A Rio de Janeiro, la ''saudade'' du carnaval

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Des éléments de chars du carnaval de 2020 dans un entrepôt de l'école de samba Imperio di Tijaca, le 13 février 2021 à Rio de Janeiro

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Au lieu des percussions assourdissantes, le silence du recueillement. Une grosse caisse est posée sur le sol pour un hommage aux victimes brésiliennes du coronavirus devant le musée de la Samba d'une ville de Rio privée de carnaval par la pandémie.

En temps normal, les rues devraient déjà être pleines de fêtards et les écoles de samba devraient peaufiner les derniers détails de leurs somptueux défilés du dimanche et du lundi soir au sambodrome. 

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Le sambodrome de Rio illuminé en hommage aux écoles de samba privées de carnaval en raison de la pandémie de coronavirus, le 12 février 2021 au Brésil

Mais cette année, les Cariocas sont privés de la fête populaire qui fait la fierté et la réputation mondiale de Rio de Janeiro. Ils éprouvent la "saudade", cette nostalgie toute brésilienne de ces festivités qui n'ont été annulées que deux fois auparavant, en 1892 et 1912.

"Pour tous les amateurs de samba, pour le peuple afro-descendant, c'est un moment difficile. On n'aura pas notre moment de fête, on pourra seulement pleurer les morts", dit à l'AFP Nilcemar Nogueira, fondatrice du musée de la Samba, situé au pied de la colline de la favela de Mangueira, berceau de la célèbre école de samba du même nom.

Pour cette "ouverture symbolique" du carnaval, vendredi, elle s'est contentée de rendre hommage aux plus de 236.000 Brésiliens décédés du Covid-19.

Vidéo

Les musiciens ont entonné quelques chansons a capella, tandis que des danseuses aux longues robes blanches et coiffées de turbans agitaient des rameaux dans un rituel de "purification" des religions afro-brésiliennes. 

L'un des airs était "Samba, agoniza mas não morre" (la samba agonise, mais ne meurt pas), composée par Nelson Sargento, 96 ans, fraîchement vacciné contre le Covid-19 et qui assistait à la cérémonie sur un fauteuil roulant.

Sambodrome vide  

Frappé de plein fouet par la deuxième vague de contaminations, avec plus de 1.000 morts quotidiennes depuis plusieurs semaines, le Brésil reste plongé dans une gravissime crise sanitaire, avec une campagne de vaccination chaotique et lancée tardivement.  

Rio est la ville la plus endeuillée du pays, avec près de 20.000 décès.

Dans ces conditions, pas question d'organiser une fête qui attire des centaines de milliers de fêtards dans les "blocos", cortèges de rue dont les organisateurs ont dû se résoudre à organiser des concerts virtuels en ligne au lieu des défilés débridés.

Environ 5.000 glacières du brasseur Ambev, utilisées d'habitude pour vendre des canettes de bière fraîches dans la rue, ont été distribuées dans ces centres de vaccination pour aider à maintenir les doses à la température exigée. 

Le manque à gagner pour le commerce est immense, le carnaval de l'an dernier ayant rapporté environ 4 milliards de réais (environ 750 millions de dollars).

Les écoles de samba, qui préparent d'habitude de longs mois durant leurs somptueux défilés avec des chars monumentaux, sont totalement à l'arrêt, avec de centaines de couturières, accessoiristes, mécaniciens, danseurs et chorégraphes au chômage technique. 

Désespérément vide, le sambodrome sera illuminé aux couleurs des différentes écoles les nuits où il était censé recevoir plus de 70.000 spectateurs pour le spectacle grandiose regardé d'habitude par des millions de Brésiliens à la télévision.

Ils devront se contenter de la rediffusion des 28 défilés les plus marquants de l'histoire du carnaval sur TV Globo.

Plus de 1.000 policiers ont été mobilisés pour faire respecter les interdictions de rassemblements.

Les peines encourues vont jusqu'à un an de prison, mais des images circulant sur les réseaux sociaux ont montré ces derniers jours des fêtards dans des soirées clandestines, notamment dans la banlieue nord de Rio.

Les plages, bars et restaurants restent ouverts mais l'occupation des hôtels tourne autour de 50%, contre près de 100% l'an dernier à la même époque.

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