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Charafat Afailal, ministre d?l?gu?e charg?e de l?Eau, r?pond ? nos questions sur le pouvoir, la politique et le combat des femmes pour les postes de d?cision.
Alors que de plus en plus de femmes acc?dent ? des postes de d?cision, la progression de la parit? et de la mixit? en politique, ou encore le pouvoir au f?minin interpelle encore aujourd'hui, nous ramenant, ainsi, ? des questions importantes: Comment les femmes politiques ressentent-elles le pouvoir qui leur est d?l?gu?e?? Leur approche est-elle diff?rente de celle de leurs homologues masculins?
Charafat Afailal, ministre d?l?gu?e aupr?s du Ministre de l?Energie, des Mines, de l?Eau et de l?Environnement, charg?e de l?Eau, depuis le 10 octobre 2013, se confie au Quid pour nous aider ? mieux appr?hender ce qu?est l'exercice du pouvoir au f?minin.
Vous ?tes l?une des six femmes au gouvernement, sur une trentaine d?hommes. C?est dire que la parit? n?est pas la mieux partag?e en politique et la course des femmes pour les postes de d?cision n?en est que plus rude. Parlez-nous de votre combat et de ce qui vous a d?cid? ? vous engager en politique??
C.A?: Je me suis engag?e en politique, pas uniquement pour d?fendre la cause f?minine, mais parce que je crois aux valeurs de l??quit?, de l??galit? et de la justice sociale. A savoir que j?ai affili? le parti du progr?s et du socialisme dans les ann?es 80, l? o? le combat social ?tait en effervescence. J?ai int?gr? le PPS pour d?fendre l?une des causes qui me tient ? c?ur, celle des valeurs humanistes. Je me suis impr?gn?e des politiques socialistes et d?idoles internationales pour d?fendre les couches sociales d?favoris?es, ouvriers, ?tudiants, agriculteurs, mais ?galement la cause f?minine, qui a ?merg? au milieu de la discrimination accrue dont la femme ?tait victime. Nous nous sommes engag?s pour d?fendre un Maroc ?mergent sur le plan d?mocratique, fort ainsi de ses femmes et de ses hommes, en luttant contre toutes les formes de discriminations et en mettant la femme sur le m?me pied d??galit? que l?homme, afin qu?elle puisse jouir de tous ses droits, politiques, sociaux ou encore ?conomiques. Rappelons-nous la Moudouwana qui traitait la femme comme un citoyen de second degr?. Petit ? petit, la soci?t? civile a commenc? ? s?approprier la cause f?minine, une cause que je d?fends fermement.
Y-a-t-il des femmes politiques qui vous ont impressionn?es ou inspir?es??
C.A?: Bien s?r. Le PPS a toujours ?t? une ?cole de formation de cadres f?minins. Des femmes de taille qui se sont appropri?es la cause f?minine et ce depuis les ann?es 80. Ce sont des femmes form?es au sein de la gauche marocaine de fa?on g?n?rale et au sein du PPS de fa?on plus particuli?re. Je me rappelle d?Amina Lamrini, Nezha Skalli, Rachida Tahiri, Latifa Jebabdi, Aicha Lakhmass ou encore Rabi?a Naciri. Elles nous ont beaucoup appris et elles sont devenues des t?nors de la cause f?minine. Il y a beaucoup de femmes qui constituent pour nous des mod?les de lutte et de militantisme.
Avez-vous d?j? fait l?objet, au cours de votre carri?re politique, d?une quelconque discrimination en raison de votre statut de femme??
C.A?: Je ressens toujours cette discrimination, vu la composition de la soci?t? marocaine, qui est avant tout patriarcale. Il y a une culture, un h?ritage s?culaire et il n?est pas ais? de bousculer toutes ces mentalit?s et ce n?est pas du jour au lendemain que l?on pourra ?radiquer cette iniquit?. Cela peut ?tre fait dans le long terme et petit ? petit. D?ailleurs, pour ne rien vous cacher, quand j?ai pris la responsabilit? du secteur de l?Eau, il y eut un monsieur, un militant, entre guillemets, qui s?est insurg? en s?exclamant si une femme est capable de g?rer les barrages, si une femme peut g?rer les chantiers de b?ton, de ciment, si la femme est apte ? g?rer les inondations. Ce sont malheureusement des cultures qui se sont accumul?s depuis bien trop longtemps.
Qu?est-ce qu?une femme peut apporter de particulier ? la politique que l?homme ne saurait apporter??
C.A?: Il n?est pas question de ce qu?elle peut apporter de plus. Si la politique n?est pas ?galement exerc?e par les femmes, c?est une politique incompl?te. La soci?t? est constitu?e d?hommes et de femmes, elle doit donc ?tre g?r?e par les deux, que ce soit sur le plan politique, ?conomique, social, environnemental ou culturel. La femme peut apporter autant que l?homme, elle en a les tripes.
En tant que femme influente et femme au pouvoir, que conseillez-vous ? la jeune femme marocaine??
C.A?: Je lui conseille de croire en la politique, car c?est ? travers la politique que l?on peut cr?er le changement et influencer les d?cisions. Elle ne doit pas rester spectatrice. Elle doit s?engager en choisissant le parti politique qui lui convient et qui r?pond ? ses attentes, ses objectifs et ses valeurs. C?est ainsi qu?elle peut influencer et op?rer le changement. Il ne faut donc pas bouder la politique. Il y a, certes, des gens malhonn?tes, mais il y en a aussi qui sont bons. La politique peut nous d?cevoir comme elle peut nous apporter du bien mais il ne faut pas laisser tomber, il faut croire en la politique et c?est l? mon message pour la jeune femme marocaine. Ce n?est qu?ainsi que nous pouvons contribuer ? l??dification d?un Maroc moderne et d?mocratique.
Il y a un constat g?n?ral, selon lequel les femmes qui arrivent au sommet de la pyramide ont plus tendance ? s?entourer professionnellement d?hommes que de femmes. Qu?en dites-vous??
C.A?: Je ne crois pas. En tout cas, dans mon cabinet il y a autant d?hommes que de femmes. D?ailleurs, quand j?ai pris mes fonctions au minist?re, j?ai trouv? ?norm?ment de comp?tences f?minines, marginalis?es sous le pr?texte que la femme ne peut g?rer un tel d?partement et de telles missions. J?ai donc tout fait pour leur redonner espoir en op?rant, notamment, des changements. D?ailleurs la premi?re femme, ? diriger l?agence du bassin hydraulique de Sebou, a ?t? nomm? durant mon mandat.
Comment arrivez-vous ? concilier politique et vie de famille??
C.A?: Pour ne rien vous cacher, c?est loin d??tre ?vident. La famille en prend un coup quand la maman est absente et je peine ? vrai dire ? concilier les deux. Il faut beaucoup de soutien familial et beaucoup de concessions.
En dehors de votre carri?re politique, qu?aimez-vous faire??
C.A?: J?aime faire du sport, mais je n?en fais pas, malheureusement. J?aime faire du social et de l?associatif et je continue ? le faire mais timidement. J?adore me retrouver avec une bande de copines et ?clater de rire mais cela non plus je ne peux h?las pas le faire.
Que tirez vous de votre exp?rience de femme en politique, un milieu encore accapar? par les hommes??
C.A?: Qu?il faut se battre. Rien n?est gratuit. Il faut montrer nos comp?tences et faire preuve de caract?re. A savoir que les femmes qui ont occup? jusque l? des postes de d?cision ont d?montr? qu?elles ?taient ? la hauteur de la responsabilit? qui leur a ?t? confi?e. Il y a, certes, un effort particulier qui doit ?tre fourni par la femme, je ne le nie pas, mais il y a une prise de conscience qui commence ? s?installer au sein des partis politiques?: les femmes politiques peuvent donner autant que les hommes sinon mieux.
Une femme ? la t?te du gouvernement. Qu?en pensez-vous??
C.A?: Pourquoi pas?! S?il y a une grande formation politique qui sacre ? sa t?te une femme, ce sera donc toujours jouable.