Cinéma, mon amour de. Driss Chouka: ''LES PRODUCTEURS'', SATIRE, DÉRISION ET HUMOUR SUBVERSIFS

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Mel Brooks réussit dans Les Producteurs, le tour de force de maintenir un équilibre délicat entre l'absurde et la réalité. Alors que l'intrigue tourne autour d'un plan aussi improbable que loufoque, les personnages conservent une authenticité émotionnelle

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Cinéma, mon amour !'' de Driss Chouika - LE CINÉMA UNDERGROUND : QUAND  L'AMÉRIQUE FAISAIT SON CINÉMA EXPÉRIMENTAL

« Ecoutez, je ne veux pas me montrer philisophe, mais je dirais que si vous êtes vivant, vous devez vous agiter, vous devez sauter partout, car la vie est le contraire de la mort, donc vous devez au moins penser de manière bruyante et colorée, sinon vous n’êtes pas vivant. ». Mel Brooks.

Oscar du meilleur scénario original au 41ème Festival de Cannes, interdit pendant des années en Allemagne, grand succès public et critique, et du film et de son adaptation théâtrale, réadaptée au cinéma dans un remake de Susan Stroman en 2005, “Les producteurs“ de Mel Brooks, son premier long métrage, et qui reste son meilleur film, sorti en 1968, demeure une satire cinématographique inoubliable, d’un humour subversif décapant.

UN FESTIN DE DÉRISION ET D’HUMOUR SUBVERSIFS

Mel Brooks, maestro de la comédie satirique, a donné naissance à une œuvre inoubliable avec son film “Les Producteurs“. Quand je l’ai vu la première fois au début des années 70, à l'âge d’or du cinéma au Maroc, l’époque ou les salles de cinéma étaient encore de véritables temples de cinéphilie, je n’en revenais pas et il est resté gravé dans ma mémoire, l’ayant revu à plusieurs reprises avec un plaisir renouvelé. Ce classique de la comédie hollywoodienne hilarante et déjantée, explore le monde délirant du théâtre, offrant une satire mordante de l'industrie du divertissement. Son univers farfelu et son humour audacieux, sont uniques dans leur conception et leur traitement cinématographiques.

Le film débute avec une prémisse aussi brillante qu'audacieuse. Max, un producteur de Broadway, et son comptable timide Leo, décident de créer délibérément un échec financier pour s'enrichir. Le plan est simple : lever plus d'argent qu'il n'en faut pour financer une pièce de théâtre, intitulée “Le printemps d’Hitler“, faisant l’apologie du troisième Reich. Puis, assurer son échec, échapper au fisc et s'enfuir avec le reste de l'argent. Mel Brooks se moque ouvertement du monde du spectacle, de ses extravagances, de son narcissisme et de ses excès. "Les Producteurs" dépeint le milieu du théâtre comme une arène où l'ego et l'ambition sont aussi démesurés que les décors de scène. Chaque personnage est une caricature exagérée, une représentation grotesque d'un archétype de l'industrie du divertissement.

Zero Mostel et Gene Wilder forment un duo comique inoubliable. Mostel incarne le flamboyant Max Bialystock avec une énergie débordante, tandis que Wilder apporte sa sensibilité et son charme excentrique au personnage de Leo Bloom. Leur dynamique unique alimente l'humour du film, créant des moments comiques qui restent gravés dans la mémoire du spectateur. Le film adopte la forme d'une comédie musicale, ajoutant une couche supplémentaire de plaisir au film. Les chansons, écrites par Mel Brooks lui-même, sont des joyaux comiques. Des titres tels que "Springtime for Hitler" ou "When You've Got It, Flaunt It" sont à la fois hilarants et mémorables, contribuant à l'aspect festif de l'œuvre.

ENTRE L’ABSURDE ET LA RÉALITÉ

Mel Brooks réussit le tour de force de maintenir un équilibre délicat entre l'absurde et la réalité. Alors que l'intrigue tourne autour d'un plan aussi improbable que loufoque, les personnages conservent une authenticité émotionnelle. C'est cette connexion avec la réalité qui amplifie l'impact comique, transformant chaque situation absurde en une critique satirique plus profonde. Le traitement du film résonne avec l'histoire du cinéma et du théâtre. Le fait de créer délibérément un échec artistique pour en tirer profit a une résonance particulière dans l'histoire de l'industrie du divertissement. Mel Brooks puise dans ces réalités pour créer une satire intemporelle qui reste pertinente, même des décennies après sa sortie.

L'impact de "Les Producteurs" sur la culture populaire est indéniable. Adapté en comédie musicale à succès puis en remake cinématographique en 2005, le film de Mel Brooks a laissé une empreinte durable sur le monde du divertissement. Ses répliques cultes et son approche iconoclaste continuent d'influencer les comédies contemporaines. Mel Brooks se distingue par son audace et son premier long métrage n'évite aucun sujet tabou. La façon dont le film aborde des thèmes comme le nazisme, la sexualité et l'avidité est une manifestation de la vision subversive de Brooks. Son humour transcende les limites conventionnelles pour explorer des territoires comiques souvent négligés.

À sa sortie en 1968, "Les Producteurs" a été salué par la critique pour son originalité et son courage artistique. Bien que le film ait d'abord été controversé en raison de son traitement satirique du nazisme, il a finalement été reconnu comme une œuvre cinématographique novatrice. Le succès public et les récompenses, dont l'Oscar du meilleur scénario original pour Mel Brooks, témoignent de la force de cette comédie révolutionnaire.

Ce film de Mel Brooks demeure un chef-d'œuvre incontesté de la comédie satirique. Son mélange unique d'humour irrévérencieux, de performances mémorables et de critique sociale a établi un standard que peu ont égalé. Il reste ainsi une pièce maîtresse dans l'histoire du cinéma comique, invitant les spectateurs à rire tout en réfléchissant à la nature souvent absurde de l'industrie américaine du spectacle.

FILMOGRAPHIE DE MEL BROOKS (LM)

« Les producteurs » (1968) ; « Le mystère des douze chaises » (1970) ; « Frankenstein Junior » (1974) ; « Le Sherif est en prison » (1974) ; « La dernière folie de Mel Brooks » (1976) ; « Le Grand Frisson » (1977) ; « La folle histoire du monde » (1981) ; « La folle histoire de l’espace » (1987) ; « Chienne de vie » (1991) ; « SacréRobin des Bois » (1993) ; « Dracula, mort et heureux de l’etre » (1995) ; « La folle histoire du monde 2 » (2023).

 

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