L’heure de vérité

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Aziz Akhannouch lors du meeting de Casablanca mercredi 2 juin 2021

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Mercredi 9 juin 2021, salle couverte de Bourgogne dans la moiteur casablancaise d’un été prématuré qui s’annonce pas comme les autres. Difficilement, il contient l’émotion qui le submerge à la fin de son discours. Ses traits qui se contractent, son teint halé qui brunit un peu plus, trahissent furtivement la garavité de l’instant. Sur l’estrade au milieu de la salle, qui lui donne un champ de déplacement de 360°, il essaye de donner le change, répond aux applaudissements par des applaudissements, bouge de chaque coté de l’auditoire, et n’a peut-être qu’une envie, que ça se termine. 

En clôturant un show à l’américaine de plus de deux heures, où l’on a vu passer Nawal Moutawakil, Mohamed Boussaid, Rachid Talbi Alami, et deux jeunes au féminin et au masculin, Aziz Akhannouch a-t-il vu défiler dans sa tête les images du chemin parcouru depuis qu’un samedi 29 octobre 2016, à Bouznika, il est devenu le président parachuté d’un Rassemblement National des Indépendants en déliquescence ? 

En cinq ans, pratiquement au pas de charge, de parachuté il est devenu sauveur, restructurant le parti et lui donnant de la visibilité, des organisations parallèles et des relais dans les différentes catégories socio-professionnelles, se dépensant sans compter et remettant enfin en ordre de marche une formation qui avait perdu en cours de route ses objectifs et sa raison d’être. Une action soutenue avec l’ambition sans mystère de prendre la tête du champ politique national. 

Cinq, le chiffre conjurateur 

Rançon de la gloire ? En moins de temps qu’il ne faut pour le dire, il était devenu l’homme à abattre. Aucune attaque, quand ce n’est pas des avanies, ne lui a été épargnée. Et voilà que l’heure de vérité n’est qu’à quelques foulées dans ce que Nawal Moutawakil a appelé une course de fond. Moins d’une douzaine de semaines le séparent du moment fatidique où il lui faudra vérifier si le travail a payé ou ça été peine perdue. Pour l’instant et aux dernières nouvelles, il ne répondra pas aux dernières attaques, décidé, dit-il, à ne pas se laisser distraire de l’essentiel.

Talbi Alami, un Rniste ambitieux de la première heure, devenu avec le temps qui passe et la sélection naturelle la mémoire de la formation fondée en 1978 par Ahmed Osman, témoigne de cet acharnement dans l’action devant un public acquis. A la fois homme lige de l’actuel président et « faucon de garde » prêt à  fondre sur les « agresseurs », il affirme en substance qu’entre le RNI d’aujourd’hui et le RNI d’avant, c’est le jour et la nuit. 

Ce jour-là à Casablanca, le Rassemblement est à sa cinquième et dernière étape d’exposition de son programme électoral. Sans surprise, c’est à l’autre homme lige, l’ancien ministre de l’Economie et des Finances, Mohamed Boussaïd, qu’il est revenu d’en décliner les contours. Cinq engagements, comportant chacun cinq mesures, en tout vingt-cinq promesses : Une protection sociale digne de ce nom, un système de santé qui comble les attentes des marocains, une école de l’égalité, des emplois à la hauteur des besoins nationaux et une administration efficiente et réactives aux demandes des citoyens. 

En somme des engagements qu’aucun parti ne saurait renier. Faux, s’écrie Mohamed Boussaïd. Pour le RNI ce sont des engagements chiffrés à hauteur de 55 milliards de dhs par an sur cinq ans, un budget additionnel, que les futurs ministres du Rassemblement qui se font prévaloir de leur savoir-faire technocratique, iront chercher en dehors des augmentations fiscales. En écho, Aziz Akhannouch se dira un peu plus tard prêt à toute confrontation pour en débattre.

Le rêve possible 

Quand on veut on peut, est le crédo de Mohamed Boussaïd qui prend exemple sur le financement des autoroutes ou encore de Tanger-Med. Et c’est aussi celui de Nawal Moutawakil pour qui Pouvoir c’est d’abord Vouloir. Rien d’étonnant de ce petit bout de femme, frêle de moins d’un mètre soixante sur laquelle personne n’aurait misé un kopeck troué, dit-elle. Une légende vivante, aura auparavant rectifié le modérateur du meeting. Et rien, non plus, de surprenant que ce soit à elle qu’a été dévolue la tâche de démontrer la dialectique vouloir/pouvoir. 

Du haut de sa médaille d’or arrachée aux jeux olympiques de Los Angeles en 1986, elle explique qu’issue d’une famille modeste, précisément dans ce quartier Bourgogne, pas très loin de Laouina lharra, c’est de son vouloir qu’elle a pu. Poursuivre des études aux Etats Unis d’Amérique. Devenir par deux fois ministre. Se faire élire à la Chambre des représentants. Décrocher le poste de vice-présidente du Comité International Olympique. Rien que ça et le reste à l’avenant. Qui dit mieux ? Peu de monde. Ainsi, si pour Lénine le rêve est révolutionnaire, pour Nawal aucun rêve n’est impossible. Et quand c’est elle qui le dit, on ne demande qu’à la croire. 

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