Putsch de Guinée : Le sort du président renversé en question

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Une affiche géante du chef de la junte guinéenne, le lieutenant-colonel Mamady Doumbouya, qui en dit long sur la personnalité de celui qui est à l'origine du putsch contre le président Alpha Condé, à Conakry le 11 septembre 2021

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Que faire de lui ? Les militaires guinéens ont un choix difficile à opérer : garder en détention Alpha Condé après l'avoir chassé de la présidence ou libérer un homme qui peut encore perturber leur jeu.

En laissant sortir M. Condé, le nouveau maître de Conakry, le lieutenant-colonel Mamady Doumbouya, prendrait un gros risque, préviennent des acteurs de la crise des mois passés, qui prêtent à M. Condé de puissantes amitiés, y compris parmi les dirigeants africains, et une fortune considérable, à même de revenir sur le devant de la scène.

Qu'ils lui rendent ou non la liberté, il faut aussi aux militaires décider s'ils créent ou non les conditions d'un procès futur. 

"Oui, M. Alpha Condé doit rendre des comptes à la justice", dit à l'AFP Foniké Menguè, alias Oumar Sylla, une figure de la contestation contre le troisième mandat de M. Condé, libéré avec plusieurs dizaines d'autres par la junte deux jours après le coup d'Etat, et sorti sérieusement malade de plusieurs mois de détention.

Les forces spéciales guinéennes ont ajouté le 5 septembre le nom de M. Condé à la longue liste des dirigeants africains abruptement déposés par l'armée.

Après l'avoir capturé, les putschistes ont diffusé une vidéo le montrant chemise ouverte, silencieux, mais manifestement prêt, à 83 ans, à rendre les coups le moment venu.

Les militaires ont gardé secret le lieu de sa captivité. Ils ont assuré qu'il était « bien traité ».

Principe "acquis" 

A une mission de la Communauté économique des Etats de l'Afrique de l'Ouest (Cédéao) autorisée à le voir vendredi, qui a indiqué l'avoir trouvé en bonne santé il a dit "qu'il est toujours président. Qu'il faut que la Cédéao le rétablisse", a rapporté une source proche de la délégation sous couvert d'anonymat. 

Le principe d'une libération de M. Condé "est acquis", a affirmé à la fin de la visite la secrétaire générale du ministère des Affaires étrangères, Fanta Cissé, sans qu'apparaisse clairement comment cela pourrait se traduire concrètement. 

Inquiets du risque d'instabilité et de la menace d'une contagion des faits accomplis après deux coups d'Etat au Mali voisin en un an, les dirigeants de la Cédéao ont exigé le respect de l'intégrité physique de M. Condé, "sa libération immédiate et sans condition" et le retour à "l'ordre constitutionnel".

"Nous pensons que M. Alpha Condé devrait pour des raisons de sécurité, pour la Guinée mais pour lui également, rester d'abord avec la junte", dit Abdoudaye Oumou Saw, porte-parole du Front national pour la défense de la Constitution (FNDC), un collectif qui a mobilisé pendant des mois contre le troisième mandat.

"Nous savons toute l'amitié qu'il a avec certains chefs d'Etat de la sous-région. Nous savons qu'il est riche et a tous les moyens de vouloir revenir au pouvoir", dit-il.

Deux des principaux adversaires de M. Condé, les deux ex-Premiers ministres Cellou Dalein Diallo et Sidya Touré, croient aussi à une forte capacité de nuisance de M. Condé. M. Diallo invoque le caractère réputé entier du personnage, qui entretient par ailleurs des relations tendues avec certains dirigeants des pays voisins :"Connaissant M. Alpha Condé, je ne suis pas sûr qu'il puisse rester tranquille".

Faire cesser "l'impunité" 

Abdoudaye Oumou Saw, pour le FNDC, demande qu'il rende des comptes. M. Diallo parle plus globalement de "droit à la justice, droit à la réparation, et puis le pardon finalement".

Souleymane Keïta, député du parti de M. Condé, met en garde contre les "règlements de comptes". "Naturellement, M. Condé doit être libéré, sans condition. La bonne gouvernance, la justice étaient des credo de notre politique", dit-il.