Syrie : Nos politiciens feraient bien de prendre un temps de réflexion avant de se précipiter sur des positions impromptues – Par Abdelaziz Gougas 

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Saad Eddine El Otmani, ancien chef du gouvernement et ex-ministres des Affaires étrangères

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Saad Eddine El Otmani, ancien chef du gouvernement marocain, ancien secrétaire général du PJD, a déclaré que l’opération de « dissuasion de l’agression » menée par l’opposition syrienne contre le régime du président syrien Bachar al-Assad est comparable à l’opération de résistance palestinienne « Déluge d’Al-Aqsa » contre Israël. 

Dans une publication sur son compte personnel sur Facebook, que j’ai consultée, M. El Othmani, ancien secrétaire général du Parti de la Justice et du Développement, a affirmé que les initiateurs des deux opérations « aspirent tous deux à la liberté et à la dignité ». Il a ajouté : « Gloire à Celui qui change les situations. Les événements en Syrie s’accélèrent. Ceux qui étaient hier des déplacés, enfants et jeunes, de leurs villes et villages, reviennent victorieux lors de l’opération de dissuasion de l’agression, réalisant ainsi un rêve et un espoir qu’ils pensaient difficiles à atteindre. Mais Dieu l’a facilité avec le changement des circonstances. »

Gideon Sa'a plus mesuré qu’El Otmani

Cependant, si M. El Otmani avait pris un peu plus de temps de réflexion, il aurait entendu et compris des choses étonnantes. En effet, l’expert israélien en affaires moyen-orientales, le Dr Mordekhaï Kedar, a déclaré que les dirigeants des factions de l’opposition syrienne planifient l’ouverture d’une ambassade israélienne à Damas et à Beyrouth. 

M. Kedar a affirmé qu’il est « en contact permanent avec les dirigeants des factions de l’opposition syrienne » et que l’impression qu’il en retire est qu’ils ne considèrent pas Israël comme un ennemi. Il a ajouté qu’ils projettent « d’ouvrir une ambassade israélienne à Damas après avoir renversé le gouvernement de Bachar al-Assad et éliminé l’influence de l’Iran et du Hezbollah en Syrie ».

Je ne suis pas un défenseur de Bachar al-Assad, ce médecin ophtalmologue aveugle, mais je ne peux que constater la myopie politique de nombre de nos responsables partisans en matière de politique étrangère. Cela est d’autant plus surprenant que M. El Othmani a été ministre des Affaires étrangères, un poste qui exige de l’expérience politique, de la prudence et de la retenue dans le jugement. Il est vrai pas pour longtemps, mais il devrait avoir au moins retenu que devant une accélération subite des événements, il est plus sage de prendre le temps de la réflexion.

Il semblerait que le ministre israélien des Affaires étrangères, Gideon Sa'ar, ait fait preuve de plus de prudence, bien qu’il n’ait pas caché son soutien à ceux-là que défend M. El Otmani. Dans une déclaration ce dimanche, en réaction aux développements rapides survenus en Syrie à la suite de l’attaque menée par les factions de l’opposition, M. Sa'ar a affirmé qu’il ne voulait « pas prendre parti » et a souligné « la nécessité de considérer les intérêts de la minorité kurde ».

Les minorités dans les projets israéliens

Il a précisé : « Nous ne voulons pas nous aligner sur une partie ou l’autre. Il n’y a pas de bon choix entre le régime syrien et les rebelles jihadistes. » Il a ajouté : « Nous devons observer comment l’espace syrien se reconfigure… et ce, de manière distante. » Sa'ar a poursuivi : « Je ne vois pas de conditions permettant à la Syrie de conserver une souveraineté centralisée sur l’ensemble de son territoire comme auparavant. Il est plus réaliste de considérer que l’avenir de la Syrie sera fédéral, avec des droits pour les minorités… les Druzes et les Kurdes. Ainsi, il apparait clairement que les islamistes ‘’victorieux’’ de Syrie, selon l’expression de M. El Othmani, bien plus qu’alliés, au moins objectifs de desseins israéliens, n’intéressent Israël que dans la mesure où ils contribuent au morcèlement de la Syrie au profit des minorités, particulièrement Kurdes, que Tel-Aviv inscrit dans sa stratégie de domination de la région comme le cheval de Troie pour atteindre indifféremment, outre la Syrie, l’Irak, l’Iran et ultérieurement, pourquoi pas, la Turquie.

 Le même ministre israélien des Affaires étrangères n’a-t-il d’ailleurs pas estimé que « les alliés de son pays, dans ce cas, sont les minorités » ? Pour en conclure : « Nous devons considérer les intérêts de la minorité kurde dans le nord de la Syrie, comprendre leurs aspirations et voir comment nous pouvons tirer parti de la situation pour renforcer la coopération. » Et tout indique que d’autres « minorités » aussi bien dans la sphère arabo-musulmane qu’en Afrique, figurent dans les projets d’Israël comme tête de pont de la vision de l’Etat profond américain qui avait déjà fait vaciller la région avec son plan du Grand Moyen Orient.

Enfin, en se référant aux analyses les plus sérieuses publiées par des instituts américains spécialisés, il apparaît qu’Israël est le principal bénéficiaire des événements en Syrie. À moins que la position de M. El Otmani se fait l’écho d’une admiration pour la Turquie qui résonnerait fortement ici au Maroc, puisque la Turquie est le soutien officiel des factions de l’opposition syrienne, mais cela est une autre histoire.

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