Le Chili relance l'enquête sur la mystérieuse morte du Nobel de la littérature Pablo Neruda

5437685854_d630fceaff_b-

L'écrivain, poète et diplomate chilien Pablo Neruda, alors ambassadeur en France, répond aux questions des journalistes le 21 octobre 1971 à côté de son épouse à l'ambassade du Chili à Paris, après avoir reçu le prix Nobel de littérature en 1971.

1
Partager :

Le 20 février 2024, un tribunal chilien a ordonné la réouverture de l'enquête sur la mort du poète et lauréat du prix Nobel Pablo Neruda, dont certains pensent qu'il a été empoisonné par la dictature d'Augusto Pinochet. (Photo AFP)

Le Chili va de nouveau tenter de résoudre le mystère de la mort en 1973 du poète et prix Nobel de littérature Pablo Neruda, qui aurait pu être empoisonné sous la dictature du général Augusto Pinochet, selon un arrêt mardi d'une Cour d'appel.

"La réouverture de l'enquête est ordonnée afin de mener à bien les procédures" demandées par les plaignants, qui "pourraient contribuer à l'éclaircissement des faits", détaille dans son arrêt la Cour d'appel de Santiago.

La réouverture de l'enquête a été demandée par des proches du poète, dont un neveu, ainsi que par le Parti communiste, dont le prix Nobel de littérature 1971 était membre.

L'arrêt de la Cour d'appel annule ainsi l'ordonnance de clôture de l'enquête sur les causes de sa mort prise en décembre par la juge chargée de l'affaire, Paola Plaza.

Pablo Neruda est mort le 23 septembre 1973, douze jours après le putsch du général Pinochet contre le président socialiste Salvador Allende, grand ami du poète.

L'hypothèse d'un assassinat est apparue en 2011 après les révélations de Manuel Araya, décédé en juin 2023, à l'époque jeune militant que le Parti communiste chilien avait désigné comme assistant et chauffeur de l'écrivain.

Selon cette théorie de l'empoisonnement, Pablo Neruda aurait succombé à une injection faite la veille de son départ pour le Mexique, où il envisageait de s'exiler pour y diriger l'opposition au régime Pinochet (1973-1990).

Jusque-là, la version officielle était que le poète était mort d'un cancer de la prostate.

Des experts internationaux avaient rejeté à l'unanimité en 2017 la version officielle du régime militaire. Mais ils n'avaient pu confirmer ni exclure la possibilité d'une contamination volontaire et délibérée par l'injection de germes ou de toxines bactériennes.

"méga-expertise"

Parmi les nouvelles mesures ordonnées mardi par la justice figure une "méta-expertise pour revoir et interpréter les résultats des experts" qui ont analysé les restes prélevés sur le corps exhumé du poète.

Un panel d'experts nationaux et internationaux avait été appelé à conclure définitivement en 2023 l'enquête. Ils avaient analysé les résultats de toute une série de prélèvements sur les restes du poète dont le corps avait été exhumé en avril 2013 de la crypte où il reposait depuis 1992, à Isla Negra, à 120 kilomètres à l'ouest de la capitale.

Leurs conclusions avaient été remises en février 2023 à la juge Paola Plaza. Deux membres du panel de l'université canadienne McMaster, Hendrik et Debi Poinar, avaient assuré ne pas avoir pu déterminer si le décès de Neruda était dû ou non à un empoisonnement.

Les deux chercheurs avaient précisé avoir pu récupérer l'ADN de Pablo Neruda sur l'une de ses molaires mais, en raison de sa dégradation, n'être parvenus à reconstruire qu'un tiers du génome de la bactérie clostridium botulinum.

Ils avaient cependant assuré qu'il était possible de le reconstruire dans sa totalité sans nouvelle exhumation. "Il y a suffisamment de matériel pour le faire avec ce que nous avons au laboratoire. Nous avons juste besoin d'avoir l'accord du tribunal", avaient-ils assuré.

Parmi les autres mesures ordonnées par la Cour d'appel de Santiago figure "une nouvelle analyse de l'écriture du certificat de décès qui aurait été délivré par le docteur Vargas Salazar", qui affirme que Neruda est mort des suites de métastases causées par le cancer de la prostate dont il souffrait.

De nouveaux témoins et un expert dans l'étude de la bactérie "costridium botulinum", qui aurait été inoculée à Neruda, sont en outre cités à comparaître.

La dictature d'Augusto Pinochet a fait quelque 3.200 morts et plus de 38.000 personnes ont été torturées, selon des chiffres officiels. (AFP)

lire aussi