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Tragédie à Erfoud : une professeure assassinée par son élève dans un silence assourdissant – Par Tarik El Medlaoui

Au-delà de l’horreur de cet acte, ce drame met en lumière une réalité de plus en plus préoccupante : la montée de la violence en milieu scolaire
Le meurtre d’une enseignante par l’un de ses élèves à Erfoud, le 27 mars, révèle une crise profonde dans le système éducatif marocain. Entre silence des autorités et indifférence syndicale, ce drame pose une question cruciale écrit Tarik El Medlaoui qui se demande si l’on peut encore enseigner en sécurité au Maroc ?
Le 27 mars dernier, la ville d’Erfoud a été secouée par un drame d’une rare violence. Une professeure de français a été poignardée en plein établissement scolaire par l’un de ses élèves. Grièvement blessée, elle a été transférée en urgence au CHU de Fès, où elle a succombé à ses blessures.
Au-delà de l’horreur de cet acte, ce drame met en lumière une réalité de plus en plus préoccupante : la montée de la violence en milieu scolaire. Insultes, agressions, menaces de mort… les enseignants sont de plus en plus fréquemment pris pour cibles, comme en témoignent les nombreuses vidéos circulant sur les réseaux sociaux. Ce drame n’est pas un fait isolé, mais le symptôme d’un malaise profond que beaucoup préfèrent encore ignorer.
Silence assourdissant
Face à l’émotion suscitée par ce meurtre, l’attitude des institutions interroge. Ni le ministère de l’Éducation nationale, ni le gouvernement, ni les partis politiques n’ont réagi officiellement. Pas de communiqué, pas de déplacement, pas même un message de soutien à la famille de la victime ou à la communauté éducative. Un silence pesant, presque indécent.
Ce mutisme est d’autant plus troublant que la réforme de l’école est affichée comme une priorité gouvernementale. Comment prétendre transformer le système éducatif sans garantir d’abord la sécurité de celles et ceux qui le font vivre au quotidien ?
Dans un contexte où les partis de la majorité semblent déjà absorbés par les enjeux électoraux et les stratégies partisanes, la question de la sécurité à l’école paraît reléguée au second plan – voire totalement oubliée. Les derniers discours et communiqués des bureaux politiques n’en font même pas mention.
Les syndicats aux abonnés absents
Autres absents notables : les syndicats enseignants. L’an dernier, ces mêmes organisations, souvent en coalition avec diverses « tansikiyat », avaient mené une mobilisation de grande ampleur contre la réforme du précédent ministre, allant jusqu’à brandir la menace d’une année scolaire blanche.
Aujourd’hui, face à un drame touchant au cœur même de l’intégrité physique et morale du corps enseignant, ces voix pourtant si audibles sur d’autres fronts brillent par leur silence. Pourquoi cette absence de réaction sur un sujet aussi vital que la sécurité des professeurs ?
Une urgence nationale
Il ne s’agit pas ici de contester la légitimité des revendications passées. Mais il convient de rappeler qu’il n’existe pas de droit plus fondamental que celui de travailler en sécurité. Ce drame d’Erfoud doit constituer un tournant. Un électrochoc.
La sécurité à l’école n’est ni un luxe, ni une préoccupation secondaire. Elle est la condition première de toute réforme, de tout projet éducatif, de toute ambition pour l’avenir. Tant que les enseignants auront peur, l’école ne pourra ni instruire, ni émanciper.
Il est grand temps que le pays ouvre les yeux. Que les responsables, à tous les niveaux, prennent leurs responsabilités. Car laisser le silence s’installer après un tel drame, c’est accepter, implicitement, qu’il se reproduise.
Par Tarik El Medlaoui