L’hémophilie, une souffrance sans fin, héréditaire, transmise par les femmes et ne touchant que les hommes

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Jusqu’à cette blessure, les parents de Yasser n'avaient aucune idée sur la maladie de leur fils, ni sur ses symptômes, et encore moins sur les complications qui pouvaient en résulter. Mais ces pertes continue de sang et les saignements difficiles à arrêter, ils fini par comprendre qu'il s'agissait de quelque chose "d’anormale’’. Pour apprendre que leur enfant porte une maladie héréditaire lourde qui l’accompagnera ce que durera sa vie. Elle répond à d’un drôle de nom : Hémophilie, philie, élémen

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Par Karima HAJJI (MAP)

Rabat - Naima ne s’attendait jamais à ce qu'une simple blessure de son enfant Yasser, qui faisait à peine ses premiers pas, entraînerait une grave hémorragie qui nécessiterait son transfert à l'hôpital et la mobilisation rapide de toute une équipe, afin de lui prodiguer, de toute urgence, les premiers soins nécessaires pour stopper cette hémorragie, avant que les analyses de laboratoire ne confirment qu'il était atteint d'hémophilie.

Jusqu'à ce moment, les parents de Yasser n'avaient aucune idée sur la maladie, ni sur ses symptômes, et encore moins sur les complications qui pouvaient en résulter, mais avec les pertes de sang et les saignements difficiles à arrêter en raison de cette blessure mineure, ils ont fini par comprendre qu'il s'agissait d'une maladie "anormale".

"Je n'ai jamais entendu parler de cette maladie chronique bien que les médecins m'aient informé qu'elle était héréditaire", a expliqué Naima dans une déclaration à la MAP, notant que le traitement de sa progéniture, amorcé il y a près d’une dizaine d'années, a été marqué du sceau de la douleur et de la peur, après que la plus grande préoccupation de la famille est devenue la protection de son enfant contre toute blessure, aussi légère soit-elle.

Elle n'a pas caché sa grande tristesse après que cette maladie a chamboulé la vie de sa famille en raison de sa nature si particulière et cruelle et de ses coûts de traitement exorbitants, au point qu'elle a privé son fils de jouer, en toute liberté, et de jouir pleinement de son enfance à l’instar de ses pairs.

La souffrance de Naima résume toute la tourmente que vivent la plupart des familles de patients hémophiles à cause de la difficulté de cette maladie, qui touche particulièrement les hommes, de la gravité du diagnostic tardif et du coût très élevé des traitements.

Ainsi, la Journée mondiale de l'hémophilie, célébrée le 17 avril de chaque année, est l'occasion idoine de jeter la lumière sur le combat quotidien que mènent les personnes atteintes de ce trouble héréditaire chronique et leurs familles pour améliorer leur prise en charge dans les hôpitaux et les centres de traitement spécialisés, et d'assurer la disponibilité des médicaments dont elles ont besoin.

A cet égard, Hassan Lamrani Alaoui, président de l'Association marocaine des hémophiles, a précisé qu’il s’agit d’une maladie héréditaire chronique qui atteint le patient dès sa naissance et tout au long de sa vie, ajoutant qu’elle résulte d'une déficience ou d'une absence de facteurs de coagulation sanguine, qui provoquent des hémorragies, mettant ainsi en danger la vie du patient.

Elle provoque également des douleurs articulaires très intenses lorsque le patient souffre d'une hémorragie interne (hématome), a-t-il poursuivi dans un entretien à la MAP, expliquant que lorsque les saignements se répètent, cela entraîne une série de handicaps au niveau des articulations, et donc tout hémophile reste vulnérable au handicap.

La présence de deux centres de référence pour le traitement de l'hémophilie à Rabat et Casablanca, en plus de centres régionaux de traitement dans plusieurs villes et de l'acquisition par le ministère de la Santé et des Centres Hospitaliers Universitaires (CHU) de certains médicaments, s'avère insuffisante et n'inclut pas tous les types d'hémophilie comme l'hémophilie "B", ainsi que les médicaments inhibiteurs.

Statistiquement, selon le ratio mondial de la population, il existe entre 3.000 et 4.000 malades. Le nombre de personnes qui se rendent aux hôpitaux ne dépasse pas 1.200 patients. Ce chiffre est en rapport avec le degré d'infection de certaines personnes.

La gravité de cette maladie est scindée en 3 degrés : grave, modéré et léger, a enchaîné M. Lamrani Alaoui, notant que l’absence d’hôpitaux notamment dans les zones reculées et les villages, ainsi que l’inexistence d’un registre national dédié à cette maladie ne permettent pas l’identification exacte du nombre des personnes atteintes.

"L'hémophilie est une maladie hémorragique et tout saignement entraîne des lésions articulaires ou un afflux sanguin conduisant à la mort. Il faut donc assurer une prise en charge urgente dans les hôpitaux et centres spécialisés avec la nécessité, pour le patient, de disposer des médicaments personnels chez soi", a martelé le président de l'association, ajoutant que "le patient hémophile et sa famille vivent constamment dans la peur d’une éventuelle hémorragie".

Le patient souffre de douleurs psychologiques et physiques quotidiennes en l'absence d’une prise en charge d’ordre physique, psychologique et social pour qu'il puisse être actif au sein de la société, d'autant plus que les souffrances quotidiennes et le handicap l’empêchent de poursuivre ses études, a-t-il souligné, notant que les hémophiles sont dans l’incapacité de réaliser des travaux qui exigent un grand effort physique, ce qui accentue leur inactivité.

Afin d'atténuer les souffrances des personnes hémophiles à travers le Royaume, M. Lamrani Alaoui a appelé à la mise en œuvre optimale du plan national de lutte contre l'hémophilie, notamment les conclusions des journées nationales tenues les 28 et 29 octobre 2019 à Rabat, sous l'égide du ministère de la Santé et de la Fédération mondiale de l'hémophilie, ainsi qu’à l’approvisionnement sans interruption de tous les CHU et centres hospitaliers provinciaux (CHP) et de l’ensemble des centres de traitement d'hémophilie en tous genres de médicaments (Facteur 8- Facteur 9 - Facteur 7 relatif aux inhibiteurs).

Il a également souligné l'importance d'améliorer les conditions d’accueil des personnes atteintes d'hémophilie dans tous les hôpitaux et centres, notamment dans les services d'urgence, et de considérer l'hémophilie comme "très urgente", sachant que si le patient est pris en charge de façon urgente, le coût du traitement régresse grandement, ce qui nécessite de disposer des traitements préventifs "Prophylaxie" et des médicaments au domicile du patient.

Il a, en outre, insisté sur l'impératif de conclure des partenariats inclusifs et agissants avec les institutions gouvernementales (ministères, directions, conseils régionaux, associations, CHU et CHP, centres de traitement) afin de mettre en exécution le plan national dédié aux personnes atteintes d'hémophilie, à travers la contribution à l'achat des médicaments et à l’acquisition du matériel, l’équipement et le soutien des centres de traitement des patients dans toutes les régions, l’appui de l'Association marocaine des hémophiles et de ses sections, en tant qu’association d'intérêt public afin de garantir une assistance sociale et un accompagnement permanent aux personnes atteintes et à leurs familles dans toutes les régions du Royaume.

M. Lamrani Alaoui a, d’autre part, appelé à la mise en place d'un registre national des personnes hémophiles, qui permettra leur recensement et la définition de leurs besoins, affirmant qu'il existe des indicateurs, dans ce sens, émanant du ministère de tutelle.

L'Association marocaine des personnes atteintes d'hémophilie œuvre actuellement à la préparation de son propre registre avec le soutien de la Fédération internationale de l'hémophilie.

 

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