''STAR - SYSTEM'' : UN MODÈLE ÉCONOMIQUE - Par Mustapha SEHIMI

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Au Maroc, le star-system concerne surtout les sportifs. Ce qui s'est passé lors du Mondial au Qatar avec l'exploit des Lions de 1'Atlas, est bien le point d'orgue de cette polarisation du star systeme autour de Bounou, Hakimi, Amrabat, Ounahi, Ziyech,...

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RENTREE: MAUVAIS DOSSIERS… Par Mustapha SEHIMI

Un phénomène bien particulierز celui du star -system. Il a fallu la fin des années 1980 pour que les économistes s'y intéressent et arrivent peu ou prou à en donner une explication conséquente. Pourquoi des consommateurs, face à un marché de talents, vont privilégier des profils bien particuliers (chanteurs, artistes, sportifs,...) au détriment d'autres dont les qualités sont supposées moindres. 

C'est qu'une star constitue une garantie quant au succès escompté de l'opération. Même phénomène d'ailleurs du côté du consommateur ainsi que celui du producteur (cinéma, commerce, marketing,...) ? L'un et l'autre tablent sur la même logique de sélection. Un cercle vertueux opère ; le star -system s’y développe. La notoriété est au cœur de l'utilisation de la célébrité (parfums, lignes de vêtements, articles de sport,...).

Cinéma, sport...

Pareille logique s'est surtout développée avec l'avènement du cinéma. Elle a alors conduit à accorder à l'artiste un double statut: celui d'image mythique voire même fantasmatique; celui aussi d'une marchandise ou d'une "marque" - un nom qui favorise les ventes. Ce phénomène s'est développé et même systématisé avec l'industrialisation de la culture depuis le cinéma; il s'est ainsi élargi à la "production" de plus en plus artificielle d'ailleurs de stars façonnées par les majors, notamment celles de la musique. Les politiques mises en œuvre à cet égard visent à rassurer les investisseurs et à consolider leurs parts de marché. Le star-system s'ap- -parente à une garantie de production - ce qui le renforce... Cette logique ne se limite pas aux acteurs du monde de la culture et s'étend à ceux de la diplomatie. Les majors culturelles sont présentes sur plusieurs continents. Elles veillent à la production d'œuvres suffisamment consensuelles en vue de publics divers; ce qui induit en même temps à un calibrage "mainstream". Les stars sont considérées comme les plus à même de garantir un succès planétaire. Le succès, s'il est au rendez-vous, va contribuer à son tour à renforcer la visibilité des stars sélectionnées. Et le casting international des grandes productions hollywoodiennes est sans doute moins conçu pour des raisons esthétiques que pour cette préoccupation: garantir au mieux la pénétration du film dans des marchés nationaux différents. A noter encore qu'au plan international, de nombreuses personnalités sont sollicitées, par exemple, comme 1' UNICEF, en tant qu'"ambassadeur" de bonnes causes et d'actions en faveur de démunis.

Le monde la culture, oui, mais aussi celui du sport. Un vivier dont témoigne non seulement le sport -roi qu’est le football mai aussi, le tennis, le cyclisme, la course automobile, l'athlétisme,... Sur un autre plan, les productions culturelles s'accommodent du déploiement plus ou moins explicite de messages en faveur de nations. Telle 1'Allemagne hitlérienne avec les arts plastiques, la musique (Herbert Von Karajan, Wagner,...) ou le cinéma. Tel encore le cinéma russe (Serguel Eisenstein), la musique (Dimitri Chostakovitch, Sergueï Prokofiev). Le cinéma américain, lui, n'a pas manqué de n'inscrire dans cette même perspective avec l'influence du… Pentagone dans la réécriture de centaines de films produits par les majors. Des films comme Rambo ou Top Gun sont ainsi en adéquation avec 1e discours politique de sécurité nationale. A travers tout cela- et sans doute aussi un jeu vidéo -c'est un morceau de culture nationale que l'on présente : un système de valeurs, un contexte, une société. Un message indirect, pas toujours subtil, bien instrumentalisé par la diplomatie internationale.

Visibilité du Maroc

Le Maroc n'échappe pas à cette mondialisation du star -system: tant s'en faut. Il la subit. Rien d'étonnant, elle est dans les flux culturels et commerciaux liés à la forte exposition du Royaume à l'international (télévision, communication, publicité de marque, etc.). Ce qui est plus intéressant à relever est sans doute ailleurs: y a-t-il un "made in morocco" produisant un star -system local ? Oui, dans divers domaines. Les sportifs, surtout les athlètes, y ont une place de premier plan. A grands traits, il faut remonter à la première vague avec Saïd Aouita, Hicham Guerrouj et de manière moins marquée un profil féminin avec Nawal Koutawakil. Puis des acteurs populaires de télévision on encore de cinéma américain (Saïd Taghmoui). Mais la grande vague est assurément celle des footballeurs, surtout ceux évoluant dans les grands clubs internationaux. 

Ce qui s'est passé lors du Mondial au Qatar, en décembre dernier, avec l'exploit des Lions de 1'Atlas, est bien le point d'orgue de cette polarisation du star systeme autour de Bounou, Hakimi, Amrabat, Ounahi, Ziyech,... Une fièvre durable ou conjoncturelle ? Tout dépendra de la suite de leurs carrières... Le marketing - sportif en l'occurrence -est la mise en marché ; c'est un ensemble de principes et de formules associé au développement du commerce. Une logique de marque en plein développement qui accroît la visibilité d'un pays. Le Maroc en cueille les premiers fruits aujourd'hui avec l'exceptionnelle promotion du tourisme. Reste à consolider cet acquis...

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