerciale, réduira la croissance globale, ce qui impactera les pays en développement par la baisse des investissements et des prix des matières premières. 

Le ralentissement économique mondial nuira d’abord à ces pays qui seraient encore plus fragilisés par l’inflation et la fuite des capitaux, surtout pour ceux qui affichent des niveaux d’endettement importants.

Certains pays pourraient y trouver des opportunités et profiter des tensions pour négocier des accords avantageux avec la Chine ou les États-Unis.

Des relocalisations industrielles seraient possibles. Des entreprises qui seraient amenés à quitter la Chine pourraient s'installer dans des pays à bas coûts comme le Vietnam, l’Éthiopie et le Maroc. 

Le nouvel ordre « désordre » mondial pourrait renforcer des alliances Sud-Sud comme les BRICS+ ou la Zone de libre-échange continentale africaine ZLECAF pourraient être de cette dynamique, on pourrait aussi voir naitre de nouveaux cadres Sud-Sud. 

L’escalade qui mènerait à la récession mondiale, avec un tiers monde fragilisé par le chômage et l'endettement est donc le pire scénario. 

Le meilleur serait un rééquilibrage tendant vers un système multipolaire où les pays en développement joueraient un rôle accru dans les chaînes de valeur. 

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Dans l’ère de compétition stratégique accrue, le tiers monde serait à la fois victime des tensions et acteur clé dans la reconfiguration des alliances économiques. 

La capacité des pays en développement à définir et négocier leur position déterminera leur capacité de résilience face aux chocs à venir du nouveau monde, celui de l’après-guerre commerciale. 

La capacité des pays en développement à négocier, individuellement ou en groupe, leur position déterminera leur résilience face aux chocs à venir

Les pays en développement pourraient renforcer leurs capacités de négociation pour influencer les accords commerciaux internationaux du nouveau monde en maintenant une position neutre face aux pressions géopolitiques qui ne manqueraient pas.

La diversification est le début de la résilience, elle serait nécessaire pour réduire la vulnérabilité aux chocs extérieurs. Elle permettrait de transformer structurellement leurs économies et d'augmenter la productivité. 

Les mécanismes régionaux pourraient offrir une protection supplémentaire en réduisant la dépendance au commerce international et en augmentant la résilience.

Le monde en sortirait meilleur…

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