L'action humanitaire paralysée à Gaza, quasi coupée du monde, selon des ONG

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Une femme pleure le corps de son enfant décédé des suites de ses blessures lors d'un bombardement sur un camp de personnes déplacées, dans le service de traumatologie de l'hôpital des Martyrs d'Aqsa à Deir el-Balah, dans le centre de la bande de Gaza, le 11 mai 2024, alors que le conflit se poursuit dans le territoire palestinien entre Israël et le Hamas. (Photo par AFP)

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Les organisations internationales craignent de ne pouvoir maintenir leurs opérations humanitaires dans la bande de Gaza dévastée par la guerre, entravées par la difficulté de faire entrer de l'aide et les multiples contraintes logistiques.

"Il y a énormément de besoins, et il y en aura de plus en plus, et de moins en moins d'accès à la population donc c'est de plus en plus urgent" d'apporter une réponse humanitaire, résume le responsable d'une ONG européenne demandant à rester anonyme.

La bande de Gaza est quasi coupée du monde depuis une semaine et l'entrée de l'aide pratiquement interrompue depuis que l'armée israélienne a commencé des opérations terrestres à Rafah, ville de l'extrême sud de la bande de Gaza où sont massées des centaines de milliers de personnes, habitants et déplacés par plus de sept mois d'une guerre.

Après la prise de contrôle le 7 mai par l'armée israélienne du côté palestinien du point de passage de Rafah, Israéliens et Egyptiens se renvoient la responsabilité de la paralysie de ce passage crucial par où entrait depuis l'Egypte l'essentiel du carburant indispensable aux infrastructures et à la logistique humanitaire dans un territoire assiégé et privé d'électricité.

Processus compliqué 

Fermé plusieurs jours début mai, Kerem Shalom, principal point d'entrée de l'aide, est officiellement ouvert, mais les organisations humanitaires affirment ne pas pouvoir y collecter l'aide entrant depuis Israël, faute de carburant et en raison de combats dans la zone.

Plusieurs organisations déplorent en outre que les autorités israéliennes leur refusent des demandes d'accès à certaines zones ou n'y répondent pas.

Et quand du personnel humanitaire ou de l'aide parvient à entrer par Kerem Shalom, cela "se fait à grand risque, dans une zone de combat", raconte un employé des Nations unies à Jérusalem.

"On n'arrive pas à faire sortir nos équipes, les conditions de sécurité sont trop instables", abonde une responsable d'Humanité et Inclusion (HI) dans les Territoires palestiniens.

Pour communiquer avec les autorités israéliennes --pour informer par exemple du déplacement d'une équipe--, la procédure est fastidieuse.

Les ONG passent pour la plupart par l'ONU qui en informe à son tour l'administration de coordination et de liaison israélienne (CLA) qui elle-même prévient l'organisme dont elle dépend, le Cogat, une entité du ministère israélien de la Défense chargée de gérer les affaires civiles dans les Territoires palestiniens occupés.

C'est seulement à cette étape que l'armée israélienne est prévenue.

"Des organisations ont connu des incidents même après avoir reçu le feu vert du Cogat", affirme Tania Hary, directrice de Gisha, une organisation de défense des droits humains. "Cela montre clairement qu'il y a quelque chose qui ne fonctionne pas dans la communication", dit-elle.

Certaines ONG tentent désormais d'échanger directement avec les autorités israéliennes, des initiatives qui, critiquent d'autres, menacent de créer un précédent et d'ajouter à la complexité du mécanisme.

Les conditions de travail se sont nettement dégradées ces dernières semaines, rapportent des acteurs humanitaires. Des zones dans lesquelles il était relativement simple de se rendre ont été évacuées, certaines sont le théâtre de combats.

Difficulté d'accès 

Or, soulignent plusieurs responsables d'ONG, le droit international humanitaire enjoint les parties d'un conflit à permettre la distribution d'aide.

"C'est évidemment une obligation, et pour nous, les informer de nos déplacements qu'elles sont censées ne pas empêcher, c'est une manière de rappeler leur redevabilité, s'il y a un problème", précise l'employée de HI.

Sur le terrain, les problèmes ne manquent pas, comme la pénurie de carburant. "Mais si on ne va plus que dans les endroits où on peut se rendre à pied, on limite quand même beaucoup la voilure", soupire la responsable d'une organisation.

Après les tirs sur un convoi de l'ONU qui ont tué lundi un employé à Rafah, "nous avons annulé tous nos déplacements de la journée pour limiter les risques pour nos équipes", explique Shaina Low, chargée de communication au Norwegian Refugee Council (NRC), qui parle aussi du climat de "confusion" généré notamment par "les bombardements" ou "l'absence de maintien de l'ordre".

S'ajoutent de nombreuses routes, dont des grands axes, devenues impraticables car recouvertes de gravats, et une fois un itinéraire approuvé, impossible d'en dévier au pied levé.

Les communications sont en outre difficiles puisque le réseau mobile est régulièrement inexistant ou faible notamment à cause des antennes endommagées et que, disent les ONG, Israël interdit l'usage de téléphones satellitaire et de radios.

"Evolution rapide de la situation, impératifs militaires, c'est le propre des conflits", déclare un cadre humanitaire, "mais là, on nous oppose régulièrement des +raisons opérationnelles+, certains déplacements nous sont toujours refusés, on ne peut presque rien faire entrer: on ne peut pas travailler comme ça". (AFP)