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Conseil National de la Presse : Le report reste salutaire
Le ministère de la culture et de la communication, autorité de tutelle chargée de veiller à la concrétisation du conseil, devrait saisir le verdict du tribunal administratif, qui s’est déclaré incompétent pour suspendre les élections. Analyse
Le boycott de l’élection du Conseil national de la presse décidé par deux listes électorales, sur trois listes au total qui sont en lice pour ce scrutin, constitue un argument suffisant, logique et convaincant pour le report de ces élections, afin de pouvoir disposer du temps nécessaire pour le règlement du contentieux électoral, qui est fondé sur des arguments qui me paraissent pertinents et logiques.
Le ministère de la culture et de la communication, autorité de tutelle chargée de veiller à la concrétisation du conseil, devrait saisir le verdict du tribunal administratif, qui s’est déclaré incompétent pour suspendre les élections, tant elles se tiennent au niveau national, pour annoncer le report de cette première consultation électorale, afin de garantir des élections pluralistes et la participation d’un maximum de journalistes.
A défaut de quoi, le premier Conseil national de la presse se priverait de l’argument de la représentativité d’une large frange des journalistes, et donc de la crédibilité que tout le monde cherchait à conférer à ce Conseil. Il faut absolument garantir et assurer un bon départ au Conseil. Un bon départ sur des bases légales. Il va falloir respecter une règle d’or, bien qu’elle ne soit expressément stipulée dans aucune disposition de la loi portant création du conseil. « Nul ne peut être juge et partie », en ce sens que le Syndicat national de la presse, dont beaucoup de journalistes ne reconnaissent pas la qualité de «syndicat le plus représentatif », n’a pas le droit de siéger au sein de la commission électorale et en même temps, présenter une liste de candidats à cette consultation. Cet argument est de taille et même les débutants parmi les étudiants de sciences politiques ne sauraient remettre en cause.
Deuxième argument de poids : les électeurs. La consultation devait se tenir le 22 juin 2018 et donc les journalistes titulaires des cartes professionnelles de presse 2018, devraient y participer. Or, pour des raisons étranges et surprenantes, la commission chargée des élections a retenu les cartes de 2017. Même en retenant la carte professionnelle 2018, le ministère de la communication aurait dû et se devait d’inviter les journalistes marocains, où qu’ils se trouvent (au Maroc et à l’étranger notamment ceux de la MAP), à se faire inscrire et à retirer leurs cartes professionnelles 2018. Comme le ministère de l’Intérieur, il devait fixer deux périodes au moins pour le renouvellement des cartes professionnelles, avant les élections. De ce fait, plusieurs dizaines de journalistes de la MAP s’en trouvent ainsi délibérément privés. D’aucuns jugeraient le comportement du ministère de la communication d’arbitraire.
Les corps des journalistes et des éditeurs devaient théoriquement donner un exemple ostentatoire d’élections sincères et honnêtes, dans ce secteur vital, qui se targue de vouloir moraliser la vie politique dans le pays. La Commission électorale n’a pas seulement réservé la participation aux élections aux journalistes titulaires de cartes professionnelles 2017, mais a refusé la candidature à ceux qui détiennent les cartes 2018. Une aberration, diriez-vous.
Plus grave, le ministère de la communication, en réaction au boycott, s’est entêté à vouloir poursuivre le processus électoral et le conduire à son terme, sachant qu’il reste une seule liste dans la course, celle du syndicat. Cela est anti-démocratique, Monsieur le Ministre. Et-ce qu’il faut aller aux élections coûte que coûte ? Avez-vous des engagements internationaux qui vous imposent des élections le 22 juin 2018?
Un éventuel report, souhaitable par ailleurs, devrait fournir l’occasion au ministère de tutelle pour réorganiser ces élections sur de nouvelles bases, mettre en place une nouvelle commission électorale quitte à amender la loi portant création du Conseil national de la presse, car sa composition, hétéroclite, n’est pas basée sur des considérations éthiques et déontologiques, ni légales. Les journalistes et les éditeurs sont en mesure de s’organiser sans interférence des représentants de la justice, du conseil des droits de l’homme, de l’association des écrivains, du conseil des langues etc…cette loi doit être amendée tôt ou tard.