Gouvernement El Othmani : expédition des affaires courantes - Par Mustapha SEHIMI

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Saad Dine El Otmani présidant le Conseil de gouvernement du 8 juillet 2021 en visioconférence

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Depuis le 10 septembre courant, avec la nomination d’un Chef de gouvernement en la personne de Aziz Akhannouch, le cabinet sortant d’El Otmani n’est plus chargé, suivant la formule convenue, que de l’expédition des affaires courantes. Il faut cependant la préciser. Elle n’est pas citée expressément dans le communiqué du cabinet royal annonçant la désignation du président du RNI. Elle ne l’a pas été davantage dans une précédente occurrence de même facture, celle de Saad Dine El Otmani, le 17 mars 2017. 

En revanche, le 29 novembre 2011, si Abdalilah Benkirane s’était vu confier la tâche de former un cabinet, celui alors en place le 29 novembre - dirigé par Abbas El Fassi depuis le 15 octobre 2007 - restait chargé de « l’expédition des affaires courantes ». Pourquoi cette différence de formulation d’un cabinet à un autre ? Sans doute qu’il ne peut en être autrement et qu’il n’y a pas lieu d’y revenir, une pratique institutionnelle coutumière s’étant instaurés.

Cela dit, il vaut de relever par commencer que cette notion d’ « affaires courantes » n’a pas une existence juridique bien claire : tant s’en faut. Elle n’est pas en effet distinctement définie. Dans la jurisprudence française par exemple, le juge administratif a assimilé la gestion des affaires courantes aux mesures nécessaires pour assurer la continuité du service public. Comme l’a noté un autre auteur, « ce sont celles qui ne supposent aucun avenir, c’est-à-dire tout ce qui relève du quotidien ». Les ministres ne signent plus d’arrêtés, sauf dans deux cas – continuité des services de l’Etat et urgence. Mais leurs départements respectifs continuent de fonctionner ; si nécessaire, ils peuvent même prendre des décisions n’imposant pas le contreseing du ministre. Si l’on veut prendre en compte en particulier le présent état d’urgence  sanitaire au Maroc, il est difficile que l’exécutif actuel élargisse ses compétences. De manière  générale, les « affaires courantes » font référence à l’exercice du pouvoir de façon réduite, avec des compétences limitées.

Au Maroc, aujourd’hui, l’on a affaire à l’une des situations pouvant conduire à une telle séquence institutionnelle. A côté d’un Chef de gouvernement sortant, Saad Dine El Otmani, il y a un Chef de gouvernement désigné, Aziz Akhannouch. Leur statut n’est pas de même nature et n’emporte pas les mêmes effets. Il est fortement vraisemblable que le nouveau cabinet sera formé dans les jours qui viennent, au plus tard vers la fin de ce mois de septembre. Le  vendredi 8 octobre, aura lieu l’ouverture officielle par SM le Roi de la session parlementaire d’automne ainsi que de la législature 2021-2022.

D’ici là, aura lieu la nomination du nouveau gouvernement mais il ne sera pas pour autant investi. Il lui faudra en effet  attendre la mise en place de tous les organes intérieurs des deux Chambres du parlement (bureau, commission, groupes parlementaires). Ce n’est qu’à ce moment- là que  l’institution parlementaire sera en capacité et en responsabilité pour délibérer du programme du nouveau gouvernement conformément aux dispositions de l’article 88 de la Constitution. Un agenda donc chargé à compter de la mi-octobre surtout qu’il y aura en même temps une autre contrainte de la loi organique des finances : celle du 20 octobre au plus tard pour la présentation au Parlement du projet de loi de finance pour 2022.

Au final, s’est ouverte depuis le 10 septembre une période de transition institutionnelle de plusieurs semaines. Le précédent cabinet d’El Othmani, nommé le 5 avril 2017 avait été investi, lui, trois semaines après, soit le 26 avril. Depuis le 10 septembre courant, il n’est plus qu’un gouvernement intérimaire ; ses attributions ont été clairement définies en l’occurrence par les dispositions de l’article 37 de la loi organique 65-13 relative à l’organisation et à la conduite des travaux du gouvernement et au statut de ses membres.

L’expédition des affaires courantes englobe « l’adoption des décrets, des arrêts et des décisions administratives nécessaires et des mesures urgentes requises pour garantir la continuité des services de l’Etat et de ses institutions ainsi que le fonctionnement régulier des services publics. Ce même article (al.2) précise que « les mesures susceptibles d’engager durablement le futur gouvernement, notamment l’approbation des projets de loi et des décrets réglementaires ainsi que la nomination aux fonctions supérieures » ne relèvent pas et n’entrent pas dans le cadre de l’expédition des affaires courantes.