chroniques
Des préoccupations sécuritaires derrière la décision de l’enseignement présentiel…
A. Laftit, S. Amzazi et K. Aït Taleb respectivement ministre de l’intérieur, de l’Education nationale et de la Santé : Un arbitrage pas toujours évident.
Un communiqué a été enfin rendu public pour clarifier les critères devant déterminer le mode d’enseignement à adopter. Il en ressort que les régions touchées où l’on retrouve les quartiers fermées seront astreintes au distanciel, décision qui vaut également pour les élèves dont les familles comptent des cas de contamination ou des personnes contacts. Pour le reste ce sera le présentiel.
Des responsables s’empresseront de nier toute contradiction entre les différents communiqués émanant du ministère, arguant que la question du choix laissé aux parents demeure. D’autres auront à cœur, dans une logique conspirationniste et de suspicion, d’affirmer que le communiqués ne s’opposent nullement. Mais que le département de M. Amzazi a cherché dans un premier à tranquilliser le secteur privé et les industries des fournitures scolaires, pour ces secteurs ne pâtissent pas de la situation, avant de passer la main, une fois cet objectif atteint, à l’Administration territoriale et au ministère de la santé pour imposer l’enseignement à distance.
Il n’y a, bien sûr, aucune preuve tangible permettant de vérifier les intentions réelles du ministère. Ce qui est sûr en revanche selon le dernier communiqué, c’est que la décision du choix entre le présentiel et le distanciel appartient exclusivement aux services territoriaux et sanitaires en possession des données sur les régions et les familles atteintes significativement. Le département de l’Education nationale se limitera, lui, à la gestion pédagogique de leurs décisions.
Le paradoxe qui interpelle ans cette histoire est l’excès d’optimisme du ministre de l’Education nationale qui a évoqué, en dépit des indicateurs épidémiologiques inquiétants, la possibilité d’un présentiel à cent pour cent.
Le ministre a commencé par évoquer une formule d’alternance subordonnée aux évolutions épidémiologiques. C’était-là la démarche appropriée recommandée par nombre d’organisations internationales et adoptées par plusieurs pays. Il s’est ensuite orienté vers le libre choix des familles, attitude qui a suscité une vive controverse et distillé le doute sur les intentions indicibles du ministre. Et il a fini en avocat d’un présentiel total dans un contexte épidémiologique menaçant. Pour qu’enfin ce soit aux services compétents, conformément au décret déclarant l’état d’urgence sanitaire, de déterminer le mode d’enseignement à adopter suivant la situation épidémiologique de chaque région.
C’est dire qu’on est pris de vertige en essayant de coller à l’évolution des choix à faire en rapport avec la situation épidémiologique marquée dimanche dernier par l’enregistrement du chiffre record de 2234 cas de contamination. Au vu de ces résultats, la saine logique voudrait que ce soit le pessimisme qui prévale sur l’optimisme et que le présentiel cède devant le distanciel. Mais c’est l’inverse qui s’est produit. On a ainsi vu le ministre privilégier le présentiel avant que n’intervienne le dernier communiqué pour nuancer cette orientation en déclarant que le présentiel reste la règle et le distanciel l’exception.
On a beau chercher, mais on ne trouve aucun fondement, ni pédagogique ni sanitaire, qui expliquerait ces variations dans les positions. Le plus probable est que cette décision a été déterminée par des considérations strictement sécuritaires. Les derniers incidents survenus à l’occasion de l’aïd el Kébir et la célébration de Achoura ont constitué des alertes sur les dangers du maintien des élèves loin des écoles. Dès lors, la déduction que l’enseignement à distance risquait de les prédisposer à des réactions de violence qui se répercuteront négativement sur la stabilité sociale, tombait d’elle-même sous le sens. Il n’en fallait certainement pas plus aux responsables pour conclure que l’enseignement présentiel à cette étape, contre un cout sanitaire minimal, constituait un pis-aller acceptable quitte à revenir au distanciel si la situation venait à s’aggraver.
Il en a été ainsi à Casablanca, source de grandes inquiétudes sécuritaire, et qui a été soumise à l’enseignement à distance. Dans les faits, l’équation adoptée par les autorités consiste à faire prévaloir le sanitaire dans les zones les plus touchées par le Covid-19, et sécuritaire dans les autres régions.
Ce qu’il faut retenir pour l’instant c’est que si la préoccupation sécuritaire se vérifie par la suite dans la détermination du mode d’enseignement, elle porterait alors le débat sur la gestion des priorités ainsi que sur les choix faits et leur pertinence pour le juste équilibre entre l’entretien de la mobilisation, les considérations sanitaires et les impératifs sécuritaires.