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La fièvre du Sahara – Par Hatim Bettioui
Le plan d’autonomie marocain pour le Sahara répond aux appels de la communauté internationale, y compris des Nations Unies et en même temps offre une sortie honorable à toutes les parties prenantes qu’Alger tout à son vertigo chronique n’a pas su saisir
Le président algérien Abdelmadjid Tebboune n’a pas laissé l’année 2024 s’écouler sans à nouveau s’impliquer dans le dossier du Sahara. Il faut bien rappeler que la « fièvre du Sahara », qui s’est emparée de son pays, n’a cessé de s’aggraver depuis que le président français Emmanuel Macron a exprimé son soutien au plan marocain d’autonomie pour le Sahara, considérant que le présent et l’avenir de ce territoire s’inscrivent dans le cadre de la souveraineté marocaine, position qu’il a exprimée dans un message de félicitations adressé au roi Mohammed VI le 30 juillet dernier à l’occasion du jubilé d’argent de son accession Trône.
Une suite de succès Vs une suite d’échecs
Le choc provoqué par cette prise de position française a été puissant et inattendu pour les autorités algériennes. Il s’ajoute au grand coup porté quatre ans auparavant par la diplomatie marocaine, lorsque, fin 2020, le président américain Donald Trump a reconnu la souveraineté marocaine sur le Sahara, une reconnaissance que l’administration du président Joe Biden n’a pas remise en cause comme l’espérait Alger.
L’Espagne, de son côté, a rejoint, deux années plus tard, le cercle des grands soutiens de la position marocaine. Dans un message adressé au roi du Maroc le vendredi 18 mars 2022, le président du gouvernement espagnol, Pedro Sánchez, a reconnu l’importance de la question du Sahara pour le Maroc et affirmé que son pays considère l’initiative marocaine d’autonomie comme la base la plus sérieuse, réaliste et crédible pour résoudre le différend.
Le vertigo chronique
En 2007, le Maroc a présenté son projet d’autonomie pour le Sahara, une voie médiane intelligente et une initiative élaborée dans le cadre des efforts de Rabat pour parvenir à une solution politique définitive au conflit qui a commencé après la récupération par le Maroc de son Sahara de l’occupation espagnole en novembre 1975.
Ce projet marocain a vu le jour après des années d’impasse dans la recherche d’une solution définitive. Il répond aux appels de la communauté internationale, y compris des Nations Unies et en même temps offre une sortie honorable à toutes les parties prenantes qu’Alger tout à son vertigo chronique n’a pas su saisir.
Dix-sept ans après son lancement, le président Tebboune a déclaré devant le parlement algérien, le 30 décembre dernier, que la France est « le parrain du plan marocain d’autonomie », qualifiant ce plan de « fausse idée » élaborée sous la présidence de Jacques Chirac (1995-2007), et que les présidents successifs ont suivie. C’est ou de la mauvaise foi, ce qui est le plus probable, ou une ignorance totale de la genèse de cette initiative née de la médiation de l’ancien secrétaire d’Etat américain James Baker, alors envoyé personnel du secrétaire général de l’ONU au Sahara, qui a demandé, suite à une recommandation des Nations Unies, l’exploration d’une troisième voie pour résoudre le conflit. Pour l’histoire, seul le Maroc a répondu favorablement à cette requête tandis qu’Alger est resté arc-bouté sur ses positions.
La clarté marocaine
Dès le début, le projet d’autonomie marocain a été clair : il vise à accorder une large autonomie aux populations sahariennes dans le cadre de la souveraineté marocaine et de l’intégrité territoriale, tout en visant à renforcer le développement économique et social de la région.
Rabat n’a pas attendu une résolution définitive pour initier le développement dans le Sahara. Depuis sa récupération, le royaume a investi dans l’infrastructure de la région, in investissement qui s’est intensifié en 2015, lorsque des budgets importants ont été alloués à des projets de développement dans le cadre du « Nouveau modèle de développement des provinces du Sud ».
Rabat s’est engagée à investir environ 7,7 milliards de dollars sur plusieurs années pour améliorer les réseaux de transport et construire de nouveaux ports, tels que le port atlantique de Dakhla, ainsi que pour développer d’autres ports et aéroports afin de renforcer les connexions régionales et internationales. Des projets d’énergie renouvelable, comme la centrale solaire Noor à Laâyoune, ont également été lancés, en parallèle avec le soutien à des secteurs productifs tels que l’agriculture et la pêche, et la construction de nouvelles écoles, universités et hôpitaux pour améliorer les services éducatifs et de santé.
Dans ce contexte de dynamisme économique, la proposition marocaine a reçu un accueil international favorable. Cet appui a été renforcé par le soutien de grandes puissances comme la France, l’Espagne et les États-Unis, qui considèrent l’autonomie comme une solution réaliste, sérieuse et crédible.
L’entêtement dans l’isolement
Les positions de la France et de l’Espagne ont été particulièrement difficiles à accepter pour l’Algérie, qui, après cinquante ans d’investissements dans la politique du « droit à l’autodétermination » et dans la contestation de l’unité territoriale marocaine, n’a récolté que du vent face aux succès diplomatiques du Maroc. Sa position est devenue d’autant plus intenable que l’évolution de la position de la France et de l’Espagne, a la particularité d’être celle des anciennes puissances coloniales dans la région, qui connaissent parfaitement les dessous et les interstices de la partition du Maroc et le partage de ses terres par les forces coloniales.
Mais au lieu de prendre acte de ces changements et d’épouser les nouvelles évolutions diplomatiques de par le monde, l’Algérie ne cesse, depuis juillet dernier, de dénoncer la position française. Alors que la majorité des pays appellent à une résolution réaliste et pragmatique du conflit, elle a choisi de s’isoler sur la scène internationale. Récemment encore, le ministre algérien des Affaires étrangères, Ahmed Attaf, complétement déphasé de la réalité, a déclaré que les pays soutenant la proposition marocaine d’autonomie se placent « du mauvais côté de l’histoire ».
Paradoxalement, voire ironie du sort, l’Algérie, bien qu’ayant occupé la présidence du Conseil de sécurité, a évité d’inscrire le dossier du Sahara à l’ordre du jour. Ce n’est pas faute de le vouloir, mais plutôt parce qu’elle est consciente que cela serait un pari perdu, qui ne jouerait pas en sa faveur.
Il est désormais évident que les reconnaissances de la souveraineté marocaine sur le Sahara se multiplient, tandis que celles de la « république sahraouie », créée sur le territoire algérien, se réduisent comme peau de chagrin. La récente décision du Ghana de suspendre ses relations diplomatiques avec cette « république » qu’il avait reconnue en 1979, autre signe que le climat diplomatique mondial a considérablement changé, constitue un coup dur pour un projet fortement soutenu par des moyens militaires, financiers et diplomatiques.
En dehors de toutes ces évolutions, l’Algérie ne semble pas décidée à contribuer à la création d’une région maghrébine prospère et stable. Du moins à court terme, tant elle reste rivée à des positions dépassées, et que le Maroc, présent dans son Sahara a non seulement remporté cette bataille sur le terrain depuis qu’il l’a récupéré, mais est en phase de définitivement périmer le dossier au plan diplomatique.