LOI FRANÇAISE SUR LE ‘’SÉPARATISME ISLAMISTE’’: II - LE ''républicano-maccarthysme'' MACRONIEN

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La ségrégation frappera indistinctement toutes les catégories de Musulmans. Ceux d’entre eux qui ont renoncé à leur religion ne sont pas, tout autant à l’abri du climat de suspicion généralisée qui entoure leur origine musulmane.

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Après deux semaines de débats cahoteux, les députés français ont adopté le 16 février, en première lecture, le projet de loi « confortant les principes républicains », plus célèbre par la « loi sur le séparatisme islamiste ». Le texte arrivera devant le Sénat à partir du 30 mars. Dans une série de trois articles, Abdelahad Idrissi Kaitouni revient sur ce débat qui agite le bocal français, stigmatisant pour les Musulmans de France. Dans cette deuxième partie, il revient sur comment la France glisse perceptiblement vers un « maccarthysme » macronien qui fera de tout Français de culture musulmane un coupable jusqu’à une improbable preuve du contraire. Il dit aussi comment la France s’ouvre en toute bonne conscience à la délation.

Depuis qu’Emmanuel Macron donné une interview à Al Jazeera, j’essaie de trouver un sens à son intervention. Officiellement il voulait désamorcer la colère du monde arabo-musulman suscitée par sa violente sortie contre l’Islam. Si tel était l’objectif, il ne pouvait pas plus mal s’y prendre, car ses propos masquaient mal ses ressentiments à l’égard des musulmans.

Suffit-il qu’il dise qu’il a du respect pour l’Islam pour effacer par enchantement les blessures que ses propos ont infligé à un milliard et demi de personnes ? Dans le développement de son discours il n’a eu, à aucun moment, un terme de compassion pour tous ceux qu’il a blessés. Il aurait pu, en quelques mots présenter des excuses et la cause était entendue. Quel mal y avait-il à faire croire que ses propos, mal compris, ont été sortis de leur contexte, et bla-bla-bla, bref tous les cataplasmes qu’on sort en pareille situation pour panser ce genre de blessures. Il a manqué l’occasion de montrer la sincérité de sa démarche en reconnaissant la part de responsabilité de la France, et de l’Occident en général, dans l’émergence de l’islamisme et sa propagation.

C’était trop lui demander, car de toute manière son but était autre !

Le même scénario s’est répété au Caire où Yves Le Drian s’était rendu pour répéter le message convenu du respect de l’Islam au gouvernement égyptien, mais surtout au Recteur de Al Azhar. Pas d’amende honorable non plus du ministre des affaires étrangères, juste son insistance sur l’intangibilité de l’usage des caricatures du Prophète, unique moyen pour la France d’initier les jeunes à la liberté d’expression.

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Écoute polie des Égyptiens, sans plus ! Mais les officiels comme les religieux ont compris que le sort des Musulmans en France devrait connaître des bouleversements majeurs sous peu.

Macron savait parfaitement que ses déclarations à Al Jazeera n’allaient pas atténuer la colère des Musulmans. On ne va pas verser dans le cynisme que certains prêtent à Macron qui chercherait délibérément à exacerber le ressentiment des Musulmans, avec le but inavoué de pousser des nervis et autres détraqués à se lancer dans de nouvelles aventures criminelles. La survenue de nouveaux attentats va rajouter aux émotions récentes des émotions nouvelles ... la voie royale pour une adhésion franche et massive des Français aux lois sur le «séparatisme ».

Apparemment Macron semble obsédé par cette idée de séparatisme. Cela est parfaitement compréhensible, puisque c’est la dernière carte sur laquelle il compte jouer pour espérer sa réélection en 2022. Sur le plan économique toute perspective de relance a été balayée par les effets de la pandémie. Auparavant les Gilets Jaunes avaient fait voler en éclats toutes ses prétentions de réformes. Jusqu’à la gestion de la crise sanitaire qui lui a ôté toute crédibilité du fait de sa gestion chaotique ... .

De coup la campagne contre les Musulmans apparaît comme un atout, le dernier, peut être l’unique, pour son avenir politique. Le calcul est judicieux quand on sait que le plus important gisement de voix en France est celui de ceux, innombrables, qui ont sombré à cause, entre autres, des médias dans l’anti-islam.

On comprend qu’il ne veuille pas abandonner ce formidable gisement à Marine Lepen. Qu’il puisse se livrer avec sa rivale à leur surenchère imprécatoire contre les Musulmans serait à la limite recevable car l’Islam a bon dos. Il est devenu le souffre-douleur de tous les excès et le réceptacle de tous les débordements haineux.

Macron aurait pu ramener sa guéguerre contre l’Islam à une simple question électorale. Mais c’est totalement insuffisant pour assouvir son violent rejet de cette religion, et certainement aussi pour contenter ceux qui l’ont fait Roi. Alors il s’est apprêté à franchir un niveau encore jamais égalé dans l’ostracisation officielle d’une partie de la population française. Au niveau de l’Assemblée Nationale, c’est maintenant chose faite. En attendant le Sénat où il y a peu de chances qu’il retoque le projet de loi.

En effet, les lois sur le séparatisme vont consacrer l’institutionnalisation officielle d’une catégorie de Français de seconde zone. Désormais, en vertu de ces lois, les Français musulmans n’auront plus le droit de s’organiser en associations qui ne seraient pas en permanence soumises au contrôle systématique des services de sécurité. Les fermetures des lieux de culte s’en trouveront facilitées. Une délation, un soupçon de soupçon de lien avec le terrorisme et la mosquée sera fermée. Les associations seront dissoutes pour des motifs similaires. On commencera par dissoudre les associations caritatives parce qu’elles sont censés aider les plus précaires, c’est à dire la catégorie où se nichent les potentiels candidats terroristes. Et allez voir ce que ces lois généreront pour femmes voilées, les enfants dans les cantines, l’industrie du halal etc ... .

Les lois sur le séparatisme ne visent pas que l’entrave à l’exercice de la foi de ces sous-Français, mais cherche à essentialiser tous ceux qui peuvent avoir un lien quelconque avec l’Islam. Oui un lien quelconque, pas forcément la pratique religieuse.

Même l’excellent politologue et islamologue François Burgat est tombé dans le piège en faisant ce terrible constat : «Un bon Musulman pour les Français est un Musulman qui ne l’est plus ». Il y a des dizaines de milliers de musulmans athées, comme il existe des Juifs ou des Chrétiens athées. Il y a autant d’agnostiques, et pas loin de 85% des Musulmans ne sont pas pratiquants. Le reliquat, soit moins d’un million sont dans la pratique religieuse d’une manière régulière ou épisodique.

La ségrégation frappera indistinctement toutes ces catégories de Musulmans. Ceux d’entre eux qui ont renoncé à leur religion ne sont pas pour autant à l’abri du climat de suspicion généralisée qui entoure leur origine musulmane. Les accents du grand discours de Macron sur l’hydre islamique retentissaient comme des appels à l’avènement d’une société de délation.

Jean-François Bayart, professeur de sociologie politique à Genève, dans une chronique remarquable publiée par Le Monde du 2 novembre dernier, a qualifié ce climat délétère promis aux Musulmans de France comme une forme violente de «républicano-maccarthysme».

Ce néologisme à la fois barbare et pudique signifie simplement qu’il s’agit bel et bien d’un système d’apartheid. Avec les lois sur le séparatisme, la France deviendra, après Israël, le deuxième pays au monde à faire vivre une partie de sa population sous régime d’apartheid.

Les Français, les fils des Lumières, vont-ils s’affranchir de cette infamie, vont-ils pouvoir se relever un jour du caniveau où les médias mainstream veulent les maintenir ?

 

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