Les dépenses des géants de la tech dans l'IA inquiètent les marchés

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"Nous pensons que pratiquement toutes les applications que nous connaissons aujourd'hui vont être réinventées grâce à l'iA. C'est probablement le plus grand changement technologique pour les entreprises depuis internet." (Andy Jassy)

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Entre 60 et 65 milliards de dollars pour Meta, 75 milliards pour Google, qui dit mieux ? Plus de 100 milliards pour Amazon ! Les géants des technologies viennent d'annoncer leurs dépenses en capitaux pour 2025, principalement consacrées à l'intelligence artificielle (IA), et les marchés s'inquiètent.

Amazon a révélé jeudi qu'il compte investir environ 26 milliards de dollars par trimestre cette année dans sa filiale AWS (numéro un mondial du cloud) et dans l'IA traditionnelle (traitement des données) et générative (agents conversationnels, créatifs, etc).

L'IA, "c'est une opportunité dans les affaires qui ne se présente qu'une seule fois dans la vie", a déclaré Andy Jassy, le patron du groupe de Seattle, pour justifier ces montants lors d'une conférence aux analystes.

"Nous pensons que pratiquement toutes les applications que nous connaissons aujourd'hui vont être réinventées grâce à l'IA", a-t-il continué. "C'est probablement le plus grand changement technologique pour les entreprises depuis internet."

Devançant d'inévitables questions au sujet des retours sur investissement, il a expliqué avoir besoin des équipements informatiques, serveurs et puces pour pouvoir en tirer des revenus.

"Et nous ne les achetons que si nous voyons des signes manifestes en termes de demande", a-t-il insisté.

A Wall Street, l'action d'Amazon perdait plus de 4% lors des échanges électroniques après la clôture de la Bourse, une chute principalement liée aux prévisions décevantes de sa plateforme de vente en ligne pour le trimestre en cours.

Situation "préoccupante" 

Comme aux deuxième et troisième trimestre, les recettes d'AWS ont bondi de 19% en fin d'année.

"Amazon a montré qu'il est le roi du cloud", a réagi Matt Britzman, analyste d'Hargreaves Lansdown. "Microsoft et Alphabet (Google) sont sur ses talons à essayer de lui voler la couronne (...) mais AWS est le seul à avoir été à la hauteur des attentes".

Google Cloud a eu beau doubler son bénéfice opérationnel au quatrième trimestre, le ralentissement de sa croissance a pénalisé l'ensemble du groupe à la Bourse de New York.

L'action de la société californienne a particulièrement dévissé quand elle a annoncé 75 milliards de dollars de dépenses en 2025.

Les résultats de Microsoft ont aussi été jugés insuffisants la semaine dernière, d'autant que la société informatique a alloué 80 milliards de dollars sur un an pour construire de nouveaux centres de données, considérés nécessaires à la nouvelle génération d'IA.

"Microsoft a connu un bon trimestre", a commenté Jeremy Goldman, analyste chez Emarketer, "mais ce n'est pas ce que les investisseurs attendent d'un géant de l'IA qui dépense comme s'il construisait la +Death Star+," la station spatiale de la taille d'une planète dans les films de la Guerre des Etoiles.

Meta (Facebook, Instagram) s'en est mieux sorti, sans pour autant susciter d'enthousiasme à Wall Street.

"Ses perspectives de chiffre d'affaires pour le premier trimestre sont inférieures aux estimations, et l'entreprise prévoit des dépenses exorbitantes dans l'IA en 2025", comprises entre 60 et 65 milliards de dollars, a souligné l'analyste indépendante Debra Aho Williamson. "La situation est donc préoccupante".

"DeepSeek ne change rien" 

Le marché aurait peut-être fait preuve de plus d'indulgence si la start-up chinoise DeepSeek n'avait pas soudainement rebattu les cartes.

Son nouveau modèle d'IA générative, sorti il y a deux semaines, a montré qu'il était possible de rivaliser avec les agents IA dominants tels que ChatGPT (OpenAI) et Gemini (Google), pour une fraction des coûts.

DeepSeek n'avait pas accès aux puces les plus sophistiquées de Nvidia utilisées par les groupes américains pour entraîner leurs modèles, et interdites à l'exportation vers la Chine. Elle a donc innové avec des méthodes différentes et des puces Nvidia autorisées et moins chères.

Selon Andy Jassy, les coûts vont baisser pour toutes les entreprises, "mais ensuite elles réaliseront qu'elles peuvent construire d'autres choses qu'elles ne pouvaient pas se permettre auparavant, et au final elles dépenseront beaucoup plus".

C'est aussi l'avis de Dan Ives: "DeepSeek ne change rien aux investissements dans l'IA de l'ordre de 2.000 milliards de dollars que vont réaliser Nvidia, Microsoft, Google, Amazon, Palantir, ServiceNow, Salesforce, Oracle, TSMC et d'autres dans les trois prochaines années", a écrit l'analyste de Wedbush.

"Les modèles vont devenir moins chers et se banaliser (...) mais la valeur réside dans les données, les cas d'utilisation, le raisonnement algorithmique et l'hébergement des outils d'IA", a-t-il détaillé.

Il a comparé DeepSeek à Temu, plateforme chinoise de e-commerce à prix cassés. "Temu était censé +détruire Amazon+, mais Amazon s'est adapté, et regardez où ils en sont aujourd'hui". (Quid avec AFP)

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