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De Marrakech à Talat N’Yaaqoub, sur la route de la Résilience
Les épreuves et les défis ont cette caractéristique de rapprocher les gens et de révéler le caractère et les ressorts dont peut se prévaloir une nation
Quid avec MAP
LE CORRIDOR DE SOLIDARITE ET D’ESPOIR
Talat N’Yaaqoub (Province d’Al Haouz) - Venus des différentes régions du Royaume, femmes et hommes, jeunes et moins jeunes se sont donné rendez-vous au quartier Cherifia, à l’extrémité sud de Marrakech, comme point de départ pour prêter assistance à leurs concitoyens des zones sinistrées.
À bord de véhicules arborant des drapeaux nationaux et des portraits du Roi Mohammed VI, les bénévoles sont en effervescence, impatients de rejoindre des populations en détresse dans les communes relevant de la province d’Al Haouz. Un élan de solidarité spontanée qui a commencé dès la découverte de l’ampleur du drame qui se jouait dans ces provinces.
Les épreuves et les défis ont cette caractéristique de rapprocher les gens et de révéler le caractère et les ressorts dont peut se prévaloir une nation marocaine. Dans ce décor de désolation et de tristesse, une fois encore, une fois de plus, les Marocains ont répondu présent à l’appel de leur conscience et de leur générosité. Ils signent et confirment ce qui depuis des siècles fait d’eux un Royaume inflexible dans l’adversité, fut-elle celle de la nature.
"Nous nous sommes mobilisés pour accomplir notre devoir national et humain et porter assistance à des sœurs, à des frères dans les douars touchés au niveau de la région du Haut Atlas", souligne Fadoua Taouil, entourée de plusieurs membres de son association issue de la ville d’El Attaouia. Dès l’annonce des premiers dégâts, ils ont rejoint cette dynamique, formidable sans être exceptionnelle, d’entraide, où de nombreux acteurs associatifs se sont organisés dans des caravanes de solidarité pour prêter main forte aux efforts d’aide aux habitants des régions où le tremblement de terre a frappé.
À 10 KM DE L’ÉPICENTRE
Après avoir chargé leurs lots d’aide (vêtements, draps, médicaments, nourritures, couvertures…), ces incarnations de ce que l’humain peut avoir de noble, prennent la route vers la ville de Tahanaout, leur première étape avant d’emprunter les voies montagneuses du Haut Atlas, devenues plus périlleuses que jamais, vers la commune de Talat N’Yacoub, à seulement 10 km d’Ighil, épicentre du puissant séisme. Un périple de deux heures en temps normal s’allonge, dans ces conditions exceptionnelles, à plus de six heures de route.
La canicule, les embouteillages et la longue durée du voyage n’altèrent guère l’esprit de ces femmes et hommes qui ont quitté leurs familles et leurs ports d’attache pour venir en aide et apporter réconfort à leurs concitoyens frappé par le destin cruel.
La route se rétrécit dans certains points pour devenir accessible dans un sens unique, entravant la fluidité du trafic. Un défi relevé par des jeunes volontaires de la région qui se sont engagés sans compter pour améliorer autant que possible les mouvements des convois. Des jeunes et d’un peu moins jeunes vêtus de distinctifs gilets jaunes bravent le danger, la chaleur et la poussière pour apporter leur pierre au déploiement logistique formidable et tous azimuts mis en place par les autorités.
"Notre action consiste à libérer la voie, mais pas seulement, aux véhicules de secours en particulier en cas de bouchons", explique Hassan Ait Saadane, originaire de Zagora, qui s’est retrouvé dans la zone affectée par le séisme pour des raisons professionnelles, précisant qu’il œuvre aussi avec les jeunes des douars limitrophes à distribuer les aides aux familles nécessiteuses.
LES ANGES DU RÉCONFORT
Grâce à Hassan et à ses amis, le convoi peut avancer résolument vers les villages ciblés. "D’un douar à l’autre, le convoi livre des aides et beaucoup de réconfort. Histoire de signifier aux sinistrés, par un acte de générosité et de bravoure, qu’ils ne sont ni seuls ni abandonnés.
Brahim Daghmaz, un jeune de Tiznit, en compagnie d’autres amis des villes de Tanger, de Casablanca et d’Errachidia, sont des prototypes de ces anges du réconfort. Séparément et spontanément, ils ont collecté des dons pour converger simultanément vers des douars touchés par le séisme. Nait une amitié forgée dans la douleur qui cimentera un lien et des souvenirs pour toujours.
"Immédiatement après le séisme, j’ai contacté des amis pour accomplir ce petit geste de solidarité et organiser cette caravane humanitaire en guise d’engagement envers les populations affectées", indique le jeune homme, visiblement fier d’être utile. Lui et ses amis savent aussi qu’ils ne sont pas seuls dans ce combat contre la détresse et le malheur. D’autres, beaucoup d’autres, qui leur ressemblent, qui ont le même âge et le même sentiment d’appartenance sont en train d’agir en ce même instant à des droits qui rappellent par leur deuil, leurs blessures et leur infortune née d’une certaine fatalité, mais pas toujours que de celle-ci. Plus tard, comme beaucoup d'autres, comme aujourd’hui ceux du séisme d'Agadir en 1960, raconteront à leurs enfants et à leurs amis comment une région dévastée renait de ses cendres.