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Troubles au Sénégal: Amnesty parle de 23 morts, les manifestations des 9 et 10 juin interdites
Des étudiants en archivistique et en documentation examinent des documents brûlés à l'Université Cheikh Anta Diop de Dakar, le 9 juin 2023, dans le but de les récupérer. Des dizaines de milliers d'archives d'étudiants datant de 1957 ont été brûlées lors des manifestations qui ont éclaté le 1er juin 2023 après la condamnation du leader de l'opposition Ousmane Sonko à deux ans de prison. (Photo par JOHN WESSELS / AFP
Amnesty International a indiqué jeudi avoir décompté 23 morts dans les troubles qui ont secoué le Sénégal la semaine dernière, davantage que le bilan officiel des autorités, et de l’opposition.
Le Sénégal a été en proie du 1er au 3 juin à ses pires troubles depuis des années après la condamnation de l'opposant Ousmane Sonko à deux ans de prison ferme dans une affaire de mœurs. L'annonce de la condamnation a déclenché des violences qui ont fait officiellement 16 morts, 19 selon l’opposition.
La décision de justice rend, en l'état actuel, inéligible pour la présidentielle de février 2024 une personnalité populaire dans la jeunesse et les milieux défavorisés.
A travers 18 entretiens, des vidéos authentifiées et des certificats de décès et rapports d'autopsie qui attestent de blessures par balles, Amnesty donne un bilan humain à la hausse et dénonce un usage excessif de la force ainsi que des atteintes à la liberté d'expression et d'information.
"Près de 23 morts, selon nos chiffres, dont plusieurs par balles, ont été enregistrés entre Dakar et Ziguinchor" (sud), dit Amnesty dans un communiqué. Trois étaient des mineurs, a dit l'ONG.
De son côté, le parti de M. Sonko, Pastef, a fait état jeudi de 26 morts par la voix de son porte-parole, El Malick Ndiaye, a rapporté le site d'information Dakaractu.
Amnesty dit avoir constaté, dans des vidéos qu'elle a analysées, la présence, aux côtés des forces de l'ordre, d'hommes armés en civil qui s'en prennent violemment aux manifestants.
" L'Etat ne doit pas permettre la présence d'individus non identifiés comme faisant partie des forces de l'ordre pour des opérations de maintien de l'ordre, ni l'usage de la force. Ce sont des évidentes violations du droit international", a déclaré dans le communiqué Seydi Gassama, directeur exécutif d'Amnesty Sénégal.
Interrogé par l'AFP, le gouvernement n'a pas réagi.
Il a préalablement justifié le recours à la force par la nécessité de rétablir l'ordre face à ce qu'il a présenté comme une tentative de déstabiliser l'Etat, y compris de la part d'hommes en armes.
Les autorités ont interdit deux marches de l'opposition prévues vendredi et samedi contre le président Macky Sall, la première pour non respect des délais de demande d'autorisation, la seconde pour risque de trouble à l'ordre public, a indiqué la préfecture à l'AFP.
L'inquiétude est répandue d'un nouvel embrasement. Elle est alimentée par les incertitudes sur le sort de M. Sonko, susceptible d'être arrêté après sa condamnation, et sur une candidature ou non du président à un troisième mandat.
M. Sonko est généralement présenté comme ne pouvant faire appel de sa condamnation. La jeune femme qui avait porté plainte contre lui pour viols, charges finalement requalifiées en "corruption" d'une personne de moins de 23 ans, a fait appel du verdict, a dit un de ses avocats, Me El Hadji Diouf.
Les positions des avocats divergent quant aux conséquences de cet appel et à l'éventualité d'un nouveau procès. (Quid avec AFP)