Transferts des migrants africains : Le Maroc plaide à Genève pour un processus multilatéral et l’interconnexion des systèmes de paiement

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Les envois de fonds constituent un moteur de croissance – non exploité de manière optimale

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Genève - L’ambassadeur Omar Zniber, Représentant permanent du Royaume du Maroc auprès de l’ONU-Genève et de l’Organisation mondiale du Commerce (OMC), a souligné, mercredi à Genève, l’importance d’"un processus multilatéral" pour soutenir la dynamique des flux de transfert de fonds de la diaspora africaine.

M. Zniber qui présidait un panel initié par la Mission permanente du Maroc auprès de l’ONU à Genève, dans le cadre du Forum public de l’OMC, a indiqué que le Maroc propose  "un processus multilatéral, tout en associant les Organisations Internationales, notamment l’OMC, la Banque Mondiale, l’Organisation internationale du travail (OIT) et l’Organisation internationale pour les migrations (OIM)".

Il s’agit de "mener une réflexion d’ensemble sur les leviers et mesures à même de soutenir la dynamique des flux de transfert de fonds, de remédier aux faibles niveaux d’inclusion financière de la diaspora africaine, de garantir un travail décent pour tous les migrants et d’accélérer les efforts de réduction des coûts y associés, et ce en vue de s’aligner sur les Objectifs de développement durable de 2030 et sur l’objectif 20 du Pacte Mondial pour des Migrations sûres, ordonnées et régulières", a précisé l’ambassadeur.

Il a rappelé à cet égard que le Roi Mohammed VI, leader de l’Union Africaine sur les Questions Migratoires, avait souligné à l’occasion de la 35ème session de la Conférence des Chefs d’État et de Gouvernement de l’Union Africaine, que "l’Afrique est le précurseur de la nouvelle gouvernance migratoire voulue par le Pacte de Marrakech", insistant sur l’impératif de faire en sorte que "les migrants ne soient pas les oubliés du développement et des pandémies mais au contraire le centre de gravité de politiques migratoires responsables, solidaires et conformes aux 23 objectifs du Pacte de Marrakech".

Pour M. Zniber, l’organisation de ce panel de haut niveau sous le thème "Transferts de fonds des migrants, commerce inclusif et développement”, reflète l’intérêt accordé par SM le Roi à la question migratoire.

La réunion à laquelle ont pris part entre autres l’OMC, l’OIT, l’OIM ou encore la Banque Mondiale, représente, à ses yeux, une occasion idoine pour échanger sur les facteurs qui "contribuent au coût élevé des envois de fonds", alors que la coopération entre les différentes Organisations onusiennes et Internationales, est "plus que jamais nécessaire dans une conjoncture mondiale en mutation rapide, à plusieurs niveaux, géopolitique, économique, commerciale et technologique".

"Dans le cadre de cette mutation des chaînes de valeurs et/ou du Commerce mondial en terme général, il y a un besoin de se re-mondialiser (thématique du Forum Public 2024 de l’OMC), et pour y parvenir, les États ainsi que les décideurs internationaux doivent prendre des décisions éclairées, notamment les pays en développement et les pays les moins avancés, en vue d’accompagner cette transition et faire face aux nombreux défis qui en découlent", a plaidé le diplomate marocain.

Dans ce contexte, a-t-il relevé, les enjeux économiques des migrations, qui sont à la fois une réponse et un défi pour les économies, obligent d’évaluer de nouveaux modèles/canaux innovants, digitaux et inclusifs qui pourraient potentiellement transformer les marchés, de façon à optimiser le processus opérationnel d’envoi de fonds et le rendre moins coûteux dans une optique de développement durable, d’investissement productif et de commerce inclusif.

Et de rappeler que les États membres des Nations Unies se sont engagés dans le cadre de l’objectif 20 du Pacte Mondial pour des Migrations sûres, ordonnées et régulières, adopté à Marrakech en décembre 2018, de rendre les envois de fonds plus rapides, plus sûrs et moins coûteux tout en favorisant l’inclusion financière des migrants.

Pour M. Zniber, les envois de fonds constituent un moteur de croissance – non exploité de manière optimale- et un instrument pour le développement durable et de Co-développement dans le cadre de la coopération Nord-Sud et Sud-Sud, d’autant plus que les transferts des migrants vers leur pays d’origine représentent au total trois fois le montant investi par l’aide publique au développement.

Les travailleurs migrants demeurent un moteur de développement humain et de croissance économique comme en témoigne l’augmentation de plus de 650% des rapatriements de fonds internationaux entre 2000 et 2022, passés de 128 milliards de dollars US à 831 milliards de dollars US. Sur ces 831 milliards de rapatriements de fonds, 647 milliards ont été envoyés vers des pays à revenu faible ou intermédiaire.

La réduction du coût des transferts de fonds, constitue néanmoins un enjeu majeur pour de nombreux économies des pays en développement et des pays les moins avancés.

À l’échelle mondiale, le coût du transfert de 200 dollars était, en moyenne, de 6,2 % au quatrième trimestre de 2022, soit plus du double de la cible de 3% fixée par les Objectifs de développement durable, selon la base de données de la Banque mondiale sur le coût des transferts d’argent dans le monde. Ce coût est plus important pour les pays africains, avec une moyenne qui s’élève à 8%.

Coïncidant avec le 30e anniversaire des Accords de Marrakech instituant l’OMC, le panel de haut niveau organisé par la Mission permanente du Maroc auprès de l’ONU à Genève a été retenu parmi un nombre record de plus de 300 candidatures reçues pour le Forum public 2024, l’un des plus grands événements de sensibilisation de l’organisation.

Il a été notamment l’occasion pour l’OMC, le système des Nations Unies pour le développement et les migrations et les institutions financières internationales de mener une réflexion sur des mesures efficaces pour renforcer la coopération afin de réduire le coût des transferts de fonds.

L’interconnexion essentielle pour réduire les délais, les coûts et la sécurité des transferts

Le Directeur général de Bank Al-Maghrib, Abderrahim Bouazza, a plaidé mercredi pour l’interconnexion des systèmes de paiement africains avec les plateformes de règlement des pays d’accueil des migrants, afin qu’ils soient orientés vers l’investissement productif.

"Cette interconnexion s’avère essentielle pour réduire les délais, les coûts et la sécurité des transferts", a souligné M. Bouazza lors d’un panel initié par la Mission permanente du Maroc auprès de l’ONU à Genève, dans le cadre du Forum public de l’Organisation mondiale du commerce (OMC), qui se tient du 10 au 13 septembre au siège de l’Organisation.

Il a relevé que l’adoption dans de nombreux pays des systèmes de paiement instantané, basés sur des solutions alternatives à l’argent liquide et à faibles coûts, a ouvert la voie à une concurrence accrue dans le marché des transferts.

"Ces systèmes ont le potentiel d’amener de nombreuses personnes dans le système financier et d’être pertinent pour les paiements et transferts transfrontaliers interopérables", a-t-il précisé au cours de cet évènement présidé par l’Ambassadeur représentant permanent du Royaume à Genève, Omar Zniber.


C’est dans cette perspective, a-t-il dit, que les Banques centrales africaines, dont BAM, sont en train d’unir leurs efforts pour intégrer leurs systèmes de paiement au système continental PAPSS "Pan African Payment and Settlement System". L’ambition première est de soutenir le commerce dans le cadre de la Zone de libre-échange africaine (ZLECAF), a-t-il indiqué, notant que le système PAPSS permet le règlement instantané en devises locales en fonctionnant 24h/24 et 7j/7.

Selon M. Bouazza, Bank Al-Maghrib a mis en place en 2023 le système de paiement instantané et est en phase de mettre à niveau son système de règlement en temps réel, dans l’objectif de réunir les conditions requises pour qu’il soit interopérable avec des plateformes régionales.

Il a dans ce contexte fait observer qu’en dépit de leur amélioration globale, les transferts des migrants en Afrique continuent à faire face à des défis nécessitant une mobilisation plus importante des parties prenantes, dont les institutions de l’ONU, les gouvernements et les Banques centrales.

Parmi ces défis, le responsable a cité la nécessaire mobilisation des institutions concernées sur les corridors des transferts les plus vulnérables et les plus coûteux, ainsi que sur le développement de l’inclusion financière et digitale, en vue de contrer les transferts informels.

Au Maroc, a-t-il noté, l’amélioration des transferts des Marocains résidant à l’étranger bénéficie d’un écosystème de transferts de plus en plus compétitif.

Il a d’autre part mis l’accent sur l’optimisation des flux financiers des migrants pour que le potentiel de leur utilisation puisse avoir un impact plus important sur le développement des pays du continent. "Des enquêtes ont montré que les migrants seraient enclins à augmenter leurs transferts quand les conditions économiques dans leur pays d’origine sont favorables", a-t-il soutenu.

Les discussions lors de ce panel, placé sous le thème: "Transferts de fonds des migrants, commerce inclusif et développement”, ont été axées notamment sur les facteurs à l’origine du coût élevé des transferts de fonds, la fracture numérique, la non-digitalisation des paiements, les faibles niveaux d’inclusion, le manque de transparence et de régulation du secteur et les marges appliquées aux conversions de devises.

Ont également pris part aux débats le directeur général adjoint de l’OMC, Xiangchen Zhang, la sous-directrice générale des relations extérieures et institutionnelles à l’Organisation internationale du travail (OIT), Laura Thompson, la directrice générale adjointe de l’Organisation internationale pour les Migrations, Ugochi Daniels, la Représentante Spéciale de la Banque Mondiale auprès de l’ONU et de l’OMC à Genève, Maria Dimitriadou, et l’ambassadeur représentant permanent du Togo à l’ONU, Yackoley Kokou Johnson.

Cet événement qui coïncide avec le 30e anniversaire des Accords de Marrakech instituant l’OMC, a été retenu parmi un nombre record de plus de 300 candidatures reçues pour le Forum public 2024, l’un des plus grands événements de sensibilisation de l’organisation.

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