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Au top 5 mondial, l’Inde une superpuissance économique en devenir
L’Inde, une économie en pleine croissance
Par Driss HACHIMI – (Bureau de la MAP à New Delhi)
New Delhi - Il y a dix ans, elle était la 11e économie du monde. A l'heure qu'il est, elle pointe au 5e rang mondial. L’Inde, pays de 1,4 milliard d'habitants, ne cesse de grimper les échelons à la faveur d’un taux de croissance le plus rapide parmi les grandes économies.
Le moment n'aurait pas pu être plus symbolique. 75 ans après avoir recouvré sa liberté, le pays de Gandhi a désormais une économie plus grande que celle de son ancien colonisateur.
En fait, le chemin emprunté depuis 2014 révèle que le pays-continent pourrait obtenir le statut de troisième économie en 2029, soit un saut de sept places depuis 2014, lorsque l'Inde était classée 10e. Selon des analystes, l'Inde devrait détrôner l'Allemagne en 2027 et très probablement le Japon d'ici 2029 avec le taux de croissance actuel.
Selon les données du Fonds monétaire international, le PIB de l’Inde qui a dépassé celui du Royaume-Uni sur une base annuelle cette année, est désormais évalué à 3.530 milliards de dollars, contre 3.380 milliards pour celui du Royaume-Uni, dont l'économie est aux prises avec une forte baisse de la croissance et une inflation record.
Parmi les plus grandes économies du monde, l’Inde s’est brillamment distinguée en 2022 avec un taux de croissance de 7,5%, presque deux fois plus rapide que les 4,4% de la Chine, soit le rythme le plus rapide au monde.
"Le Fonds monétaire international et la Banque mondiale ont tous deux prévu que le taux de croissance de l'Inde serait le plus rapide pour les deux prochains exercices, et leurs estimations sont également en phase avec celles de la Reserve Bank of India", commente la ministre indienne des Finances, Nirmala Sitharaman.
"Par rapport aux autres plus grandes économies, nous sommes sur les bons rails. Nous sommes littéralement l'économie à la croissance la plus rapide", s'est-elle réjouie.
L'Inde semble en effet résister à tous les aléas, et ce malgré la situation économique mondiale morose plombée par la pandémie de Covid-19 qui a certes mis à genoux le secteur des soins dans le pays avec un bilan des plus lourds de 520.000 morts, mais a apporté au pays, en 2021-2022, des gains de plus de 25 milliards générés grâce à l'exportation de vaccins et d'équipements médicaux.
Le pays émergent présente une dynamique économique très performante et ce n'est pas sorcier. Plusieurs facteurs y contribuent dont une série de mesures de relance et de nouvelles lois lancées par le gouvernement Modi, des incitations diverses pour les PME, renforcement des infrastructures, lancement de la politique phare de production locale " Make in India" en sus de programmes de protection sociale.
A cela s'ajoutent l’accroissement de la classe moyenne, l'augmentation de la population jeune (72 % de la population a moins de 30 ans) et le développement de la connectivité (2e base mondiale avec ses 700 millions d'abonnés internet).
Certes, la performance historique a catapulté le pays au top 5 des plus grandes économies, cependant il sied de faire un focus sur la partie cachée de l'iceberg. En fait, un nombre croissant d'économistes soupçonnent de plus en plus de prendre le PIB comme véritable critère de développement d'une nation.
Le PIB, basé sur la valeur marchande totale de tous les biens et services produits dans un pays sur une période donnée, est le principal indicateur économique utilisé au niveau international pour évaluer la richesse dans un pays donné, commence à être discrédité au motif que le bien-être d'une nation ne peut être réduit à une mesure du revenu national. Et c'est là que réside le paradoxe de l'Inde dont le taux de croissance du PIB est fort élevé tandis que l'indice de développement humain est toujours en deçà des attentes.
Dans ce sens, l'on constate que le PIB de la cinquième nouvelle économie mondiale de 3.500 milliards de dollars doit nourrir les 1,4 milliard d’Indiens alors que les 3.200 de la Grande-Bretagne ne doivent en nourrir que 68 millions d’habitants.
Quoi qu'il en soit, l'Inde a le droit de s'enorgueillir de ce nouveau ranking. " Le colonialisme faisait de l'Inde l'une des nations les plus pauvres, elle se dressait fièrement comme la 5e plus grande économie du monde à l'heure actuelle", a considéré le ministre indien des Affaires étrangères, Subrahmanyam Jaishankar, à New York en marge de la 77e session de l'Assemblée générale de l'ONU.
"Au 18e siècle, l'Inde représentait un quart du PIB mondial. Au milieu du 20e, le colonialisme a fait de nous l'une des nations les plus pauvres du monde. C'était notre situation lorsque nous sommes devenus un membre fondateur de l'Organisation des Nations Unies", a rappelé le ministre indien.
Aujourd'hui, l'Inde s'envisageait comme un pays développé d'ici 2047, la 100e année de son indépendance, a-t-il dit.
En tout état de cause, la troisième économie d'Asie est fort convaincue que la trajectoire en hausse de son PIB se doit de continuer dans l'avenir, portée par un marché intérieur gigantesque et une industrie en perpétuelle évolution.
L'accès du pays au top 5e des plus grandes économies a fait la fierté de tout un peuple, selon Anand Mahindra, président du groupe automobile Mahindra, qui a estimé qu'il s'agit d'une nouvelle qui aurait rempli le cœur de tous les Indiens qui se sont battus avec acharnement et ont beaucoup sacrifié pour la liberté et "une réponse silencieuse mais forte à ceux qui pensaient que l'Inde sombrerait dans le chaos".