Inconfort éthique - Par Samir Belahsen

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Je suis d´un autre pays que le vôtre, d´un autre quartier, d´une autre solitude / je m´invente aujourd´hui des chemins de traverse. Je ne suis plus de chez vous. J´attends des mutants / Biologiquement, je m´arrange avec l´idée que je me fais de la biologie : je pisse, j´éjacule, je pleure / Il est de toute première instance que nous façonnions nos idées comme s´il s´agissait d´objets manufacturés / Je suis prêt à vous procurer les moules. Mais.../. La solitude... /La solitude... (Léo Ferré)

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Vous avez dit coup d'État ? Par Dr Samir Belahsen

« Toute la philosophie est comme un arbre dont les racines sont la métaphysique, le tronc est la physique, et les branches qui sortent de ce tronc sont toutes les autres sciences qui se réduisent à trois principales, à savoir la médecine, la mécanique et la morale. »

René Descartes / Principes de la philosophie,1644

« Nous avons besoin d’une éthique ou d’une foi, ce qui fait rire les idiots ; ce n’est pas un besoin de croire à autre chose, mais un besoin de croire à ce monde ci, dont les idiots font partie. »

Gilles Deleuze/L’Image-temps,1985

Que dire et que faire quand on se retrouve dans une assemblée ou toute expression sincère de ses convictions ne peut que heurter l’assistance ? 

L’assemblée peut être réelle ou virtuelle, familiale, professionnelle, mondaine, académique, partisane, amicale…

Se taire peut paraitre comme la première option. « L’opinion est du genre du cri », disait Platon. Garder le silence pesant, être hypocrite par omission, ne pas assumer ses convictions différentes, ce serait assumer sa lâcheté paisible et oublier l’éthique et il ne manquerait que de se trouver des justifications pour bien dormir. La classe, disait Sandrine Filassier, c'est de garder le silence devant le ridicule. 

La deuxième option serait de faire fi de ce que l’assistance peut penser ou faire, défendre ses convictions bec et ongle, se permettre d’être en accord avec soi, en désaccord avec le vacarme ambiant et le dire et le crier s’il le faut… Cette option peut offrir un certain confort dans l’adversité.

La troisième option que conseilleraient ces « coach » des temps modernes pour sortir du dilemme peut être schématisée ainsi :

  1. Affirmer que vous comprenez toutes les positions et que vous les trouvez intéressantes et défendables.

  2. Exprimer la difficulté de prendre position, rien n’est évident…

  3. Indiquer que votre position n’est pas définitive ni tranchée, qu’elle pourrait évoluer.

  4. Exprimer votre position en y mettant un peu de scepticisme et un peu de doute.

  5. Ajouter une phrase du genre « Peut être que je m’emballe » ou même que « je me trompe » pour mettre un peu de distance entre vous et votre conviction.

En choisissant cette option, il convient de ne pas faire trop long, ni de faire de l’embrouille au risque de paraitre comme quelqu’un qui parle pour ne rien dire ou qui choisit de ne pas choisir…

La quatrième option, la plus radicale, serait de se dire : En définitive, cette assemblée n’est pas mienne du moment que je ne peux m’exprimer spontanément sans heurter les convictions des uns et les intérêts des autres. A quoi bon de supporter l’inconfort éthique ?

Le risque est de se retrouver sans assemblée, seul, sans clan.

Si “La solitude est une tempête de silence qui arrache toutes nos branches mortes”, comme disait Khalil Gibran, Lao She remarquait que “La solitude est une prison.”

Dans la pratique, ces quatre options de comportement face à l’inconfort éthique coexistent en chacun avec des degrés et des dosages différents et évolutifs.