Akhannouch reste attaché à ses priorités tout en luttant contre l’inflation, même l’importée

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“Tout en étant à l’écoute des institutions constitutionnelles du pays, déclare-t-il, le gouvernement reste attaché’’, précise le Chef du cabinet tout de suite après, ‘’à ses priorités’’

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“Le gouvernement est déterminé à appliquer le programme sur lequel il a eu la confiance des citoyens. Nous maintenons et poursuivrons notre action sur sa lancée”, déclare le chef du gouvernement dans un entretien exclusif à Médias24 qui nous a autorisé à reproduire cette déclaration aussi bien que le plaidoyer d’une ‘’source gouvernementale autorisée qui, dans un second temps, indique, elle, que “le recours systématique au levier monétaire à travers les hausses successives du taux directeur n’a pas d’impact sur l’inflation”.

Ainsi, s’il n’a pas souhaité commenter la décision prise par le conseil de Bank Al Maghrib le mardi 21 mars, consistant à relever de nouveau le taux directeur et dans la foulée publier un communiqué qui remet en cause la faisabilité des objectifs de la Loi de Finances 2023, Aziz Akhannouch, apparemment, n’en pense pas moins.

“Tout en étant à l’écoute des institutions constitutionnelles du pays, déclare-t-il, le gouvernement reste attaché, précise le Chef du cabinet tout de suite après, à ses priorités : en 2023, nous avons augmenté le budget de la Santé de 4,5 milliards de DH ; celui de l’Education de 5,5 milliards de DH. Le programme de soutien au logement sera également lancé. Fin 2023, nous serons au rendez-vous pour la protection sociale”, rappelle-t-il. “Nous continuerons cependant à combattre l’inflation, même celle importée ; de même que l’inflation alimentaire, quoique cette dernière, périodique, reste en grande partie tributaire de facteurs climatiques tels que la sécheresse et de la saisonnalité des produits agricoles”.

Pour Aziz Akhannouch, les intentions du gouvernement sont clairs, elles touchent àsur la dynamique économique, tout en poursuivant les réformes dans les domaines notamment de la protection sociale, de la santé et de l’éducation. Le gouvernement garde cependant, insiste le Chef du gouvernement, en tête de ses priorités : l’emploi, l’emploi et l’emploi, sans négliger le combat contre l’inflation, même celle importée.

Pour le détail de ce qui a été fait, la mission a été dévolue à ne source gouvernementale autorisée. Voici ses réponses aux interrogations de Medias 24

L’’inflation

Le Maroc a été impacté par une inflation que notre source ministérielle qualifie “d'importée” au cours de l’année 2022 : les prix à la consommation se sont accrus de 6,6% sous l’effet, d’une part, de sa dépendance extérieure aux produits énergétiques, et d’autre part, de ses besoins en importation de produits céréaliers induits par une sécheresse aigüe, la plus dure depuis 40 ans.

“Les prix à l’importation des combustibles ont été multipliés par près de deux fois entre 2021 et 2022. De même, ceux à l’importation des produits alimentaires ont enregistré une hausse de 40% en 2022. Les prix de la plupart de ces produits sont libellés en dollar américain. Or, le cours du dollar en dirham s’est apprécié, de son côté, de 13% en 2022”.

“En 2022, la hausse des prix à la consommation de 6,6% s’explique donc par la hausse des prix des transports de 12%, des produits alimentaires de 11%, et des prix des produits non alimentaires de 3,9%. En revanche, à partir du mois de janvier 2023, les prix des produits alimentaires ont continué leur hausse, tandis que ceux des produits non-alimentaires et de transport ont enregistré une tendance baissière”, étaie notre source.

La même source attire l'attention sur le fait que les taux d’inflation de 8,9% et de 10%, enregistrés respectivement aux mois de janvier et février 2023, restent victimes d’un effet de base et représentent un point culminant. En effet, les chiffres représentent une comparaison avec les niveaux d’inflation de janvier et février 2022, mois précédant la guerre en Ukraine et enregistrant des niveaux d’inflation normatif.  A l’époque, l’indice des prix à la consommation n’avait pas entamé son envolée, qui ne commencera qu’en mars (voir graphes ci-dessous).

Notre interlocuteur table donc sur une décélération du taux d’inflation au cours des prochains mois, par rapport à janvier et février. Il cite des matières premières qui ont été les moteurs de l’inflation l’année dernière et dont les prix ont baissé depuis cette date, par exemple le cours du Brent qui était ce mardi à 77,64 dollars contre 118,98 un an plus tôt. Il est donc convaincu qu’il y aura un recul de l’inflation.

Le budget et les finances publiques

Au sujet de l’efficacité de la politique budgétaire pour faire face à l’inflation, notre interlocuteur affirme que “la hausse aurait été plus forte en 2022, de l’ordre de 10% ou 11% au lieu des 6,6%, si le gouvernement n’avait pas mis en place des mesures de soutien au pouvoir d’achat, pour des dépenses budgétaires exceptionnelles s’élevant à 60 milliards de dirhams : compensation des produits de base, soutien au prix d’électricité et au transport routier des biens et des personnes, remboursement de la TVA aux petites et moyennes entreprises, etc”.

Malgré toutes ces dépenses imprévues, il nous révèle que le déficit budgétaire a été contenu à 5,1% du PIB au lieu des 5,9% prévus par la Loi de Finances 2022.

Pour 2023, il ajoute que ce qui compte, ce sont les objectifs, pas les hypothèses de base. Surtout que certaines de ces hypothèses seront meilleures que prévu : les charges du budget seront moins lourdes que l’année précédente et que les prévisions, avec le recul des cours des matières premières sur les marchés internationaux, dont dépendent les dépenses de compensation, la baisse des aides aux transporteurs et la hausse des recettes fiscales et douanières de l’Etat. Le gouvernement s’est fixé un objectif de déficit limité à 4,5% du PIB pour cette année. Notre interlocuteur semble convaincu qu’il pourra faire mieux.

L’agriculture et les produits alimentaires

Comment expliquer alors la hausse de l’indice des produits alimentaires, de 20,8% en douze mois ? Est-ce que cela ne reflète pas un échec des politiques agricoles? est-ce que le Maroc n’a pas besoin de nouvelles réformes agricoles pour produire moins cher ?

Notre source voit deux raisons à cette hausse: la problématique de l’eau et la cherté des intrants agricoles. La première est liée à la sécheresse et donc au réchauffement climatique. La seconde est importée.

En effet, “les tensions sur l’offre au niveau du marché intérieur, notamment l’offre des produits alimentaires, sont dues à une sécheresse désormais structurelle d’une part, et à la hausse des coûts des intrants importés, de l’autre”.

Sur la question de la pertinence des politiques agricoles, des constats importants doivent être dressés. “D’abord, ne pas oublier que le Maroc a assuré sa sécurité alimentaire, malgré des conditions climatiques structurellement sévères. Et c’est là, l’impact des politiques agricoles. Il s’agit bien du troisième ramadan consécutif que nous vivons, dans un contexte à la fois de sécheresse et de crises mondiales. Pourtant, tous les produits sont disponibles dans les marchés. Nous sommes aujourd’hui au lendemain de l’année la plus sèche depuis 40 ans. Nos étalages étaient et restent pleins, au moment où des puissances européennes rationalisaient les achats en grandes surfaces. Et il n’y a qu'à revenir aux années 90-00, pour se rendre compte de la différence”, ajoute-t-il.

Ensuite, “la sécheresse est aujourd’hui un phénomène structurel”. Il accuse : “en ce qui concerne le chantier de l'eau, nous avons pris du retard au cours de la dernière décennie”, retard que le gouvernement essaie selon lui, de rattraper.

L'objectif déclaré est de faire dépendre de moins en moins l’agriculture de la pluviométrie. “Et nous sommes d’accord sur une chose : aucune politique agricole, quelqu’en soit la pertinence ou l’efficience, ne peut prospérer sans deux intrants majeurs - l’eau et le foncier”.

Depuis 2008, le Maroc a énormément investi dans les techniques d’irrigation économes en eau. Et c’est ce qui nous permet aujourd’hui, grâce au périmètre irrigué, de garantir notre souveraineté. “Les programmes d’économie en eau d’irrigation ont été pertinents, mais si les barrages ne sont pas suffisamment remplis, ils deviennent insuffisants”.

La source ministérielle aborde le dessalement comme solution d'avenir. “Nous avons accéléré, dès le début de cette mandature, des chantiers demeurés à la traîne depuis plusieurs années : transfert d’eau nord-sud à réaliser dans sa première phase en 15 mois (avec un budget doublé - de 3 à 6 MM DH en raison de la contrainte temps), accélération des unités de dessalement à Casa et Nador, dont les projets accusent 3 à 4 ans de retard… et au total, une dizaine de stations qui parcourent le littoral du Royaume et qui seront lancées incessamment”.

Parallèlement, le gouvernement a entrepris de mieux planifier les plans d’assolement, en partenariat avec les agriculteurs et selon les points forts de chaque région, ce qui permettrait au Maroc de continuer à “assurer sa souveraineté alimentaire”.

Comme nous l'indiquions dans un article précédent, le gouvernement a renforcé le contrôle des marchés, espérant lutter contre les comportements opportunistes et spéculatifs. Notre source admet que des mesures plus structurelles, demandant l’implication de tous les acteurs, notamment dans les territoires, sont à mener. Et cite “la réforme des marchés de gros et l’assainissement des circuits de distribution”, comme des batailles clés.

La campagne agricole

En ce qui concerne l'actuelle campagne agricole, aux facteurs précédents, s’ajoute le froid exceptionnel subi par la région du Souss en janvier-février, les deux mois où elle est la seule productrice de certains légumes et primeurs comme la tomate. Pour la tomate par exemple, seul le Souss en fournit pendant les 4 premiers mois de l’année, avant que d’autres régions comme le Gharb ne prennent le relais. Mais dans deux ou trois ans, le Souss ne sera plus seul puisque le projet agricole de Dakhla qui concerne 5.000 hectares irrigués en eau dessalée, entrera en activité en réservant une grande place à la tomate.

Dans les prochaines semaines, notre source prévoit une détente sur le marché intérieur, avec par exemple les tomates du Gharb et les pommes de terre du Loukkos. Par contre, des problèmes persisteront dans la filière des viandes rouges, car le cheptel a beaucoup souffert de la sécheresse et on ne prévoit pas d’amélioration significative avant 3 à 4 semestres.

L’impact de la hausse du taux directeur

“Le recours systématique au levier monétaire à travers les hausses successives du taux directeur n’a pas d’impact sur l’inflation”, estime notre source. Politique, il accuse: “Toutefois, il a certainement des retombées négatives sur le pouvoir d’achat des Marocains”, car contrairement aux économies avancées où le resserrement de la politique monétaire viendrait agir sur la stabilité des prix en jugulant la demande soutenue par les politiques de soutien de la demande, ces hausses pratiquées dans un contexte où nous vivons des tensions sur l’offre et une stabilité de la demande, n’ont pas de prise directe sur la stabilité des prix et contribuent essentiellement à la cherté des crédits proposés au citoyen.

Le gouvernement estime que “face au contexte inflationniste actuel, la mise en place d’une politique de relance économique et de dynamisation de la croissance est conditionnée par un élargissement des marges de manœuvre économique de l’Etat”. Autrement dit, une politique monétaire dont les objectifs convergent avec les ambitions de relance économique du Royaume.

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