chroniques
Les Turcs, les Perses et l'Orient "Arabe"
L'Irak et à un degré moindre la Syrie, ne sont plus que le champ de bataille entre ces deux impérialismes. Pendant des siècles l'Orient dit arabe était perse ou turc. C'est un retour de l'histoire
La bataille de Mossoul est entamée. Elle est entourée d'une opération d'intox assez extraordinaire. Ses enjeux militaires ne sont pas les plus importants. Daech sera exclu de la ville. Une ville qui sera totalement détruite, parce que les djihadistes vendront chèrement leur peau, mais surtout qu'ils utilisent des civils comme boucliers. C'est exactement la photocopie de ce qui se passe à Alep. Seulement en Syrie on nous parle de crime contre l'humanité, en Irak on nous ressortira la théorie sur les dégâts collatéraux, une dizaine de milliers de morts et un demi millions de réfugiées, au bas mot, selon les estimations les plus optimistes.
Mais le plus inquiétant c'est l'après. Ce qu'on nous présentera comme une grande victoire contre le terrorisme, ne sera que le début d'une longue déstabilisation de toute la région. Bagdad et Ankara, sont au bord de la rupture, Téhéran est le parrain du régime en place, les Kurdes sont les grands gagnants puisqu'ils ont déjà sécurisé un territoire encore plus élargi.
La Turquie l'affirme haut et fort, elle ne veut pas d'un Etat Kurde dans sa région, celui-ci était prévu dans les accords de Sykes Picot, Ataturk à renégocié à Lausanne la fin de l'empire, contre l'abandon de ces Kurdes. Mais si c'est l'objectif central d'Ankara, il y en a un autre. Reccep 1er qui gouverne un Etat laïc, se veut le chef de file des sunnites. Les monarchies du golfe n'ont pas réussis à vaincre les Houtis au Yémen, elles pèsent epsilon en Irak et les russes sont en train d'offrir une période de survie au régime d'Assad. Au Liban, Hariri a fini par adouber le général Aoun, allié du Hezbollah, à la présidence du Liban. Partout l'Iran avance ses pions sans que l'Occident ou les régimes sunnites puissent le contrer. Tout simplement parce qu'ils ne peuvent aller au clash armé direct.
Les Perses ne sont pas dans un projet religieux, mais dans un projet national, impérialiste. Ils veulent dominer la région et se servent des populations chiites, souvent maltraitées dans leurs pays. Cela dit ils sont plus sincères dans leur lutte contre les takfiristes que les turcs, qui ont longtemps pactisé avec Daech et qui n'en ont fait un objectif, secondaire, que depuis que les Kurdes sont à la frontière. Les peshmergas, surarmés et surentrainés comme gratification de leur trahison de l'Irak et de son intégrité territoriale, par haine de Saddam, sont aussi les plus motivés.
L'Irak et à un degré moindre la Syrie, ne sont plus que le champ de bataille entre ces deux impérialismes. Pendant des siècles l'Orient dit arabe était perse ou turc. C'est un retour de l'histoire. L'Occident n'a aucune vision pour cette région. Sinon il n'aurait pas ouvert la boite de pandore. Les USA et la France se retireront et laisseront la guerre civile en Irak. Elle y est depuis la chute de Saddam. Il n'y a aucune possibilité d'un Irak ou d'une Syrie unies, démocratiques, même sur la base d'un régime confessionnel comme au Liban. L'Iran et la Turquie ne sont pas là pour s'entendre, leurs ambitions stratégiques sont antinomiques, totalement conflictuelles. La victoire romancée de Mossoul, n'est que le début d'un nouveau cycle. La déstabilisation finira par toucher tous les états-nations factices. Dans cette région l'avenir est sombre, c'est une certitude. Le panarabisme, parce qu'il a refusé d'encourager l'émergence des nations a une lourde part de responsabilité. C'est un autre débat.