Al-Qods et le paradigme andalous – Par Faouzi Skali

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L’anthropologue marocain Faouzi Skali deavant Masjid Al Qads avec l’Imam de la mosquée

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Récemment a été signée à Jérusalem une convention de coopération entre les Présidents de la fédération sépharade du Canada et à l’échelle mondiale , M. Avraham Elarar et M. Haim Cohen, le Professeur de sciences politiques et Président du Centre d’études et de recherches sur le Droit et la Culture hébraïques au Maroc, M. Abdellah Ouzitane et l’anthropologue marocain Faouzi Skali  Président de l’initiative -menée avec Avraham Elarar : « The Andalusian Heritage Project ». Pour l’ensemble des signataires la paix doit d’abord être pensée et conçue dans les esprits et donc être portée par une dimension culturelle. C’est le sens de cette convention qui s’inscrit dans le long terme.

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De gauche à droite les signataires : Faouzi Skali , Président de l’initiative « The Andalusian Heritage Project », Haim Cohen , Président de la fédération sépharade mondiale, Abdellah Ouzitane Professeur de science politique et Président du Centre d’études et de recherches sur le Droit et la Culture hébraïques au Maroc, Avraham Elarar , Président de la fédération sépharade du Canada.

Faouzi Skali évoque dans cet article comment l’héritage culturel multi séculaire andalous constitue aujourd’hui un patrimoine vivant à partir duquel on peut repenser et construire l’avenir. Notamment autour de cette maison commune que constitue Jérusalem.

 C’est la question que se pose et sur laquelle se propose de réfléchir l’initiative de créer une plateforme digitale intitulée « The Andalusian Heritage Project » . Car l’initiative en question partagée par plusieurs partenaires qui travaillent et œuvrent à faire connaître cet héritage d’al Andalous se situe dans une perspective inédite qui prend tout son sens et sa portée dans le contexte géopolitique actuel. Une vision depuis longtemps portée par Sa Majesté le Roi Mohammed VI de procéder à une nouvelle forme de gouvernance et de politique interconfessionnelles par lesquelles les religions abrahamiques deviennent non pas des facteurs de conflits et de dérives mais ceux d’une vision de paix, d’interfécondation et de créativité. Ce fut le cas de ce que l’on appelé le « paradigme andalous ». Nous parlons ici de paradigme qui est une configuration de pensée qui peut devenir dans certaines circonstances de l’histoire particulièrement productive et fructueuse.

 Il ne s’agit cependant pas dans ce projet d’une volonté d’aller chercher la réalité historique d’al Andalous dans le passé pour la reproduire dans le futur, avec souvent les présupposés idéologiques sous-jacents qui l’accompagnent, mais de nous interroger sur ce qui a rendu ce miracle andalous - un peu comme on parle de miracle grec- possible. Quelles sont les visons spirituelles, philosophiques culturelles et artistiques qui ont pu créer l’émergence d’une certaine idée de notre humanité où la diversité est un atout majeur, où on s’interroge sur les articulations fécondes entre foi et raison , entre les sciences , les arts et les spiritualités . De cet univers de pensée qui a su si bien conjuguer la vie dans ce monde et son ouverture à un au-delà spirituel nous avons une saveur qui nous a été transmise jusqu’à aujourd’hui par les traditions poétiques et musicales d’Al Andalus. Au-delà des mots et des discours cette symbiose d’esprit qui s’établit entres les traditions juives et musulmanes dans des concerts arabo-judéo-andalouse est révélatrice d’une connivence profonde et d’une pensée convergente. Cette même convergence qui parcourt sous la forme de débats philosophico-spirituels  les œuvres d’un Averroès , Maimonide , Ibn Gabirol ou Ibn Arabi et qui continuent de garder ,dans le contexte du monde actuel , une particulière pertinence . Comment remettre au cœur de notre actualité ces débats, comprendre la portée et le rôle qu’ils peuvent jouer dans la construction d’une vision d’avenir? C’est tout l’enjeu de ce projet construit autour de l’héritage andalous. Cela part de la simple observation que la paix, toute paix se construit d’abord dans les esprits. Elle est culturelle avant de devenir politique.

Le « miracle andalous » peut donc devenir l’objet d’une revisitation et d’une nouvelle renaissance. Celle d’une humanisme qui ne renonce pas à sa dimension de transcendance, un humanisme spirituel qui aurait tant à apporter à un monde livré à une course sans boussole vers un « transhumanisme » et un matérialisme exacerbé. 

Un nouvel universalisme peut-il naître de la rencontre entre ces deux traditions sémitiques, juives et musulmanes, qui décident comme le disait le Roi Hassan II de conjuguer leurs génies pour la mise en œuvre de leurs immenses richesses et héritages communs ?

Le Maroc qui a gardé vivant cet héritage andalou en le transformant , comme l’a mentionné Avraham Elarar , en une idée fondatrice et la volonté de procéder à sa fructification à une large échelle peut y apporter une contribution essentielle.

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