Covid-19 : Vaccination et corruption

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Abdelouafi Laftite, ministre de l’Intérieur, et son collègue à la Santé Khalid Aït Taleb

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A peine la campagne de vaccination contre le Covid-19 entamée que deux cas de triche avec les critères ont été dévoilés par les autorités. Le premier, à Taza, concerne huit personnes et a donné suite à des mesures coercitives en attendant les poursuites judiciaires. Le deuxième a impliqué un membre de la chambre d'industrie, de commerce et des services (CCIS) de Marrakech « grâce » à sa femme, une pharmacienne. Il serait intéressant d’en connaitre l’âge et l’état de santé. On verra plus loin pourquoi.

Sur les 126 mille vaccinations effectuées à ce jour (1 février à 15h), on pourrait considérer que c’est epsilon. Il n’en est rien. Et la publicité que l’Administration territoriale a donnée à ces cas indique bien qu’elle a conscience des risques de passer sous silence toute contravention aux règles édictées. 

Les deux infractions révélées jusque-là constituent des clusters de corruption à très forte contagiosité dans une trame sociale prompte au contournement des lois, sensiblement exposée aux passe-droits, au népotisme et autres favoritismes. Corruption s’entend ici dans le large spectre de ses significations qui vont de la putréfaction à la pestilence, de l’abâtardissement à l’avilissement en passant par la dépravation et la perversion. 

Dans l’absolu, ce type de comportements est déjà dangereux par le simple fait que dans l’ambiance pandémique où les citoyens sont appelés, parallèlement à l’angoisse au quotidien, à supporter plus qu’ils n’en peuvent, les nerfs sont à fleur de peau. 

Mais pour dangereux qu’il est, il aussi, accessoirement, significatif, parce qu’après avoir vendu à l’opinion publique une immunisation collective à l’orée du printemps, les autorités ont dû revoir leur ambition pour les Marocains à la baisse. De l’immunité collective elles ont glissé vers le slogan d’une campagne graduelle sans échéancier ; et de la vaccination dans une première étape des corps de sécurité, du personnel médical, des effectifs de l’enseignement et des personnes âgées de plus de 65 ans et à risque, elles ont réduit les personnes cibles à 75 ans pour les séniors, à 45 ans pour l’enseignement et à 40 ans pour le front médical.  Si bien que les personnes de plus de 65 ans, plus exposés aux comorbidités et plus sensible au coronavirus, ne comprennent pas qu’ils soient des laissés pour compte. De là à ce qu’elles soient tentées par l’égoïsme et le sauve-qui-peut, il n’y a qu’un fil que certains pourraient franchir sans mauvaise conscience aucune. 

Ce ne sont pas des reproches, les décideurs marocains ne sont pas responsables si l’offre en vaccins n’a pas été à la hauteur des capacités logistiques et humaines du Maroc. Mais le contexte étant ce qu’il est, on peut comprendre sans l’accepter le recours à la combine et la colère qui pourrait se saisir des mis en stand-by si les dérogations et les contournements des critères venaient à prospérer ou l’attente à se prolonger, d’autant plus qu’il n’y a aucune visibilité sur les prochaines livraisons. 

Les tensions qu’exercent la demande mondiale sur le marché des vaccins contre le Covid-19 n’incitent pas à l’optimisme. Et pendant que les variants anglais, sud-africains, brésiliens etc. font craindre une nouvelle vague encore plus virulente, le pronostic d’une fin prévisible à terme de la pandémie s’éloigne. C’est dire que les choses ne s’annoncent pas sous les meilleurs auspices. 

Aux dernières nouvelles, le gouvernement britannique qui se fournit déjà auprès de Pfizer-BioNtech, Moderna et Astrazeneca, a ainsi pris une option sur 40 millions de doses supplémentaires du candidat-vaccin contre le Covid-19 de Valneva pour 2022, portant à 100 millions le nombre total de doses commandées auprès de ce laboratoire austro-français avec lequel il a signé en septembre un partenariat portant sur un potentiel de 190 millions de doses. Il conserve par ailleurs des options pour 90 millions de doses supplémentaires livrables entre 2023 et 2025.

2025 ! Il faut espérer que d’ici-là, la production et l’offre vaccinales se seront multipliées et auront atteint une vitesse de croisière suffisante pour faire baisser la tension sur les marchés. Mais en attendant de voir plus clair dans l’avenir, les autorités marocaines sont appelées à rester sur le qui-vive, advienne que pourra, et sur tous les fronts, quoi qu’il arrive, pour préserver les acquis que le Royaume a engrangés dans sa gestion de la pandémie.    

 Lire : COVID: LONDRES PREND DES OPTIONS SUR LES VACCINS JUSQU’À 2025