''Calme et belle'': les dernières hôtesses du football thaïlandais sur le terrain des préjugés

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Photo prise le 9 mars 2024 montre les Rabbit Girls animant les médias sociaux avant le match de football de la Ligue 1 thaïlandaise du BG Pathum United FC contre Sukhothai au stade BG de Pathum Thani. Dans un stade de Bangkok en ébullition, les "Rabbit Girls" du BG Pathum United dansent au rythme des tambours et encouragent leur équipe - le dernier groupe de promotrices de la ligue de football thaïlandaise. (Photo Lillian SUWANRUMPHA / AFP)

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Sois "calme et belle": en Thaïlande, le dernier groupe d'hôtesses employé par un club de football affronte, les jours de match, les stéréotypes sexistes qui persistent dans le royaume.

"Nous sommes des ambassadrices de la marque, donc c'est important pour nous d'avoir une bonne apparence", explique Phatlita Lertphaholphat, 29 ans, en maquillant son visage avec des paillettes et d'autres produits cosmétiques.

"En restant calme et belle", l'ambiance "s'adoucit" dans le stade dominé par un public masculin, remarque-t-elle.

La jeune femme appartient à l'escouade des "Rabbit Girls" qui participe à l'animation des rencontres jouées à domicile par le BG Pathum Thani United, une équipe de première division de la banlieue de Bangkok.

En Thaïlande, il n'est pas rare de croiser à des événements promotionnels des hôtesses choisies pour leur plastique, à rebours de ce qui peut se passer ailleurs dans le monde, au nom de la lutte contre les préjugés de sexe.

La Formule 1 a abandonné les "grid girls" et le Tour de France les "miss" sur les podiums, mais dans le royaume d'Asie du Sud-Est, les mentalités mettent du temps à évoluer, selon des expertes interrogées par l'AFP.

L'idée répandue veut que "les hommes excellent dans les sports, pendant que les femmes assurent le divertissement", résume Naiyana Supapung, une militante pour les droits des femmes.

"C'est comme si le capitalisme et le patriarcat se serraient la main" au sujet des hôtesses, renchérit Sukrittaya Jukping, professeure des études de genre à l'université Thammasat, à Bangkok.

La vingtaine de "Rabbit Girls" sont choisies chaque année par les fans, parmi des centaines de candidates qui doivent être célibataires et âgées de moins de 30 ans.

Réseaux sociaux 

Danses diffusées sur TikTok, messages de prévention pour le tri des déchets, encouragements, photos... Les jours de match, elles quadrillent le terrain, les tribunes et les abords du stade pour faire monter l'ambiance auprès des quelque 6.000 spectateurs.

"Les femmes sont meilleures pour proposer ce genre de divertissement", estime Nopparuj Charoensuk, un supporter de 19 ans, croisé avant un match de championnat début mars.

Le BG Pathum Thani United est le dernier club de Thaïlande à employer des hôtesses -- les autres ont abandonné l'idée pour des raisons financières.

La responsable du club en charge des "Rabbit Girls" se défend d'utiliser les jeunes femmes comme des objets, et assure leur confier des tâches modernes en phase avec l'ère des réseaux sociaux.

"Quand nous cherchons la nouvelle génération de +Rabbit Girls+, nous cherchons des femmes talentueuses avec des qualités pour s'exprimer", explique Nittayaporn Tharasuk, directrice des partenariats, du marketing et de la communication.

Les hôtesses sont payées entre 20.000 et 30.000 bahts par mois (510 à 750 euros), et beaucoup d'entre elles ont un autre travail à côté.

"Il y a des compétences que j'ai apprises dans ce métier, comme parler en public et gérer le temps", explique Phatlita Lertphaholphat, qui parvient à mettre de l'argent de côté, tout en soutenant sa famille.

L'expérience est plus précieuse que l'apparence, poursuit-elle. "Je pense faire ça encore deux ans, et après j'aimerais créer ma propre entreprise." (AFP)

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