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Algérie : Le quatrième coup d’Etat
Dès lors que l’armée ne peut pas réprimer tous azimuts et à ciel ouvert, le pouvoir algérien perd de sa superbe, patauge et ne maîtrise plus rien. La sortie, avec un retard de cinq, durée qui s’est écoulée depuis le premier AVC du président, du chef de l’état-major pour l’application de l’article 102 de la constitution en vue de destituer Abdelaziz Bouteflika, est édifiante.
Par la voix du général Gaïd Salah, l’armée est enfin sortie du bois. L’arbre de la légalité n’arrivant plus à cacher la forêt de galonnés dans son ombre, les voilà qui mènent à visage découvert une tentative de coup d’Etat, le quatrième depuis l’indépendance de l’Algérie (1962, 1965, 1992 et aujourd’hui).
De l’incontournable Bouteflika et indépassable candidat pour un cinquième mandat à la déclaration de Gaïd Salah appelant à déclarer le « président de la République, pour cause de maladie grave et durable, dans l’impossibilité totale d’exercer ses fonctions », on est passé en deux mois du jour à la nuit.
Est-ce pour autant la fin d’une récréation dont le supposé arbitre ne peut plus siffler la fin sous peine de ? Rien n’est moins sûr. Les Algériens sont si échaudés et la situation est telle que chaque fois que les détenteurs du pouvoir bougent un pion, chacun n’y voit qu’une vulgaire manœuvre pour pérenniser leur mainmise sur le pays.
La sortie de crise que les militaires et leurs prolongements civils sont en train d’improviser se fera indéniablement, même si l’on continue à y recourir, en dehors de la constitution. Déjà l’on cherche le moyen de disqualifier le président de la chambre haute, appelé à assurer l’intérim, pour entrer de plain pied dans une phase de transition dirigé par un homme issu des rangs de l’armée. Leur choix semble se poser sur un général en retraite, à la tête de sicilien, qui a déjà présidé aux destinées de l’Algérie pendant la décennie noire (1994-1999), Liamine Zeroual ; le seul président algérien à avoir quitté le pouvoir de son plein gré.
48 heures avant la déclaration du général Gaïd à la destitution du président, Saïd Saadi décryptait pour les observateurs, dans un texte publié sur son mur, ce que mijotait « la principale force extra constitutionnelle […] la police politique […] bras politique séculier de l’armée ».
Ancien chef de file du Rassemblement pour la Culture et la Démocratie (RCD), d’obédience amazigh, Saïd Saadi est un acteur-scrutateur de la vie politique algérienne de premier plan et de premier choix.
A partir d’indices subtiles, il constate que « la primauté du civil sur le militaire, nœud gordien de l’impasse algérienne, [adoptée par le congrès de la Soummame en 1956 et jetée dans les oubliettes par le coup d’Etat de 1962 NDLR], n’est pas à l’ordre du jour pour la police politique qui ne renonce pas à infléchir ou même à briser la trajectoire de rupture et de renouveau du mouvement.».
Il relève qu’on assiste à « plusieurs manœuvres où les anciens réseaux du DRS, fidèles au général Mediène, […] se reconnectent aux structures actives du renseignement pour préparer une OPA sur le mouvement à travers le parachutage de Liamine Zeroual dont un poster géant a été accroché ce vendredi sur un bâtiment de la place Audin. Fausse piste ou ballon d’essai, il est trop tôt pour dire si l’ancien chef d’Etat se laissera reprendre au jeu des appels obliques des services ».
Sa conclusion est sans appel : Le système algérien peine à saisir une chose : il y a des complots dans l’Histoire, mais l’Histoire n’est pas réductible à un complot. Le recours maladif à la manipulation pour gérer la cité algérienne est une tare dangereuse.