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Dépasser la crise : C'est faire la politique par d'autres moyens pour préserver l'essentiel
Ces propos sont loin de vouloir abîmer rouages et instances. Ils tentent d'indiquer d'autres formes d'engagements susceptibles à l'occasion réduire les champs d'affrontements et de ruptures de la société sans préjuger de celles qui ne sont pas parvenus à exister et qui devaient avoir des rôles à jouer dans la crise en cours
Aujourd'hui, la distance avec l'actualité impose un regard dégagé de charges émotionnelles et de discours révélateurs de déficits éthique et politique.
Ce n'est pas rien de dire qu'en très peu de temps, la nature et la portée du projet constitutionnel se sont considérablement rétrécis, passant de l'épreuve du printemps arabe d'une dimension exclusive de l'exception marocaine à la confusion de droits, de genres et d'actions qui entravent et brouillent l'édification d'une culture politique d'envergure.
Partout se fissure où se grippe structures, édifices et institutions pour ne laisser entrevoir qu'un spectacle de désolation et d'infécondité. Les partis politiques, les syndicats et bien d'autres organismes se barricadent dans leurs citadelles. Ils ne sont plus audibles lorsqu'ils ne font plus qu'amuser la galerie avec des purges successives ou des congrès-moussems sans valeur ajoutée.
Un spectacle d'amateurs qui peine à dire son nom et qui ronge la légitimitéde ceux parmi eux qui sont chargés d'histoire et rompe toute crédibilité chez les autres.
En même temps, la jeunesse arpente les sinuosités d'une société où le chômage et la récession l'empêche de trouver les réponses les plus anodines à son devenir et ce malgré de visibles et réels progrès dans bon nombre de domaines de performances et de qualités. Comment donc s'étonner des dérapages de cette jeunesse, de son égarement et de ses convulsions!
Le décalage entre les moyens et les missions relève, depuis bien longtemps, de réels disfonctionnements au niveau de l'encadrement de la vie publique mais également dans bien d'autres secteurs et s'impose aujourd'hui comme une brutale fatalité.
Gouverner c’est aussi user des dispositifs de la constitution
Les gouvernements successifs, fondés autour du PJD par des partis aux contours disparates et aux idéologies contradictoires, ne se sont pas hissés ni pou réaliser un programme de gouvernement à connotation islamiste ni pour répondre aux aspirations et aux exigences d'autres programmes et sphères d'influence.
Dans ce contexte, l'image du gouvernement a pâti de crises à répétition qu'il a lui-même provoquées ou auxquelles il s'est associé à l'intérieur comme à l'extérieur de sa majorité.
Quelque injustes que soient les nombreuses critiques au premier parti sorti des urnes, c'est Abdalilah Benkirane, son SG, qui a attiré l'essentiel des reproches et cristallisé les animosités et sollicitations de tous genres. Sans préjuger du succès de réformes importantes qu'il a conduites, il a occupé l'essentiel du paysage audiovisuel et médiatique avec un discours à l'allure d'agit- prop et de réponse du tac au tac aux faits et gestes de l'opposition. Une pédagogie nouvelle qui tient de l'esquive, sans doute pour tenter de cacher les innombrables contradictions, blocages et oppositions au sein même de son propre gouvernement. N'aurait-il pas été plus audible si à chaque fois qu'il était aux prises avec ses difficultés de mettre délibérément à son profit tous les dispositifs que lui permet la constitution plutôt que de disserter sur des questions que ne lui ont pas été expressément posées ! La démission est un acte prévu par les textes tout comme est légal le recours aux élections anticipées! Des exemples qu'on ne saurait cataloguer ni de rébellion ni de désobéissance. Ce sont peut-être même, lorsqu'ils sont didactiquement expliqués, des gestes de loyauté et de fidélités institutionnels et pour l'essentiel d'adhésion populaire!
Si des petites réformes avaient été entreprises, le calendrier électoral aurait été certes bousculé mais le blocage n'aurait pas eu lieu. Un nouveau code électoral aurait suffi, à lui seul, pour faire l'économie des nombreuses interprétations au pied de la lettre du fameux article 47 de la constitution et la recherche post électorale de majorité gouvernementale!
L’image d’une institution qui ronronne
L'institution parlementaire ne déroge pas, non plus, à cette logique. Si elle reste la photosynthèse par excellence de la société où s'exprime les équilibres, les attentes et les espoirs, mais en même temps qu'elle se réduit à aspirer les mécontentements, les doutes et les inquiétudes, elle finit par renvoyer l'image d'une institution qui ronronne, qui trébuche ou qui fait l'école buissonnière, quand elle ne défi pas le bon sens et la logique.
L'élection de Habib Malki au perchoir a remis dans les esprits des pratiques d'une autre époque même si, en définitive, elle a ouvert la voie à l'effacement, dans la douleur, de Benkirane pour une seconde mandature.
Les scènes d'élocution difficiles de certains parlementaires ou de répétition à ne plus en finir de questions saugrenues, marginalisent les autres niches qui, sans bousculer les gouvernements, forts de leur majorité, ont le bénéfice de passionner le public. Il en est ainsi des motions de censure. En plus de 50 ans d'exercice parlementaire, à deux reprises seulement le parlement a usé de son droit à censurer le gouvernement. Quant aux grands problèmes de société, la production législative reste le parent pauvre des hémicycles. Même les lois organiques sont restées en dehors des grandes messes parlementaires et des joutes oratoires de leaders politiques.
Ces derniers se doivent un jour ou l'autre répondre de cette responsabilité historique. La mise à l’écart des militants, des intellectuels et autres experts, au profit des monnayeurs de campagnes électorales, de parvenus et de certains opportunistes, a conduit à l'indigence, même dans les partis à forte charge historique et politique.
Les institutions de régulation : Un plus, pas un substitut
Les institutions de régulation admises au titre de la constitution n'échappent pas à cette déconvenue. Les espaces rendus possibles dans la période d'effervescence consécutive au 20 février n'a permis ni la mise en œuvre d'un modèle d'anticipation et d'affranchissement par rapport aux institutions préexistantes, ni la création des espaces permanents de concertation et de dialogue dans des forums qui échappent aux obédiences de tout ordre. L'accompagnement, la promotion et le développement, dont-ils sont comptables, devrait exiger leur intervention sous des formes qui balisent les voies aux autorités gouvernementales et non pas à se substituer à celles-ci.
Il n'a échappé a personne que le choix qui a été porté sur les dirigeants de ces instances n'a été motivé que par l'expérience militante, le professionnalisme et la probité intellectuelle et matérielle. Ce qui devait se traduire par des structures légères où la relation au public est plus forte parce qu'elle est d'une teneur exigeante plus importante. Le médiateur devrait être regardé comme un homme pas comme une institution. Il est difficilement acceptable que les représentants du patronat et des syndicats soient juges et parties au conseil économique, social et environnemental et à la chambre des conseillers du parlement. Il n'appartient pas au président du CNDH de faire du marketing ni d'organiser des colloques sur ce que devrait être la Cour constitutionnelle. Pas plus que le conseil de l'immigration ne soit réduit à un catalogue de binationaux ayant acquis grâce à leur performance individuelle des lettres de noblesses dans les pays d'accueil. Quant à la HACA, son rôle ne se limite pas à réagir à un paysage audiovisuel en perdition, mais de prendre les devants dans une sphère où s'exerce le quatrième pouvoir.
Dans tous ces rouages, la non mobilité, le cumul et les incompatibilités réduisent tous les élans et dévalorisent ce pourquoi la régulation s'est faite nécessité.
Cités quelques fois sans ménagement, ces propos sont loin de vouloir abîmer les rouages et instances. Ils tentent d' indiquer qu'ils y'a aussi d'autres formes d'engagements qui peuvent à l'occasion réduire les champs d'affrontements et de ruptures de la société sans préjuger de celles qui ne sont pas parvenus à exister et qui devaient avoir des rôles à jouer dans la crise en cours . Il est impossible de faire de grandes élévations sur des édifices en pisé