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Second tour inédit en Turquie, Erdogan en tête face à une opposition hétéroclite
Des partisans d'Erdogan attendant les résultats des élections à Istanbul, le 14 mai 2023. La Turquie vote lors d'une élection capitale qui prolongera, sauf improbable surprie au premier tour, la mainmise du président sortant sur le pouvoir depuis deux décennies. (Photo Umit Turhan Coskun / AFP)
La Turquie, qui s'est massivement rendue aux urnes dimanche pour le premier tour du scrutin présidentiel, s'est acheminée lundi vers un second tour, prévu le 28 mai, qui s'annonce favorable au président Recep Tayyip Erdogan.
Le dernier comptage, portant sur près de 99,9% des urnes, accorde 49,5% des suffrages au chef de l'Etat, au pouvoir depuis vingt ans, contre 44,9% à son rival social-démocrate Kemal Kiliçdaroglu.
Le "reis" Erdogan, que les sondages donnaient pourtant à la traîne, conserve également sa majorité au Parlement.
L'issue du second tour s'annonce plus qu'incertaine pour l'opposition, qui affirmait dimanche soir être "en tête".
Elle dépendra pour partie d'un troisième homme, l'ultranationaliste Sinan Ogan, qui a recueilli 5,2% des voix au premier tour, et n'a pas encore annoncé s'il soutiendrait l'un des deux candidats.
L'impact de la crise économique et du séisme dévastateur du 6 février, qui a fait au moins 50.000 morts, n'a pas eu les effets envisagés par les analystes.
La réponse du gouvernement, jugée tardive, avait pourtant suscité la colère de nombreux rescapés.
Mais ce sentiment ne s'est pas traduit dans les urnes, les provinces fortement impactées ayant massivement reconduit leur confiance au président, qui a promis de reconstruire au plus vite 650.000 logements dans les zones affectées.
"La Nation accorde sa confiance à Erdogan", titrait en une lundi le quotidien progouvernemental Sabah, qualifiant l'arrivée en tête du président sortant au premier tour de "formidable réussite".
"Respecter" le scrutin
Jusqu'à dimanche, le camp de l'opposition, une vaste coalition emmenée par le CHP (social-démocrate, laïque), le parti de Mustafa Kemal Atatürk, fondateur de la Turquie moderne, appelait à "en finir au premier tour".
Mais le vice-président du parti a reconnu à la mi-journée lundi que les "quelque 300 urnes du vote de l'étranger non décomptées ne changeront pas la donne".
"Nous l'emporterons certainement au second tour", a-t-il toutefois affirmé.
Dimanche soir, le camp de M. Kiliçdaroglu avait contesté les premiers chiffres, qui donnaient une confortable avance à M. Erdogan, affirmant que les résultats des bureaux de vote les plus favorables à l'opposition n'avaient pas encore été comptabilisés du fait de multiples recours.
Les deux candidats se sont dits prêts à se retrouver dans deux semaines et le président Erdogan, au pouvoir depuis 2003, comme il l'avait déjà affirmé, a promis d'en "respecter" le verdict.
Confronté pour la première fois à un ballotage, alors qu'il avait été réélu en 2018 dès le premier tour de la présidentielle, le chef de l'Etat a affiché sa confiance.
"Je crois sincèrement que nous continuerons à servir notre peuple ces cinq prochaines années", a-t-il lancé dans la nuit à ses partisans exultants.
"Vrai leader"
Pour Bayram Balci, chercheur au CERI-Sciences Po à Paris et ancien directeur de l'Institut français d'études anatoliennes à Istanbul, "les Turcs ont joué la stabilité et la sécurité".
"Ils ont refusé d'accorder leur confiance à une coalition hétéroclite aux intérêts divergents, se demandant comment ils parviendraient à gouverner ensemble".
"Tayyip Erdogan va gagner. C'est un vrai leader, les Turcs ont confiance en lui et il a une vision pour la Turquie", a affirmé lundi à Hamdi Kurumahmut, un habitant d'Istanbul travaillant dans le tourisme.
Le principal indice de la Bourse d'Istanbul, après un plongeon à l'ouverture de 6%, restait en baisse de 3% à 15H30 (12H30 GMT).
La livre turque atteignait pour sa part un niveau historiquement bas, autour de 19,7 livres pour un dollar.
"L'issue des élections sera déterminante pour l'économie turque", s'est inquiété l'analyste Bartosz Sawicki. "La Turquie va-t-elle poursuivre sur sa lancée hétérodoxe, ses politiques déséquilibrées ou bien reprendre la voie des réformes et du redressement ?", s'est-il interrogé. (AFP)