Les cavités souterraines de Béni Mellal, un danger imminent pour de 230 bâtisses de l'ancienne médina

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La médina de Béni Mellal a été bâtie au-dessus d'un immense réseau de cavités souterraines

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Béni Mellal – L’effondrement le 4 mars dernier d’une maison dans l’ancienne médina de Béni Mellal et la mort d’une femme dans ce tragique incident ont propulsé au-devant de la scène la problématique des bâtiments menaçant ruine. Cet incident fait craindre de nouveaux effondrements car l’ancienne médina de Béni Mellal compte quelque 230 constructions menaçant ruine situées dans des zones instables et à très haut risque, ce qui confirme la fragilité urbaine de la médina en raison de la présence d’un réseau de cavités souterraines.

L'ancienne médina de Béni Mellal a été bâtie au-dessus d'un immense réseau de cavités souterraines et son sous-sol recèle un nombre important de cavités et grottes souterraines. Ces cavités sont très proches de la surface et présentent des formes et des tailles variées. La plupart des cavités décelées sont situées au-dessous des constructions et débordent parfois sous les voiries ou les espaces publics.

Ces cavités ont été délibérément creusées par les anciens habitants de la médina de Béni Mellal pour répondre à un certain nombre de besoins. Jadis, elles constituaient des sources de matériaux de construction, des refuges contre les ennemies et les intempéries, des espaces de stockage de produits et de matériaux spécifiques en plus d’être des lieux d’activités artisanales. Ce qui fait qu'aujourd’hui l’ancienne Médina de Béni-Mellal repose sur un réseau dense de cavités mal répertoriées lesquelles constituent un danger permanent pour la population puisqu’elles sont dans la plupart des cas à l’origine des effondrements de constructions.

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50 MDH pour la réhabilitation de l'ancienne médina

Sur directives Royales relatives à la valorisation, la réhabilitation et la mise en valeur des anciennes médinas, le ministère de l’Aménagement du Territoire national, de l’Urbanisme, de l’Habitat et de la Politique de la Ville a alloué 50 millions de dirhams pour la réhabilitation de l’ancienne médina de Béni Mellal.

Le programme de réhabilitation de l’ancienne médina de Béni Mellal comprend la réalisation des travaux de voiries internes et de pavage et bétonnage des ruelles et places publiques et des espaces verts en plus d’autres travaux liés à la stabilisation et la consolidation des cavernes et de l’aménagement des places Liberté et Résistance. Le « taux d'achèvement de ce programme a jusqu'à présent atteint 95% », selon le directeur régional de l’Aménagement du Territoire national, de l’Urbanisme, de l’Habitat et de la Politique de la Ville, Abderrahim Loughmari.

Le programme comprend également les travaux de construction et d’équipement des fontaines aux niveaux des différentes places de l’ancienne médina, les travaux de plantation d’espaces verts et les travaux d’éclairage public de manière à mettre en valeur l’ancienne médina de Béni Mellal. Les travaux de la mise sur pied d’un programme complémentaire d'intervention pour les bâtiments à très haut risque sont en cours, ajoute M. Loghmari.

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Selon les indications connues, aucun secteur de la médina n’est épargné, puisque plusieurs cavités "communiqueraient" entre elles, sous forme de réseau de galeries émaillées et ramifiées. Les limites de ces grottes sont, dans la plupart des cas, indéfinies et ne respectent pas le plan parcellaire du terrain en surface du sol. Ainsi, une cavité "exploitée" par le propriétaire d’un logement déterminé, occuperait même le plus souvent, des sous-sols, relevant de propriétés voisines.

Un programme titanesque pour le relogement des habitants et la réhabilitation de la médina

Face à la gravité de la situation, l'opération de traitement des édifices menaçant ruine de la médina et de relogement de leurs occupants est menée en partenariat entre le ministère de l’Aménagement du territoire national, de l’urbanisme, de l’habitat et de la politique de la ville, la Wilaya de la région de Béni Mellal-Khénifra, la commune de Béni Mellal et le Groupe Al Omrane. Une enveloppe budgétaire de près de 35,615 millions de dirhams a été consacrée à cet effet.

Un financement additionnel de 2,1 millions de dirhams a été dédié dans le cadre de l’Initiative nationale pour le développement humain (INDH) au raccordement des maisons de la médina au réseau d’assainissement qui aggrave le phénomène des effondrements en raison des déversements des déchets solides et liquides dans les cavités souterraines.

Les d’études techniques et géophysiques réalisées par des spécialistes en la matière ont permis d’identifier 240 constructions représentant un risque très élevé d’effondrement en raison de la proximité des cavités de la surface, ce qui impacte leur stabilité. D’après ces études, 230 habitations représentent un risque élevé et 196 édifices représentant un risque moyen. Les constructions restantes, sachant que la médina compte 2.791 habitations, ne sont pas exclues du danger même si certaines d’entre elles sont classées sans risque.

Le directeur régional de l’Aménagement du territoire national, de l’habitat, de l’urbanisme et de la politique de la ville à la région Béni Mellal-Khénifra, Abderrahim Loughmari, a indiqué dans une interview à la MAP que la maison qui s’est malheureusement effondrée le 4 mars dernier à la médina ne figure pas parmi les édifices à risque et paraissait stable et solide des différents examens visuels effectués.

M. Loughmari a fait savoir que le ministère et ses partenaires au niveau local, en particulier la commune urbaine de Béni Mellal, ont consacré 31 millions de dirhams en vue de traiter la situation de près de 800 familles. Le ministère a pris en charge le relogement de près de 298 familles au lotissement An-nour dans la banlieue de la ville, alors que la commune urbaine de Béni Mellal accompagne environ 300 familles à reconstruire au sein même de la médina et offre aussi une assistance technique pour restaurer les façades de certains édifices qui présentent des fissures.

Il a également relevé à ce propos que quelque 257 édifices ont été démolis jusqu’à présent, eu égard au danger qu’ils représentent pour les passants et la sécurité publique. Aussi, quelque 228 familles ont été relogées et 153 lots de terrains ont été remis à titre gracieux aux bénéficiaires assortis d’une subvention de 20.000 dirhams.

Le directeur régional de l’Aménagement du territoire national, de l’habitat, de l’urbanisme et de la politique de la ville à la région Béni Mellal-Khénifra a toutefois reconnu que ce programme fait face à de nombreuses contraintes car une grande majorité des habitants qui sont des locataires, sachant que les propriétaires ont quitté la médina pour s’installer ailleurs, n’adhèrent pas à cette dynamique.

Ce désintérêt, a-t-il dit, s’explique par deux facteurs, d’abord l’attachement affectif à la médina où ils travaillent et ensuite l’éloignement des quartiers de relogement, le lotissement An-nour en l’occurrence.

M. Loughmari a également pointé du doigt la précarité sociale de la médina de Béni Mellal qui se caractérise par la faiblesse de son tissu économique, le manque d’emplois, l’absence de l’activité de l’artisanat, notant que la médina compte des dizaines de maisons non encore raccordées au réseau d’eau potable qui est dans un piteux état, de même que celui des eaux usées.

 

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