Politique
Benkirane devant le parlement en trois phrases : Merci les Marocains de supporter l'insupportable, un faible pour les aisés, du mépris pour les pauvres et les syndicats
Comme pr?vu, Benkirane est venu au parlement non pas pour d?fendre un bilan? devant les parlementaires, mais pour convaincre ses troupes que les d?cisions actuelles et ? venir du gouvernement? sont incontournables sinon le d?luge.
Contrairement aux auditions mensuelles o? le chef du gouvernement r?ussit ? d?tourner le d?bat en alimentant la pol?mique, cette fois la lecture du texte, m?me all?g? en comparaison avec celui qu'on lui a pr?par? initialement, l'a fatigu?, lui si port? sur l'oral, la ??Darija?? et la pol?mique.
En remerciant les Marocains d'avoir compris et support? les mesures prises par le gouvernement ? maintes reprises, Benkirane semble avoir saisi que les diff?rentes mesures de politique ?conomique prises par son gouvernement ont fait mal et il con?oit d?sormais que celles qu'il s'est engag? avec le FMI ? prendre vont rendre la vie des m?nages encore plus dur. Sans pour autant que cela signifie un quelconque recul.
Le chef du gouvernement s?est d'ailleurs, il s'est montr? d'une m?chancet? gratuite avec la classe moyenne et les syndicats, lan?ant furtivement un ??je ne vais pas valoriser tous les revenus??, pr?textant? qu'il s?int?resse avant tout aux vuln?rables, oubliant que la classe moyenne est aujourd'hui tr?s vuln?rable et sa vuln?rabilit? est refl?t?e par l'essoufflement de la consommation des m?nages, ?l?ment d?terminant de la croissance dans le cadre du mod?le ?conomique marocain. Cette m?chancet? refl?te la m?fiance des islamistes vis ? vis d'une classe moyenne soup?onn?e d??tre tr?s demandeuse de modernit? et de libert?s et par ricochet anti-islamiste, il lui pr?f?re les pauvres moins immunis?s contre un discours emball? religieux.
Un faible pour les ais?s
Benkirane n?a pu ?viter, une fois encore, m?me dans un texte ?crit, d?afficher ses pr?f?rences pour les hommes d'affaires leur affirmant que le gouvernement qu'il pr?side n'a rien ?pargn? pour leur plaire et qu'il n'?pargnerait rien pour r?pondre ? leurs dol?ances et leurs revendications et en se r?f?rant au lexique? ultralib?ral. Les PME n'?taient qu'un alibi. Cette contradiction flagrante entre la docilit? envers les riches et la fermet? ? l'encontre des classes moyennes et pauvres a constitu? le vrai fil conducteur d'un discours tr?s mal structur? et prolixe.
Le discours du chef du gouvernement a finalement pr?sent? des ?checs et des mesures impopulaires et al?atoires comme des succ?s et des r?alisations h?ro?ques?!
Benkirane a parl? de la r?forme de la justice, de l'?ducation, du champ m?diatique, de la relation avec la soci?t? civile, de la r?gionalisation, des finances publiques, de la relation entre le gouvernement et le parlement... comme s'il s'agissait de chantiers qui ont atteint leur maturit?. Or tout le monde sait que ces chantiers ouverts avant l'arriv?e de ce gouvernement tra?nent toujours. En agissant de mani?re inappropri?e, voire brutale, et en voulant imposer sa vision unilat?rale des choses?; le gouvernement n'a fait que compliquer leur cheminement de ces r?formes et cr?er un climat de suspicion incompatible avec la concertation et le dialogue qu'exige toute r?forme de grande envergure. Les pol?miques autour des t?l?visions publiques, qui continuent depuis la gaffe des cahiers de charges, n'ont fait que tirer ces t?l?visions vers le bas. L'arrogance avec laquelle Choubani a men? le dialogue avec la soci?t? civile? a amen? les ONG d?mocratiques ? boycotter une grande manipulation qui vise ? an?antir toute r?sistance d?mocratique ? un projet qui se cache derri?re quelques clich?s emprunt?s aux autres. Ismail Alaoui a ?t? appel? pour cautionner cette manipulation islamiste en contrepartie du poste minist?riel offert ? un membre de sa famille. La relation entre le gouvernement et le parlement n'est jamais arriv? ? ce stade de d?t?rioration ?en raison d'une volont? affich?e de r?duire l'opposition ? n?ant. Les pol?miques du chef du gouvernement et de certains ministres islamistes donnent l'impression que le PJD veut reproduire la folie des fr?res musulmans en Egypte, ou tout au moins l?arrogance du turc Erdogan, oubliant que l'histoire politique du Maroc depuis l'ind?pendance, et m?me avant, se distingue par les pluralismes et la lutte pour la d?mocratisation de l'Etat et de la soci?t? et que toutes les tentatives de r?duire les libert?s et les pluralismes ont ?chou?.
Gu?re mieux sur le front ?conomique
Sur le front ?conomique, la situation n?est gu?re meilleure. Le chef du gouvernement para?t en dehors du temps. Le Maroc se trouve aujourd'hui dans une situation ?conomique semblable ? celle des ann?es 1980 et la deuxi?me moiti? des ann?es 1960. Les mesures prises jusqu'ici pour r?duire le d?ficit budg?taire, le d?ficit du compte courant et pour maintenir les avoirs internationaux de BAM, ?dict?es par le FMI, ne sont pas viables et la capacit? du tr?sor et des entreprises publiques ? s'endetter n'est pas ?lastique de fa?on ind?termin?e. La dette ext?rieure du pays, y compris la dette garantie, a atteint un seuil critique et le taux d'endettement public global a atteint 75,5?% en 2013. Il doit atteindre environ 82?% et m?me plus en 2015. Le Maroc se range parmi les pays qui risquent de se trouver en situation de faillite selon l'article publi? par ?? The Economist??. Un jugement qui peut faire mal, vu la notori?t? de ce journal britannique. A part Qatar, les islamistes n'entretiennent pas de bonnes relations avec les bailleurs de fonds potentiels du Maroc et n'ont aucune exp?rience pour drainer des fonds ou des IDE. Compter sur les finances islamiques, m?me ? moyen terme, pour rem?dier ? la faiblesse des finances la?ques c'est compter sur Godot.
Toutes les pr?visions cr?dibles confirment par ailleurs que ?taux de croissance continuerait ? ?tre faible. Il ne d?passera pas 2,5?% cette ann?e, 3,5?% en 2015. Il a atteint 4,4?% en 2013 gr?ce ? la pluie, sinon le PIB non-agricole n'a ?volu? que de 2,2?%. Il a? ?t? de 2,5?% en 2012 ?galement. Les ann?es du gouvernement islamiste sont des ann?es du retour de la croissance faible. Le risque de retour de la croissance n?gative n'est pas loin. Tous les secteurs non agricoles, ? part les services, d?truisent plus de postes d'emplois qu'ils ne cr?ent, surtout le secteur secondaire (BTP, industrie).
?Le recensement g?n?ral de la population peut nous apporter de mauvaises surprises sur le ch?mage puis qu?il englobera les ch?meurs pessimistes qui ne cherchent plus d'emploi et qui ne sont plus comptabilis?s. A quoi sert un gouvernement s'il n'adopte pas les politiques ?conomiques qui visent ? cr?er des emplois et lutter contre le ch?mage?? Benkirane n'a m?me pas jug? utile de parler de l'emploi et du ch?mage dans son discours, sachant bien que le gouvernement a ?chou? ? ce niveau et que la politique ?conomique n?olib?rale qu'il compte continuer ? suivre, sous la supervision du FMI, exacerbera le ch?mage des jeunes, surtout les jeunes dipl?m?s.