L’allocution de Abdejlil Lahjomri

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Je n’aurais jamais pu mériter cette distinction si je n’avais pas pu puiser mon énergie et ma force au sein de ma famille, auprès de mon épouse qui stoïquement a pu supporter des moments de tension et d’abattement , mon fils et ma belle-fille, aimant et présents et surtout mes petits- enfants Alya et Kamil,

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Mme L’Ambassadeure

Il y a un peu plus d’une trentaine d’années, je me trouvais là devant votre prédécesseur qui, à l’issue des négociations marocco-françaises pour la mise en œuvre de l’Option Internationale bilingue du Baccalauréat français, me remettait au nom du Président de la République, Monsieur François Mitterrand les insignes de chevalier de la légion d’honneur. Me voilà devant vous promu cette fois-ci par Monsieur Le Premier Ministre français, Commandeur des Palmes Académiques. Et comme au cours de la cérémonie précédente c’est une même question lancinante qui s’impose à moi : Pourquoi moi ? Alors que ceux et celles qui la méritent sont ceux et celles qui ont travaillé, qui ont imaginé, pensé, et construit ce nouveau dispositif dans le cadre de la réforme du Baccalauréat français, un Baccalauréat International Français, un BFI de langue arabe pour qui, même si quelques légers aménagements encore nécessaires, seront introduits avant la première session de Juin 2024, connaitra j’en suis certain le même succès que l’Option internationale bilingue. 

Cette distinction qui perturbe un peu ma modestie innée, revient sans aucun doute à Mesdames et Messieurs les Membres de la commission, représentants des deux Ministères de l’éducation marocain et français, du ministère des Affaires étrangères marocain, et à Madame la Professeure principale de Notre établissement, qui a accompagné en facilitatrice dans un engagement sans faille, leurs travaux et leurs débats. 

L’aventure pédagogique de l’OIB, car c’en était une, passionnante et audacieuse avait l’ambition de recentrer les établissements français au Maroc, en proposant un enseignement soutenu de la langue arabe et des littératures arabe, de l’histoire et de la géographie du Maroc en langue arabe, aux élèves marocains, binationaux et étrangers tiers qui le souhaitaient et qui étaient inscrits dans ces établissements. 

Ces enseignements renforcés assuraient une promotion de la langue arabe et de la culture marocaine, fondements de leur identité, Il était le premier dispositif, qui leur offrait la possibilité de consolider leur insertion dans les réseaux professionnels, sociaux et culturels et pourquoi pas politiques dans leur pays. 

Mais toute réforme pédagogique finit par subir les affres de l’usure du temps et comme l’histoire ne se répète pas, un nouveau dispositif est proposé aux jeunes Marocains, binationaux et étrangers tiers confiés aux établissements français au Maroc avec les mêmes objectifs de recentrage et d’insertion dans leur société, mais inscrits dans une structuration nouvelle. 

Celle-ci s’inspire de l’OIB, mais dans un esprit renouvelé, car il y a toujours des leçons à tirer du passé. Elle propose donc une structuration plus affirmée, plus souple, mieux adaptée à la nouvelle réforme du système éducatif français, tout en renforçant et en valorisant la langue de section, l’arabe et les autres langues dont sont friands nos jeunes, leur permettant d’être en phase avec les problématiques du monde actuel et de celui de demain, qu’ils auront à construire. 

La mention « Baccalauréat Français International » (BFI) est ambitieuse, car elle promeut l’acquisition d’une solide culture générale, que les élèves seront en mesure d’acquérir, d’enrichir et d’exprimer à l’écrit comme à l’oral en arabe, langue de la section et dans les autres langues étrangères qu’ils auront choisies d’étudier.  

Sa mise en œuvre devrait être portée, ici dans tous les établissements de l’enseignement français au Maroc, par le même élan, le même enthousiasme qui a présidé à sa conception, au risque de connaitre dès son lancement, l’affaissement qui avait ralenti le déploiement de feu l’OIB.

Les autorités pédagogiques et les familles au Maroc sont soucieuses à juste titre du légitime intérêt que les élèves accordent à la langue et à la culture de leur pays. 

Il n’en reste pas moins que dans la redoutable compétition aux inscriptions pour accéder à l’enseignement supérieur, dans les universités françaises ou étrangères, les modalités nouvelles du contrôle continu du Baccalauréat Général pourraient par effet induit disqualifier cette noble espérance, au profit d’un engagement motivé par des considérations plus comptables liées au jeu des coefficients, pris en compte par les algorithmes de Parcoursup ou des autres plateformes de candidatures. 

Mais je suis convaincu qu’avec la mention BFI de langue arabe, nous possédons maintenant un outil d’avenir, une voie,  et plus encore une vision qui dépasse le cadre des établissements français au Maroc pour offrir aux élèves de notre diaspora, un espace de culture en partage, qui, s’il investit le plus grand nombre d’établissements en France et ailleurs dans le réseau, serait à même de leur permettre d’entretenir des liens étroits avec leur pays, malgré l’éloignement géographique, de mettre en œuvre des projets en partage et de leur faciliter grandement leur retour. 

 Et si nous rêvions un peu et que nous imaginions un Baccalauréat International Marocain de langue française, un BMI de langue française, nous aurions non seulement fait bénéficier nos élèves dans les établissements marocains d’une sécurité linguistique, qui mobiliserait leurs énergies pour faciliter par le jeu des équivalences leur études supérieures en France, dans l’espace européen ou canadien, mais  surtout ouvert la voie à un déploiement d’une francophonie positive qui démentirait l’affirmation de Kateb Yacine, qui faisait de la langue française un butin de guerre, pour en faire  une langue de la fraternité, de l’égalité et pourquoi pas de  la liberté.

Mme L’Ambassadeure,

Je n’aurais jamais pu mériter cette distinction si je n’avais pas pu puiser mon énergie et ma force au sein de ma famille, auprès de mon épouse qui stoïquement a pu supporter des moments de tension et d’abattement , mon fils et ma belle-fille, aimant et présents et surtout mes petits- enfants Alya et Kamil, tous deux élèves dans un de vos établissements et que je tenais à voir parmi nous ce soir parce que la réussite du BFI de langue arabe sera leur réussite, rassurant leur grand-père sur leur avenir intellectuel, qui les ferait bénéficier d’un enseignement envié -le vôtre- et d’une assise identitaire apaisée, grâce une maîtrise accrue de la langue de leur pays et de l’histoire millénaire et plurielle de leur société -la nôtre-.

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