Elections locales en Tunisie: un démarrage de la campagne électorale dans l’indifférence générale

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Sans surprise, ce rendez-vous électoral est en train de susciter un large mouvement de rejet parmi la classe politique

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Tunis - Le démarrage samedi dernier de la campagne électorale pour les élections locales prévues le 24 décembre a suscité très peu d’intérêt parmi la population tunisienne.

On est loin des manifestations de joie et de liesse qui accompagnaient au cours des premières années de la révolution tout processus électoral. Cette indifférence s’explique par la lassitude et la désillusion des Tunisiens de la récurrence de rendez-vous électoraux, voulus et imposés par le pouvoir en place.

Résultat: samedi et dimanche étaient des jours ordinaires dans les différentes régions du pays. Aucune effervescence particulière n’a été constatée et tout indique que ce rendez-vous allait connaitre le même sort des dernières élections législatives de mars 2023 qui se sont soldées par un taux d’abstention frisant les 90%.

Ne suscitant que l’intérêt des seuls candidats en lice, inconnus dans leur grande majorité du corps électoral, dans la mesure où les fonctions et les missions dévolues à ce conseil sont mal comprises, voire totalement ignorées, la mise en place de cette deuxième chambre qui sera formée des conseillers locaux est conforme au projet politique de la construction par la base, voulu par le pouvoir en place en Tunisie.

Dans le climat tendu et délétère qui sévit dans le pays, ce rendez-vous est perçu comme une élection de trop. Les Tunisiens ont la tête ailleurs. Constatant la dégradation continue de leurs conditions de vie, qui se perçoit à travers une inflation galopante, des pénuries de produits de première nécessité à n’en plus finir et un ras—le-bol général, le corps électoral ne se bousculera pas certainement au portillon le 24 décembre prochain pour élire les membres du conseil national des régions et des districts (2ème chambre du parlement).

Il n’empêche que 7.217 candidats participeront à ces élections dans 2.155 circonscriptions. 22 % de ces candidats sont des jeunes de moins de 35 ans, 14 % sont des femmes et 1.080 candidats sont porteurs d’un handicap.

Hormis le flou qui entoure les rôles et fonctions de cette 2ème chambre, qui aura à examiner le projet de budget de l’État ainsi que les plans de développements régionaux et nationaux, il y a lieu de mentionner le caractère complexe et long de ce processus électoral.

Les résultats de ce scrutin uninominal seront annoncés le 27 décembre. Le deuxième tour sera fixé par décret et organisé « à partir de février 2024 », après l’annonce des résultats définitifs du premier tour et l’épuisement des recours. L’installation solennelle du Conseil des régions et districts est prévue en juin 2024.

Sans surprise, ce rendez-vous est en train de susciter un large mouvement de rejet parmi la classe politique. Au regard de l’exclusion des partis politiques de tout processus électoral et l’option d’un scrutin uninominal centré sur les personnes, les appels commencent à fuser pour le boycott de cette élection.

Plusieurs personnalités indépendantes (universitaires, activistes de la société civile, hommes politiques…) ont lancé dimanche une pétition nationale appelant les Tunisiens à boycotter les prochaines élections locales prévues le 24 décembre 2024, les considérant comme une autre étape visant à annuler les institutions de la République démocratique, et considèrent que la participation à ces élections comme étant "une contribution à la consolidation du système de répression et d’oppression".

Ils estiment que «le pouvoir en place continue de mettre en œuvre son projet politique imposé aux Tunisiens sans que ces conseils aient une loi fondamentale définissant leurs rôles et pouvoirs, ce qui est sans précédent dans l’histoire des nations et des peuples».

Pour de nombreux observateurs, le rendez-vous du 24 décembre 2023 concrétisera certainement le désintérêt des Tunisiens du jeu politique. Désabusés, déçus et supportant de plus en plus mal les effets d’une crise dont ils ne voient pas l’issue, ils ne vont pas comme ce fut le cas, en 2011, former des longues files pour choisir des représentants qu’ils ne connaissent pas et un conseil dont ils n’arrivent pas à comprendre son utilité.

 

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