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Suspension de l'autonomie de la Catalogne: Madrid convoque un conseil des ministres extraordinaire
Le gouvernement espagnol s’apprête à mettre en œuvre l’article 155 de la Constitution pour suspendre l’autonomie de la Catalogne (nord-est), en vue de mettre fin à une crise politique qui, selon lui, a longtemps duré et qui commence à avoir de sérieuses répercussions sur l’économie de cette région représentant près de 20% du PIB du pays
Madrid, qui brandissait depuis quelque temps la menace de cet article de la Loi fondamentale l’autorisant à suspendre l’autonomie d’une région pour l’intérêt général de l’Espagne, vient de passer de la parole aux actes, en annonçant la tenue samedi d’un Conseil des ministres extraordinaire pour donner le coup d’envoi de cette décision inédite dans l’histoire de la démocratie espagnole.
Cette décision intervient après épuisement des deux délais accordés par le gouvernement conservateur de Mariano Rajoy au chef du gouvernement catalan, Carles Puigdemont, pour clarifier s’il a déclaré ou non l’indépendance de la Catalogne, le 10 octobre devant le parlement régional.
Dans sa première réponse lundi dernier à la demande officielle du gouvernement central, Puigdemont avait sollicité un délai de deux mois pour négocier avec Madrid une sortie politique de la crise en Catalogne, sans préciser s’il a déclaré ou non l’indépendance.
Le chef de l’exécutif catalan a adressé jeudi une seconde lettre à Rajoy dans laquelle il a menacé, cette fois-ci, de faire voter officiellement la déclaration d’indépendance de la Catalogne au parlement régional en cas d’absence de dialogue avec l’exécutif central sur cette crise politique.
"Si le gouvernement persiste à empêcher le dialogue et poursuit la répression, le parlement de la Catalogne pourra procéder, s’il le juge opportun, de voter de manière officielle la déclaration d’indépendance qu'il n’a pas votée le 10 octobre", lit-on dans cette lettre de Puigdemont au chef du gouvernement central.
Même si Puigdemont a dissipé les doutes en précisant que la déclaration d’indépendance n’a pas été votée, sa réponse a été rejetée par le gouvernement central à travers un communiqué rendu public quelques minutes seulement après cette seconde lettre.
Le gouvernement espagnol a affirmé qu’il poursuivra les démarches prévues par l’article 155 de la Constitution, en vue de "restaurer la légalité et l’autonomie en Catalogne".
Il a constaté le "refus" du président de la Generalitat (gouvernement catalan) de répondre à la demande qui lui a été adressée le 11 octobre pour préciser de manière "claire et précise" si une déclaration de l’indépendance de la Catalogne a été déclarée ou non, indiquait le communiqué.
"Par conséquent, le gouvernement espagnol poursuivra les démarches prévues dans l’article 155 de la Constitution pour restaurer la légalité et l’autonomie en Catalogne", a ajouté la même source.
L’exécutif espagnol a affirmé, en outre, qu’il "mettra en œuvre tous les moyens à sa portée pour restaurer le plus tôt possible la légalité et l’ordre constitutionnel, récupérer la cohabitation pacifique entre citoyens et mettre fin à la détérioration de la situation économique en Catalogne causée par l’insécurité juridique".
Sa décision d’appliquer l’article 155 compte avec l’appui du Parti socialiste ouvrier espagnol (PSOE) et des centristes de Ciudadanos, plusieurs réunions ayant été tenues entre les chefs des trois formations politiques pour se concerter au sujet des mesures concrètes à adopter dans le cadre de la suspension de l’autonomie de la Catalogne.
D’autres formations politiques ont un avis différent. C’est la cas du parti d’extrême gauche Podemos dont le chef, Pablo Iglesias, a appelé le gouvernement à ne pas "jeter de l’huile sur le feu" en appliquant l’article 155 et la Generalitat à ne pas déclarer l’indépendance unilatérale.
Les partis nationalistes catalans, ERC et PDeCAT, prédisent un scénario "négatif" en cas de suspension de l’autonomie de la Catalogne.
Après l’adoption prévue par le Conseil des ministres de samedi des mesures à mettre en œuvre pour l’application de l’article 155, celles ci devront par la suite être soumises en Sénat (chambre haute) qui fixera le calendrier de leur adoption pour leur entrée en vigueur.
Si l'article 155 est clair quant à la raison pouvant mener à la suspension de l’autonomie d’une région, il l’est moins sur la nature des mesures nécessaires pour concrétiser sur le terrain une telle décision.
Les experts en la matière avancent des scénarios possibles comme remplacer des membres du gouvernement catalan, prendre le contrôle de la police locale qui passerait alors sous les ordres du ministère de l'Intérieur, fermer le parlement régional ou encore prendre à la charge de l’Etat les services publics locaux.
Le gouvernement espagnol se retrouve ainsi devant une situation inédite dans l’histoire du pays, contraint de faire usage pour la première fois de l’article 155 de la Constitution pour préserver l’unité du pays et faire face aux velléités indépendantistes des partis nationalistes catalans.