Politique
Des journalistes, artistes et intellectuels mettent en garde contre toute tentative de mise sous tutelle du secteur audiovisuel
Un groupe de journalistes, artistes et?intellectuels marocains a rendu public, mardi, une p?tition dans laquelle il?met en garde contre "toute tentative de mise sous tutelle du secteur?audiovisuel".
Dans cette p?tition les signataires estiment?que "la sc?ne m?diatique marocaine essentiellement dans son volet audiovisuel?est aujourd'hui expos?e ? une v?ritable campagne ?uvrant ? vider son contenu de?tout le rayonnement qui doit ?tre le sien et aspirant ? lui imposer une?dimension morale dont le seul objectif est de la soumettre ? une domination?certaine". Les signataires pointent du doigt une r?cente intervention du?ministre de la Communication, porte-parole du gouvernement, M. Mustapha El?Khalfi devant la Chambre des Conseillers au sujet du secteur audiovisuel.?Ils estiment que "la concentration sur les m?dias, ? laquelle nous assistons aujourd'hui, entre dans le cadre d'un calendrier servant les desseins du parti?(NDLR: le PJD) et dessert les objectifs principaux de l'audiovisuel public,?lesquels se fondent d'abord et avant tout sur le respect de la pluralit? politique, linguistique et culturelle, mais aussi sur la diffusion des valeurs?de libert? et des principes de concurrence et de libre entreprise". Les signataires, face ? la volont? de "dompter, de soumettre puis de?contr?ler le paysage audiovisuel, afin qu'il devienne maitris? sans ?me ni?vision", appellent l'ensemble des acteurs et intervenants "? se dresser de nouveau contre les appels ? la domination et au contr?le". La p?tition souligne que la lutte pour la libert? de la presse et pour la?cons?cration de la mission des m?dias dans l'?ducation et le rayonnement "ne?peut ?tre dissoci?e de la vraie bataille qui est celle de la libert? et du progr?s". La liste des premiers signataires comprend notamment les journalistes Samira?Sita?l, Narjis Rerhaye, Sanaa El Aji, Mokhtar Laghzioui, Youssef Jajili, Na?m?Kamal, Abdelhamid Jmahri, le chercheur Ahmed Aassid, les actrices Mouna Fettou,?Latifa Ahrarre et l'acteur Driss Roukh. Elle comprend aussi des universitaires,?des cin?astes, des producteurs et des acteurs associatifs.
Voici le texte int?gral de la p?tition et le liste des premiers signataires
Non ? la mise sous tutelle des m?dias
La sc?ne m?diatique marocaine, essentiellement dans son volet audiovisuel, est aujourd?hui expos?e ? une v?ritable campagne ?uvrant ? vider son contenu de tout le rayonnement qui doit ?tre le sien et aspirant ? lui imposer une dimension morale dont le seul objectif est de la soumettre ? une domination certaine. Et ainsi, la r?cente intervention du ministre de la Communication, porte-parole du gouvernement, Mustapha el Khalfi, ? la Chambre des Conseillers, aura d?voil? un aspect de ces man?uvres intervenues suite ? l?apparition au grand jour de cette ambition d?imposer une tutelle, que ce qui a ?t? appel? ??cahiers des charges?? ont voulu mettre en place, avant qu?ils ne soient eux-m?mes amend?s apr?s la lev?e de boucliers du secteur audiovisuel.
L?entreprise d?imposer un discours ? r?f?rentiel moral et religieux, clairement exprim? par le ministre de tutelle sous le couvert de ??mettre un terme au Mal?? ? c?est son expression ?, revient principalement ? faire de l?audiovisuel national une annexe de ces chapelles qui se caract?risent par des discours ? connotation religieuse et qui rappellent celles du parti conduisant le gouvernement et dans les rangs duquel milite le ministre el Khalfi.
Ce retour au discours de nature morale et religieuse co?ncide avec la violente attaque men?e par le chef du gouvernement Abdelilah Benkirane contre les m?dias et les journalistes, de m?me qu?il intervient au moment m?me o? l?on constate un tassement de la volont? de r?former dans diff?rents et maints secteurs. Cela laisse penser que la concentration sur les m?dias, ? laquelle nous assistons aujourd?hui, entre dans le cadre d?un calendrier servant les desseins du parti et dessert les objectifs principaux de l?audiovisuel public, lesquels se fondent d?abord et avant tout sur le respect de la pluralit? politique, linguistique et culturelle, mais aussi sur la diffusion des valeurs de libert? et des principes de concurrence et de libre entreprise.
Le r?le de l?institution l?gislative est le contr?le de l?action du pouvoir ex?cutif?; elle ne doit donc pas ?tre instrumentalis?e ni dress?e contre le paysage audiovisuel, pour des objectifs strictement partisans et moraux. Le parlement se doit de v?rifier et de superviser l?application du programme gouvernemental dans ce secteur, entre autres. L?institution l?gislative doit ?galement s?attacher ? promulguer les lois et r?glements pr?vus par la constitution et entrevus pour l?am?lioration de la situation ?conomique et sociale du pays.
La constitution a par ailleurs d?fini les attributions et responsabilit?s de la Haute Autorit? pour la Communication audiovisuelle (HACA) en mati?re de respect de l?expression plurielle des diff?rents courants d?opinions et de pens?es, en plus du droit ? l?information, dans le cadre du respect des valeurs nationales et des lois en vigueur dans le royaume. Ainsi donc, toute entreprise allant contre ces attributions ou ?uvrant ? les contourner, voire ? les d?tourner, serait? une flagrante violation de l?esprit et de la lettre constitutionnels.
M. le ministre de la Communication a d?clar? haute et fort qu?il n?appartenait pas ? des fonctionnaires non ?lus de d?cider des choix et orientations de la production m?diatique mais, dans le m?me temps, et en consid?ration du fait qu?il est lui-m?me un fonctionnaire non ?lu, il s?est octroy? ce pouvoir d?intervention et d?orientation dans le paysage audiovisuel, pr?textant un dessein moral. Mais, s?il s??tait donn? la peine d?observer les dispositions des cahiers des charges ?labor?s par son d?partement, avant leur amendement, il aurait remarqu? qu?il se pla?ait lui-m?me dans une position qui ne lui permet pas de prodiguer ses conseils et de se lamenter sur le sort actuel du paysage audiovisuel national. Et la meilleure preuve de cette situation est le classement du Maroc au 147?me rang mondial en mati?re de libert? de la presse, un classement qui revient ? cette approche autoritaire de l?Ex?cutif quant ?? la production m?diatique. Et l?entreprise du ministre el Khalfi de rapprocher les m?canismes de tutelle de son minist?re de l?influence tentaculaire du Mouvement Unicit? et R?forme est un autre exemple de ces objectifs r?solument obscurantistes.
Le retour du discours moral et religieux ?tablit clairement les revers enregistr?s dans les politiques de r?forme qui n?ont pas trouv? leur chemin pour leur r?alisation?; et pour se d?douaner de toute accusation ult?rieure d?avoir laiss? les choses aller ? d?liquescence, le ministre el Khalfi prend appui sur la dimension morale, esp?rant justifier son ?chec cuisant dans la gestion d?un secteur vital, mais aussi ma?tre de son destin.
Notre responsabilit?, en tant que signataires de cette p?tition, consiste ? tirer la sonnette d?alarme face ? cette tentative de mise sous tutelle de ce secteur, entreprise par le minist?re de la Communication. Et le discours moral et moralisateur poussi?reux et venu en droite ligne du mus?e de l?Histoire n?est qu?un arbre qui cache la for?t des contradictions et aussi, et surtout, la volont? de dompter, de soumettre puis de contr?ler le paysage audiovisuel, afin qu?il devienne ma?tris?, sans ?me ni vision.
Nous d?non?ons donc avec force et vigueur la port?e hostile du discours du ministre el Khalfi, et nous appelons ?galement l?ensemble des acteurs et intervenants ? se dresser de nouveau contre ces appels ? la domination et au contr?le. En effet, la lutte pour la libert? de la presse et pour la cons?cration de la mission des m?dias dans l??ducation et le rayonnement ne peut ?tre dissoci?e de la vraie bataille qui est celle de la libert? et du progr?s.
Les premiers signataires
Mouaad Rhandi journaliste et producteur
Sanaa El Aji Journaliste et ?crivain
Ahmed Arrehmouch, coordinateur du r?seau amazigh Azetta
Fatiha Darif, vice pr?sidente de la section Maroc d'Amnesty International
Fatiha Sadass; membre du bureau politique de l'USFP
Khadouj Slassi, pr?sidente de l'organisation ittihadie des femmes
Samira Sita?l, journaliste
Driss Moussaoui, ancien pr?sident de l'association mondiale de la psychiatrie sociale
Latifa Ahrarre, actrice
Na?m Kamal, journaliste
Sabah Chra?bi, universitaire
Laila Ouachi, experte en communication
Narjis Rerhaye, journaliste
Abdalilah Souadka, membre fondateur du Forum du d?bat d?mocratique
Mohamed Benarbia, journaliste
Aziz Boucetta, journaliste et directeur du site internet ??Panorapost??
Youssef Jajili, directeur de la publication du journal ??Al Ane??
Ahmed Aassid, ?crivain et chercheur
Mohamed Choubi, acteur
Saad Sarhane, ?crivain
Abdessalam El galaai, r?alisateur
Mokhtar Laghzioui, directeur de publication du journal ??Al Ahdat Al Maghribia??
Mouna Fettou, actrice
Driss Roukh, Acteur
Yacine Omari, journaliste
Khalid Nakri, producteur
Jamal El Khanoussi,? journaliste
Jihane El Bahar, sc?nariste
Outhmane Benadjallil, producteur
Nadia Kamal Merouizi, sc?nariste
Mohamed Moftakir, r?alisateur
Si Mohamed Lachhab journaliste et ?crivain
Abdelhamid Jmahri, po?te et ?crivain
Mohamed Bayoude, directeur artistique du ficam
Youssef Fadel, cin?aste et romancier