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Menace d’El Niño: recrudescence des conflits et sécurité alimentaire à l’épreuve
El Niño a une influence majeure sur les températures et les précipitations, provoquant notamment des sécheresses, des inondations et des tempêtes.
Washington - Alors que l'Organisation météorologique mondiale annonçait, récemment, le début d’El Niño dans l'océan Pacifique, un impact qui semble directement lié à ce phénomène climatique extrême fait jour: l'insécurité alimentaire dans de nombreuses régions du monde.
Les événements El Niño se produisent généralement tous les deux à sept ans, avec des épisodes La Niña et des conditions neutres pendant les années intermédiaires. El Niño a une influence majeure sur les températures et les précipitations dans de nombreuses régions du monde, provoquant des événements météorologiques extrêmes, notamment des sécheresses, des inondations et des tempêtes.
Les experts dans les domaines du climat et de l'agriculture voient une corrélation étroite entre la hausse des températures et les perturbations des modèles météorologiques et climatiques, résultant du phénomène El Niño, et les crises alimentaires dans le monde, à la suite de la perturbation des cycles de production agricole.
Pour l'envoyé spécial des États-Unis pour la sécurité alimentaire mondiale, Gary Fowler, El Niño est typiquement associé à des réductions mondiales de la croissance économique et des impacts au niveau des pays qui peuvent persister pendant des années.
“Nous constatons généralement aussi des déclins mondiaux de la production de certaines des principales cultures de base : blé, riz, maïs”, a-t-il indiqué jeudi lors d'une rencontre organisée par le Foreign Press Center à Washington, avec la participation également de la scientifique en chef de l'Administration américaine des océans et de l'atmosphère (NOAA), Sarah Kapnick.
Il a fait le point sur les risques auxquels le monde est confronté face au phénomène El Niño, notamment dans les régions d'Asie du Sud-Est, d'Afrique du Sud et d'Amérique centrale, en ce qui concerne l'insécurité alimentaire.
“Nous avons aujourd’hui des stocks mondiaux de céréales assez faibles par rapport aux normes historiques. Nous avons aussi, bien sûr, l'invasion et la guerre en Ukraine, qui était l'un des cinq principaux exportateurs de maïs, de blé, de tournesol, d'orge, ce qui a énormément affecté ces marchés d'exportation”, a ajouté le responsable américain.
El Niño est également lié, d’après plusieurs études, à une recrudescence des conflits.
“Il s'agit d'un multiplicateur de menaces qui double les risques de conflit en Afrique et joue un rôle important dans plus de 20 % des conflits depuis 1950. Un temps plus chaud et plus sec sous les tropiques réduit aussi la production économique”, relève Gary Fowler qui cite une étude sur ce phénomène climatique.
Évoquant les dernières données sur El Niño, Sarah Kapnick de la NOAA a indiqué que les dernières perspectives publiées jeudi sont extrêmement importantes car elles montrent l'évolution d'El Niño dans les mois à venir, ajoutant que juin dernier a été le mois le plus chaud avec une augmentation de 0,13 degré par rapport au record précédent en juin 2020.
Soulignant l'importance de collecter des données et de comprendre le phénomène, afin de lutter contre le réchauffement climatique, l'experte a indiqué qu'il y a 99% de chance que l'année en cours soit l'une des dix années les plus chaudes.
Les experts s'attendent à ce que le phénomène "El Niño", qui se produit en moyenne tous les deux à sept ans et dont les épisodes durent généralement de 9 à 12 mois, s'intensifie progressivement, affectant les conditions alimentaires mondiales, y compris les rendements de la production agricole, et la santé des populations côtières, la pêche, ainsi que la possibilité de sécheresse et de précipitations.
Face cette menace d’El Niño et des risques de sécheresse plus élevés en Afrique australe, en Amérique centrale et en Asie de l’Extrême-Orient, l’Organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO) prépare des actions d’anticipation pour atténuer les risques, compte tenu du nombre record de personnes confrontées à une insécurité alimentaire aigüe. Plus de 60 millions de personnes dans environ 23 pays ont été affectés à la suite de l’épisode El Niño de 2015 et 2016.