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Sénégal : Le pouvoir et ses soutiens devraient se méfier des analyses accommodantes
L'homme politique, s’il est, sans doute, un trublion et parfois un fauteur de trouble qui n’arrange pas les intérêts français, mais les poursuites dont il fait l’objet et la dissolution de son parti, ne sont pas à mettre à la gloire de la gloire de la démocratie sénégalaise, l’une des rares dont le continent pourrait être fière (Photo by SEYLLOU / AFP) /
L'étau s'est resserré autour de l'opposant Ousmane Sonko, candidat à la présidentielle de 2024, qui voit sa participation au scrutin entravée par son placement en détention, la dissolution de son parti et des procédures judiciaires en cours, selon des analystes.
"C'est impossible qu'Ousmane Sonko se présente à l'élection présidentielle. Pastef (le parti de M. Sonko) n'a pas les moyens politiques d'instaurer un rapport de force favorable" à une candidature de M. Sonko, affirme à l'AFP l'anthropologue et analyste politique Abdou Ndukur Kacc Ndao.
M. Ndao dit craindre "une grande chasse" aux responsables de la formation qui compte plusieurs élus à l'Assemblée nationale et dans des exécutifs locaux.
Deux personnes ont été tuées lundi dans le sud du Sénégal, lors de manifestations à la suite du placement en détention de M. Sonko, le plus farouche opposant au président Macky Sall.
Âgé de 49 ans, adulé par les jeunes et porteur d'un programme "anti-système" prônant notamment un rééquilibrage des rapports avec les pays européens dont la France, Ousmane Sonko a été inculpé et écroué lundi pour divers crimes dont l'appel à l'insurrection ayant provoqué des tueries justifiant la dissolution de son parti.
L'homme politique, s’il est, sans doute, un trublion et parfois un fauteur de trouble qui n’arrange pas les intérêts français, arrivé troisième à la présidentielle de 2019, risquerait, selon des juristes, cinq à 20 ans de prison avec une nouvelle procédure judiciaire qui s'ajoute à deux autres condamnations. Ce qui indique une détermination du pouvoir à l’empêcher de concourir pour la présidentielle de février 2024. Une détermination qui n’est pas sans conséquences ni risques. Certes, le profil de M. Sonko ne rassure pas, mais les poursuites dont il fait l’objet et la dissolution de son parti, le Pastef, ne sont pas à mettre à la gloire de la gloire de la démocratie sénégalaise, l’une des rares dont le continent pourrait être fière. D’autant plus que ces évènements sont susceptibles entrainer le Sénégal dans le tourbillon d’instabilité que connait la région.
Condamnations, et après?
L'opposant avait été condamné le 1er juin à deux ans de prison ferme dans une affaire de mœurs, un verdict qui le rend inéligible en l'état, selon des juristes.
Il avait été condamné le 8 mai à six mois de prison avec sursis à l'issue d'un procès en appel pour diffamation, une peine susceptible de le frapper aussi d'inéligibilité, même s'il n'a pas encore épuisé ses recours devant la Cour suprême.
Moins de deux heures après le glaive de la justice lundi, celui du gouvernement s'est abattu sur le parti avec l'annonce de sa dissolution.
Les autorités reprochent à Pastef d'avoir "fréquemment appelé ses partisans à des mouvements insurrectionnels" avec de "lourdes conséquences, incluant de nombreuses pertes en vies humaines", dans un communiqué publié lundi sur les réseaux sociaux.
La condamnation de M. Sonko début juin a engendré les troubles les plus graves depuis des années au Sénégal, qui ont fait 16 morts selon les autorités, une trentaine selon l'opposition. Des émeutes dans la même affaire avaient fait au moins 12 morts en 2021.
La "stabilité (du Sénégal) est désormais compromise, car le peuple n'acceptera jamais cette ultime forfaiture", affirme le parti de Sonko, en réaction à sa dissolution. Il dit attendre une "notification" de la décision qualifiée d'"anti-démocratique" pour l'attaquer par des "voies légales".`"Si le peuple sénégalais, pour qui je me suis toujours battu, abdique et décide de me laisser entre les mains du régime de Macky Sall, je me soumettrai comme toujours à la volonté divine", faisait semblant de se résigner M. Sonko dans un message sur les réseaux sociaux lundi après-midi.
L'opposant avait martelé ces derniers mois que personne ne pourrait l'empêcher de se présenter à la présidentielle, promettant à défaut d'installer "le chaos" dans le pays.
Il a accusé le président Macky Sall de monter des affaires judiciaires pour l'écarter du scrutin de 2024. M. Sall, élu en 2012 pour sept ans et réélu en 2019 pour cinq ans, a annoncé le 3 juillet qu'il ne serait pas candidat après avoir longtemps entretenu le flou.
La détention de M. Sonko "pourrait sonner le glas de ses ambitions présidentielles", écrit le journaliste Momar Dieng dans un texte publié sur Twitter, rebaptisé X.
"Non seulement, il pourrait perdre son éligibilité électorale qui l'exclurait alors de l'élection présidentielle, mais aussi se trouver encore en prison lors de la campagne électorale dudit scrutin" à partir de janvier prochain, dit Momar Dieng.
Mais ce n’est pas sûr. Le parti de M. Sonko a ces derniers mois été , certes, affaibli par des centaines d'arrestations dans ses rangs dont de hauts responsables toujours en prison. Mais cela peut aussi galvaniser ses troupes et lui qpporter de nouvelles sympathies. Le pouvoir et ses soutiens nationaux et internationaux doivent se méfier des analyses de par trop accommodantes. (Quid avec AFP)