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Maroc-Israël : Ces élites qui jouent avec le feu
Une délégation américano-israélienne de haut niveau visite le Mausolée Mohammed V à Rabat et se recueille sur les tombes de Feu Mohammed V et Hassan II
D’aucuns veulent profiter de la « situation de contrainte » qui a motivé la normalisation des relations du Maroc avec Israël pour pousser à plus de normalité alors que l’orientation de l’Etat telle qu’elle ressort du communiqué du Cabinet royal place la souveraineté marocaine sur son Sahara et la résolution du conflit au plan de principale préoccupation, la normalisation étant une question secondaire et marginale.
Certaines élites qui exigent dans cette pseudo euphorie plus de « normalité » ne mesurent pas le poids du danger de la réflexion en l’absence de toute vision stratégique. Notamment lorsqu’il s’agit d’un champ miné et sensible où ces élites se retrouvent en situation d’offrir à l’autre, en l’occurrence Israël, les moyens d’élargir ses marges de manœuvres et les opportunités d’imposer son agenda.
Ces élites qui n’appréhendent pas correctement la stratégie de l’Etat, croient bien faire en poussant vers l’approfondissement de la normalisation en demandant la révision des programmes et manuels scolaires de manière à les rendre totalement israélo-compatible au point de renier les droits des Palestiniens. Sans s’en rendre compte, elles fournissent ainsi les outils favorisant la menace sur les intérêts supérieurs du pays.
Les défenseurs de ces thèses auraient été, d’un point de vue politique et stratégique, certainement mieux inspirés de présenter le Maroc pour ce qu’il est, un pays qui remplit déjà tous les critères de la modernité, notamment au niveau culturel et religieux.
L’expérience marocaine en matière de tolérance, de coexistence et de diversité n’est ni nouvelle ni récente. Le Maroc n’a pas attendu la reprise des relations avec Israël pour entreprendre ce chantier ou pressentir sa nécessité au plan éducationnel et culturel.
Le Royaume a, en effet, consolidé les valeurs de la tolérance et de l’ouverture. Il a également épuré son système religieux et éducationnel de toutes les formes de ségrégation, de haine et d’extrémisme. Une bonne part de ce travail, dont la réforme du champ religieux et la révision des manuels de l’enseignement religieux, s’est faite sous la direction tutélaire de la Commanderie de croyants. De ce fait, il n’y a pas une seule case de cette œuvre qui n’ait pas été comblée ou sur laquelle le Maroc se serait montré frileux. Ce sont pourtant ces réalisations que ces élites stupides vident de leur sens et les offrent comme cartes de pression aux adversaires sur le Maroc, susceptibles de les aider à faire dévier la stratégie marocaine de ses objectifs initiaux.
Tout à leur stupidité, ces élites ne comprennent pas la stratégie de l’Etat et suggèrent d’une manière ou d’une autre à des parties internes et externes de se faire prévaloir de « l’affluent judaïque » inscrit dans la loi fondamentale pour l’ériger au rang de « constituant » de l’identité nationale afin de pouvoir exiger la suppression de tout ce ne les confortent pas dans l’enseignement général et religieux et d’y intégrer ce qui les consolident. De ce fait, c’est la Commanderie des croyants qui risque de se retrouver sous la menace. Pour s’en convaincre, Il n’y a qu’à voir la manière dont s’est déroulée la réforme de l’éducation et du champ religieux dans le monde arabe, particulièrement en Egypte où elle ne s’est pas limitée à l’interprétation des textes religieux, mais s’est étendue à l’intégrité même des textes.
Inconscients de ce que sont ces politiques absurdes, elles offrent un précieux cadeau à Israël et la mettent en position de réclamer au Maroc, avec l’appui des Etats Unis d’Amérique, une révision globale des programmes de son enseignement, qui obéirait ainsi non à une volonté propre, mais à des exigences extérieures.
Dans cette phase critique, c’est d’une compréhension précise des intérêts nationaux dont nous avons besoins. Ils sont essentiellement axés sur la résolution du conflit du Sahara dans le cadre de la proposition marocaine d’autonomie. Dans ce sens nous avons aussi besoin de comprendre que la relation avec Israël est le choix de la nécessité. Nous devons garder à l’esprit son caractère passager et retenir que cette nécessité ne peut se transformer en état normal ou avancé. Il ne peut servir de prétexte pour faire pression sur le Maroc et réduire sa souveraineté religieuse, éducationnelle et culturelle. Situation provisoire, elle ne doit et ne peut muter en constante. Tant il est vrai que le Maroc qui a rouvert le bureau de liaison israélien et le même qui l’avait fermé en 2002. Il reste en conséquence maitre de ses décisions.
C’est pour cette raison que ces élites sans culture politique, qui agissent sans comprendre, ou pour s’attirer les bonnes grâces de l’Etat, doivent saisir que les règles du jeu avec Israël et les Etats Unis sont plus subtiles qu’il n’y parait. Et ce qu’elles ont de mieux à faire en ce moment est précisément de ne rien faire. Laisser l’Etat gérer le choix de la nécessité conjoncturelle jusqu’à la réalisation à court ou moyen termes de l’intérêt national, et la maturation des conditions qui lui permettraient de se libérer de ce choix contraire, à long terme, à l’intérêt supérieur du Maroc.