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Scabreux : Un chirurgien pédophile violeur en série en France : 299 victimes
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Croquis d'audience montrant le chirurgien français à la retraite Joël Le Scouarnec assistant à son procès pour le viol et l'abus sexuel d’enfants, au palais de justice de Saintes, dans l'ouest de la France. s. (Photo Benoit PEYRUCQ / AFP)
En France, 299 victimes face à un unique accusé: Joël Le Scouarnec, ancien chirurgien de 74 ans, va être jugé à partir du 24 février pour une longue série de viols et agressions sexuelles commis sur d'anciens patients, en majorité mineurs au moment des faits.
Ce procès d'une des plus grandes affaires de pédocriminalité jamais jugée en France, se tiendra devant la cour criminelle du Morbihan, dans l'ouest de la France, pour une durée prévue de quatre mois.
Les victimes identifiées par la justice étaient souvent endormies ou en phase de réveil lorsqu'elles ont subi ces actes criminels, a révélé l'enquête.
"Assez globalement, M. Le Scouarnec a reconnu son implication dans nombre des faits en cause", ainsi que ses "stratégies de dissimulation", a déclaré le procureur de Lorient, Stéphane Kellenberger, qui mènera l'accusation au procès de Vannes.
L'âge moyen des victimes est de 11 ans mais parmi la multitude de faits attribués à l'ex-chirurgien figurent le viol d'un bébé d'un an et une agression sexuelle sur un patient de 70 ans.
L'accusé devra répondre de violences sexuelles commises entre 1989 et 2014, période durant laquelle il a exercé dans une douzaine d'établissements de l'ouest de la France, répartis dans huit départements.
Au total, Joël Le Scouarnec sera jugé pour 111 viols et 189 agressions sexuelles, aggravés par le fait qu'il abusait de sa fonction de médecin et qu'ils visaient souvent des moins de 15 ans (256 victimes sur 299).
La loi ne permettant pas le cumul des peines, Joël Le Scouarnec, déjà incarcéré pour des faits de même nature, encourt une peine maximale de 20 ans de réclusion.
Perruques et poupées enfantines
L'homme, qui se range dans ses écrits parmi les "pédophiles" persécutés par la société, documentait toutes ses pratiques, incluant aussi la scatophilie, la zoophilie, le port de perruque, d'une couche et l'utilisation régulière de poupées enfantines comme jouets sexuels. Aucune pathologie psychiatrique n'a toutefois été détectée chez lui par les experts.
Le chirurgien consignait aussi scrupuleusement dans des carnets les noms de ses victimes associés aux récits des sévices qu'il leur infligeait subrepticement, parfois jusque sur la table d'opération.
Et c'est certainement cette manie qui lui vaut de répondre de ses crimes à Vannes dans les mois à venir, les enquêteurs ayant pu retracer son itinéraire pédocriminel en passant au crible cette masse de documents.
Il aura fallu la plainte en 2017 d'une jeune voisine, une fillette âgée de six ans qu'il avait agressée et violée, pour mettre au jour les méfaits du chirurgien.
Dans sa maison de Jonzac, où Joël Le Scouarnec vivait en ermite avec ses dizaines de poupées, les gendarmes avaient saisi plus de 300.000 images pédocriminelles. Éberlués, ils avaient aussi découvert des milliers de pages de listings et de journaux intimes sur son ordinateur.
L'enquête ouverte après le viol de sa petite voisine mettra également en évidence un viol commis sur l'une de ses nièces ainsi que des violences sexuelles sur une autre nièce et une jeune patiente dans les années 1990.
Le médecin déchu a été condamné pour ces faits à 15 ans de réclusion en décembre 2020.
Radié trop tardivement ?
Ce n'est qu'après cette plainte de 2017 et son placement en détention provisoire que Joël Le Scouarnec a été radié de l'Ordre des médecins.
Le praticien avait pourtant été condamné fin 2005 par le tribunal correctionnel de Vannes pour avoir téléchargé sur internet des fichiers pédopornographiques. La peine de quatre mois de prison avec sursis n'était assortie d'aucune obligation de soin ou d'interdiction d'exercer.
En août 2006, il était titularisé à l'hôpital de Quimperlé, dans l'ouest de la France, sans que son directeur ou le conseil départemental de l'Ordre des médecins, pourtant informés de sa condamnation, n'y aient trouvé à redire.
Une enquête distincte a été ouverte à Lorient, contre X, pour "non-empêchement de crime ou délit contre l’intégrité des personnes".
Quant à l'association La Voix de l'Enfant, partie civile au procès, elle a porté plainte en avril 2023 contre les autorités judiciaires et le ministère de la Santé pour "mise en danger de la vie d’autrui".
Sur les quatre mois prévus pour le procès, sept journées ont déjà été programmées à huis clos, de droit pour les victimes mineures au moment des faits si elles le demandent.
De nombreuses victimes ont été traumatisées en apprenant les faits, parfois des décennies plus tard. Toutes ne seront pas présentes mais beaucoup disent attendre du procès des explications sur les violences que le praticien leur a infligées.
L'avocat de M. Le Scouarnec, Me Thibaut Kurzawa, a affirmé que "son état d'esprit n'a pas changé. Il veut se défendre et il veut s'expliquer". "Il a besoin de s'exprimer", assure-t-il. (AFP)