National
A. Boukouss, recteur de l'IRCAM : un bilan honorable comparativement à la situation de l'amazigh avant le discours d'Ajdir
« Avant ce discours d’Ajdir, la langue amazighe agonisait du fait de son absence des institutions, qu'il s'agisse de l'enseignement, des médias, ou du champ culturel. » (Ahmed Boukous)
Propos recueillis par El Mustapha Ayach (MAP)
Rabat - Il y a 19 ans, le 17 octobre 2001, le Roi Mohammed VI prononçai à Ajdir (Khénifra) dans lequel le Souverain définissait sa vision de l’amazighité et annonçait la création de l'Institut Royal de la Culture Amazighe (IRCAM). Ahmed Boukouss, recteur de cet Institut revient dans un entretien au portail Amazigh de la MAP sur les principales réalisations de l'Institut et sur les défis posés par la pandémie du Coronavirus (Covid-19) tout en se projetant sur les futurs projets de l'IRCAM.
Quelles sont les principales réalisations de l'IRCAM depuis le discours royal d'Ajdir ?
Ce discours en vertu duquel a été créé l'IRCAM en tant qu'institution nationale vouée à promouvoir la langue amazighe dans plusieurs domaines, fut un véritable événement historique. Avant ce discours, la langue amazighe agonisait du fait de son absence des institutions, qu'il s'agisse de l'enseignement, des médias, ou du champ culturel. D'autre part, il y a un ensemble d'associations culturelles qui militent en faveur de cette reconnaissance, et qui, en dépit des moyens insuffisants, ont réalisé plusieurs acquis.
Néanmoins, en toute objectivité, nous pouvons dire que la langue amazighe a connu un nouvel essor dans divers domaines après que SM le Roi a consacré plusieurs de Ses discours à ce sujet notamment après celui d'Ajdir, tel que le discours du 09 mars 2011, dans laquelle le Souverain a présenté une feuille de route définissant les contours de la réforme constitutionnelle. Ce discours comporte également des éléments de première importance que nous pouvons considérer révolutionnaires en matière de politique culturelle de l'Etat, puisqu'Il a annoncé que l'amazigh sera érigé en langue officielle au même titre que la langue arabe. Le Souverain a également appelé les élus, dans plusieurs de Ses discours devant le Parlement, à agir pour mettre en œuvre les lois organiques, notamment la loi portant officialisation de la langue amazighe.
Dans ce contexte, nous pouvons dire que le bilan de l'Institut est honorable comparativement à la situation de l'amazigh avant le discours d'Ajdir et la création de l'IRCAM. La langue amazighe a fait son entrée dans plusieurs domaines grâce aux efforts consentis par l’État, les chercheurs universitaires et la société civile.
Quel a été l'impact de la crise sanitaire sur les activités de l'IRCAM ?
L'impact de la Covid-19 a été dangereux et nocif. L'Institut a été contraint de geler toutes ses activités extérieures et ses relations avec les institutions, les associations et les acteurs de la société civile. A cet égard, les commissions administrative et scientifique de l'IRCAM se sont penchées sur la question et ont décidé que les responsables de cette institution, dont le rectorat, le secrétariat général et les membres desdites commissions, travailleront en présentiel dans le respect des mesures sanitaires en vigueur tout en faisant usage des applications de messagerie instantanée.
Bien que le rendement ne soit pas le même qu'auparavant, l'Institut a maintenu son soutien financier aux associations culturelles amazighes et son encouragement aux artistes et chercheurs. Concernant les associations culturelles amazighes, l'Institut qui demeure fidèle à son plan de soutien financier en faveur de ces dernières, agit également en faveur de la promotion des artistes et des chercheurs portant un intérêt à la question amazighe. A ce titre, nous avons reçu plus de 400 projets de soutien que la commission a examiné et sélectionné ceux qui obtiendront le soutien pour une enveloppe globale à hauteur de 800.000 dirhams. A cela s'ajoute la politique d'appui de l'IRCAM aux écrivains en langue amazighe qui soumettent également leurs projets en vue d'obtenir un financement.
Par ailleurs, il a été décidé que la commémoration du discours d'Ajdir soit célébrée dans le strict respect des mesures préventives en vigueur dans notre pays au vu des circonstances imposées par la pandémie. C'est ainsi que l'IRCAM a œuvré pour restreindre les effets néfastes de la pandémie.
Quels sont les principaux projets que l’Institut entreprendra l'année prochaine ?
L'IRCAM s'est doté d'un plan d'action pour l'année 2021 qui comprend un ensemble d'axes, à l'instar de la nécessité de promouvoir la technologie moderne. La pandémie du Coronavirus a démontré que les méthodes traditionnelles de communication, de recherche et de production sont révolues. La langue amazighe devrait également s'inscrire dans cette logique.
Bien que le bilan des expériences et pratiques de l'Institut soit satisfaisant, des améliorations sont attendues dans ce sens. Nous travaillions dans le cadre du traitement automatique de la langue. La langue l'amazighe est présente dans le système Windows 2008 et 2010, mais il manque à cette technologie les options de correction orthographique, lexicale et compositionnelle. Pour pallier à cette difficulté, nous avons jusqu'à présent réussi à élaborer un ensemble d'applications dédiées au vocabulaire, bien que celui-ci s'emploie de façon inapproprié dans les phrases et les discours.
Aujourd'hui, il existe des moyens digitaux. Il y a un ensemble de jeunes qui ont réussi à aller au-delà des réalisations de l’Institut en termes de logiciels pédagogiques (didactiels) avec lesquels nous souhaitons tisser des partenariats afin de tirer profit de leurs travaux.